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Louis Napoléon le Grand

Louis Napoléon le Grand

Titel: Louis Napoléon le Grand Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Philippe Séguin
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municipalités qui défilent devant le Président...
    Louis Napoléon, dès ses premières étapes, ne tarde pas àéprouver par l'oeil et par l'oreille le résultat des efforts de Persigny : à Orléans, à Bourges, à Nevers, à Moulins, le doute n'est guère permis. Tout cela sent l'organisation : certains détails ne trompent guère. Louis Napoléon a assez conspiré pour savoir comment on s'y prend et n'est pas facile à abuser...
    A Roanne, où le rejoint le ministre de l'Intérieur, il lui bat froid. A Lyon, il lui reproche vertement ses excès de zèle. Par réaction, il avait même préparé un discours, déjà imprimé, dans lequel il repoussait l'Empire! Il fallut de longues discussions et d'ardentes suppliques pour le dissuader de le prononcer...
    Dès lors, le sort en était jeté, car la clameur du pays n'allait pas cesser de grandir. A Grenoble, à Valence, à Marseille, à Toulon, à Aix, à Montpellier, à Carcassonne, à Toulouse, on rivalise d'imagination et d'ingéniosité pour exprimer la même et lancinante demande. Ni Persigny ni les préfets n'auraient pu à eux seuls déclencher un tel mouvement s'il n'avait répondu, sinon à l'attente, du moins au consentement du pays.
    Le doute n'est plus permis. Ayant fait son choix, Louis Napoléon doit l'annoncer au pays en s'efforçant d'abord de rassurer l'Europe. Il va, pour cela, comme on dit dans le langage sportif, y mettre le paquet: le lieu, les circonstances et le contenu de son intervention, tout est calculé de manière à graver dans les esprits les grands principes du règne qui s'annonce.
    C'est à Bordeaux qu'il décide de parler. Le choix n'est pas fortuit: car cette ville de tradition et de réputation royaliste, dont le négoce a souffert du premier Empire, n'a jamais caché le mauvais souvenir qu'elle en conservait; et son ralliement, qu'il espère, démontrerait a fortiori que tout le pays appuie le projet d'Empire.
    C'est à l'occasion d'un banquet offert par le tribunal et la chambre de commerce que le discours sera prononcé. Il s'agit par là de signifier nettement que le souci majeur du futur régime sera de fournir une réponse aux problèmes économiques et sociaux du pays.
    Reste le contenu. Au cas où cela ne serait pas encore assez clair, Louis Napoléon veut insister sur le caractère pacifique de ses conceptions : il n'est pas question pour lui de se lancer dans une réédition du règne de l'oncle. Voilà de quoi rassurer ceux qui doivent l'être, quitte à décevoir certains de ses partisans.
    C'est dire que ce discours de Bordeaux, resté justementcélèbre, est à l'usage autant extérieur qu'intérieur. Une phrase au moins est de nature à rasséréner toutes les chancelleries : « Malheur à celui qui, le premier, donnerait en Europe le signal d'une collision dont les conséquences seraient incalculables. »
    Tel est son premier message ; le reste est bien connu. Vous voulez l'Empire. Vous l'aurez. Mais je vais vous dire, moi Louis Napoléon, ce qu'il sera. D'abord, son avantage essentiel est de procurer la durée et la stabilité, pour faire en sorte que d'éventuelles difficultés à venir puissent trouver une autre issue qu'une nouvelle révolution :
    « Jamais peuple n'a témoigné d'une manière plus directe, plus spontanée, plus unanime la volonté de s'affranchir des préoccupations de l'avenir, en consolidant dans la même main un pouvoir qui lui est sympathique [...].
    « Il sait qu'en 1852, la Société courait à sa perte, parce que chaque parti se consolait d'avance du naufrage général par l'espoir de planter son drapeau sur les débris qui pourraient surnager. Il me sait gré d'avoir sauvé le vaisseau en arborant seulement le drapeau de la France... »
    Cela posé, il faut bien comprendre qu'il ne s'agit pas de reproduire ou de plagier un modèle encore présent dans toutes les mémoires :
    « La France semble vouloir revenir à l'Empire [...].
    «Par esprit de défiance, certaines personnes se disent : l'Empire, c'est la guerre. Moi, je dis: l'Empire c'est la paix. »
    L'Empire à venir se fixe en effet des objectifs tout à fait nouveaux, qui, pour originaux qu'ils soient, n'en sont pas moins fort ambitieux; durée et stabilité ne signifieront pas immobilité:
    « J'en conviens, cependant, s'écrie Louis Napoléon, j'ai comme l'Empereur bien des conquêtes à faire. Je veux, comme lui, concourir à la conciliation des partis dissidents et ramener dans le courant du grand fleuve populaire les

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