Louis XIV - Tome 1 - Le Roi soleil
château d’Athénaïs de Montespan. Que tous ceux qui l’ont vue ne l’ont jamais trouvée aussi épanouie, aussi sûre d’elle-même, aussi belle.
On répète que puisque les deux amants se sont séparés et ont décidé de ne plus pécher, pourquoi faudrait-il qu’ils ne se voient plus ? Pourquoi Athénaïs de Montespan devrait-elle être exclue de la Cour ?
« Par sa naissance, et par sa charge, elle doit y être, elle y peut vivre aussi chrétiennement qu’ailleurs », affirment des courtisans.
Il est impatient de la revoir.
Il pense à respecter ses vœux et il dit à son confesseur, le père de La Chaise, qu’il « ne fera que ce qui est juste ».
Mais ce qui est juste pour un roi, n’est-ce pas son bon vouloir ?
50.
Il tente encore de résister à ce besoin qu’il a de revoir Athénaïs de Montespan.
Il veut se convaincre que Bossuet et les dévots ont raison de le mettre en garde contre ce désir adultère qui attire sur le royaume les foudres de Dieu.
Il est sensible aux confidences de Mme de Maintenon.
Elle chuchote, elle dit qu’elle doit quitter la Cour, parce que le duc du Maine, « le fils de Votre Majesté, cet enfant chéri » est malade, qu’elle veut le conduire à Barèges, dans les Pyrénées, afin qu’il se rétablisse. Elle invoque Dieu Tout-Puissant. Puis, au moment de se retirer, comme une confession qui s’impose, elle ajoute :
— Mme de Montespan et moi avons eu aujourd’hui une contestation fort vive et comme je suis la parfaite souffrante, j’ai beaucoup pleuré… Je vous avoue, Sire, que j’ai bien de la peine à demeurer dans un état où j’aurais tous les jours de ces aventures-là et qu’il me serait bien doux de me mettre en liberté. J’ai eu mille fois envie de me faire religieuse… Je ne saurais comprendre que la volonté de Dieu soit que je souffre de Mme de Montespan. Elle est incapable d’amitié et je ne puis m’en passer ; elle ne saurait trouver en moi les oppositions qu’elle y trouve sans me haïr.
Il écoute.
Elle ne veut que le bien des enfants du roi, le duc du Maine et Mlle de Nantes, et que deviendraient-ils si elle les abandonnait et si Dieu leur retirait sa protection, puisqu’ils sont les preuves vivantes du double adultère ?
Il craint cela.
Il rassure Mme de Maintenon. Il empêchera Mme de Montespan de lui nuire, de la persécuter.
Mais il suffit de quelques jours pour qu’il découvre que la situation s’est renversée, et qu’après le retour de Mme de Maintenon de Barèges, avec le duc du Maine, guéri, resplendissant de santé, on se persuade à la Cour qu’elle l’a emporté sur Mme de Montespan.
Il lit, dans ces missives subtilisées qui lui dévoilent l’âme des courtisans, que l’on assure que « Mme de Maintenon a triomphé de la Quanto. Tout est comme soumis à son empire. Toutes les femmes de chambre de sa voisine sont à elle. L’une lui tient le pot à pâte à genoux devant elle, l’autre lui apporte ses gants, l’autre l’endort. Elle ne salue personne et je crois que, dans son cœur, elle rit bien de cette servitude ».
Il n’a pas voulu cela. Et tous ces murmures le poussent à renouer avec Athénaïs.
Mais il a peur de la vengeance de Dieu.
Il s’est rendu à la basilique de Saint-Denis, aux funérailles du duc de Valois, le fils de Philippe d’Orléans et de Mme la Palatine.
Autant Monsieur paraît indifférent, fardé comme à l’accoutumée, autant Élisabeth-Charlotte est affectée.
Il s’approche d’elle :
— Je ne crois pas, murmure-t-elle, qu’on puisse mourir d’un chagrin excessif car si c’était le cas je ne serais plus là. Ce que j’ai souffert ne se peut décrire. Si Dieu tout-puissant n’accorde pas sa protection spéciale à l’enfant dont je suis à présent enceinte, j’aurai une bien mauvaise opinion de sa vie et de sa santé, car il est impossible qu’il n’ait pas ressenti lui aussi quelque chose de ma souffrance interne.
On porte les entrailles du duc de Valois aux Grands Augustins, et son cœur au Val-de-Grâce.
Comment ne pas craindre Dieu ?
Et comment ne pas céder au désir ?
Louis va d’une suivante à l’autre, amours rapides qui le laissent insatisfait.
Et ce vide, cette frustration qu’il ressent, il tente de les combler en engloutissant les mets les plus divers, comme s’il voulait étouffer ses désirs sous les victuailles.
Mais il mange sans jamais pouvoir calmer son appétit.
Il veut que l’on
Weitere Kostenlose Bücher