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Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi

Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi

Titel: Louis XIV - Tome 2 - L'hiver du grand roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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guérir.
    Il ne se passe pas de jour qu’un intendant, un lieutenant général, ainsi La Reynie à Paris, ou Pierre de Boisguilbert à Rouen, ne lui parle de la disette qui frappe les provinces et les villes, des épidémies ou des rébellions que la rareté, le prix du grain suscitent.
    Il sait tout cela.
    Mais un roi ne doit pas se complaire dans la compassion ou dans la contemplation des malheurs de ses sujets. Dieu décidera du retour d’un temps propice aux cultures. Lui seul a le pouvoir de faire cesser les pluies et le froid afin que les moissons soient grasses.
    Louis a donc voulu écarter ces écrits et agir en roi. Il a anobli Jean Bart qui, dans la Manche, avec quelques navires corsaires, réussit à protéger des attaques anglaises les convois chargés de blé, acheté au loin.
    Il s’est réjoui – et il l’a fait savoir aux officiers – que les troupes de marine aient repoussé un débarquement anglais à Camaret, non loin de Brest. Les navires ennemis ont été incendiés, les soldats tués ou faits prisonniers.
    Voilà d’utiles actions.
    Il a lu le récit de ces batailles à Mme de Maintenon, et il lui a dit :
    — Je sens une grande joie que vous allez partager avec moi.
    Et comment s’attarderait-il à ces lamentations sous le poids des impôts quand il craint que la mort ne s’approche à nouveau pour frapper près de lui !
    Il a vu s’avancer son médecin, Fagon, dont le visage grave et soucieux l’a inquiété.
    Il l’a interrogé du regard.
    Fagon a murmuré, comme s’il ne voulait pas que Mme de Maintenon l’entende, que Mme la princesse Palatine a eu une forte poussée de fièvre, des maux de tête, des nausées, un dévoiement et un grand mal de cœur.
    Fagon s’est interrompu, s’est penché et a ajouté encore plus bas :
    — On craint la petite vérole.
     
    Louis a pensé à la dernière copie de lettre de la Palatine, où elle notait : « Je suis toujours ce que j’ai été ma vie durant, la France ne m’a pas polie, je suis arrivée trop tard. »
    Elle parlait cru comme à son habitude. Avec une vigueur joyeuse, elle évoquait les « pets tonitruants » qu’elle échangeait avec Monsieur, en s’esclaffant. Le duc de Chartres, ce courageux cavalier de Neerwinden, avait lancé après avoir entendu les pets de sa mère et de son père : « S’il ne tient qu’à cela, j’en ai autant envie que Monsieur et Madame. » Et son pet avait été le plus sonore.
    Elle avait conclu sa lettre en écrivant :
    « Ce sont des conversations princières. Si des curieux ouvrent mes lettres, j’offre cet encens en étrennes au premier qui ouvre et lit cette lettre avant vous, ma tante. »
    Elle savait que le cabinet noir copiait et traduisait ses missives. Louis n’avait pu s’empêcher d’estimer cette femme dont si souvent les manières et les propos l’irritaient.
    — La petite vérole, répète le médecin.
    La rumeur de cette maladie qui enfonce ses griffes dans le corps, et le plus souvent l’épuise et le tue, s’est répandue.
    On ne joue pas avec elle.
    Il faut que toute la famille royale quitte Versailles, pour ne pas respirer ce « mauvais air » chargé des miasmes de la petite vérole.
    Il donne des ordres. Le dauphin et sa famille, ses domestiques iront au château de Noisy-le-Sec. Les autres s’installeront à Saint-Cloud. Et lui rejoindra Marly, avec Mme de Maintenon et quelques courtisans.
    La princesse Palatine ne mourra pas, refusant de suivre les conseils des médecins, se soignant à sa guise, buvant de l’eau glacée, changeant de linge quatre fois par jour, le corps couvert par les boutons de la variole qui heureusement sèchent vite.
    Louis est rassuré, la mort a reculé.
    Mais il revoit Élisabeth Charlotte, le visage grêlé. En outre, elle a en quelques semaines grossi. Elle dit, sur un ton provocant :
    — J’ai toujours été laide, et je le suis devenue plus encore. Je suis carrée comme un dé. Ma peau est d’un rouge tacheté de jaune, je commence à grisonner, mon front et mes yeux tout ridés, mon nez toujours aussi de travers mais très brodé par la variole ainsi que mes deux joues. J’ai les joues plates, un double menton, les dents gâtées. Voyez ma jolie figure !
    Il ne la contredit pas. Il baisse les yeux. Tout ce qu’elle dit, il pourrait le reprendre à son compte, même s’il n’a pas été atteint par la petite vérole.
    Il est accablé.
    Et cette lettre anonyme maintenant qui met ses joues en

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