L'ultime prophétie
Ilduin.
— Tout ce que je veux, c'est qu'elle survive.
— C'est que nous voulons tous pour ceux que nous aimons.
De grandes batailles se préparent mais pour l'instant, aucune n'est plus
importante que de sauver cette enfant. Joignez-vous à moi, mes sœurs.
Elles s'agenouillèrent à leur tour, formant un cercle autour
de la petite fille, les mains jointes.
Tess ferma les yeux et se concentra.
Lentement, un arc-en-ciel apparut entre elles et au-dessus
de Lozzi.
Il devint de plus en plus étincelant. Puis il descendit
jusqu'à toucher le front de Lozzi.
Un instant plus tard, un petit cri échappa des lèvres de la
fillette et ses yeux s'ouvrirent brusquement. L'arc-en-ciel s'évanouit
aussitôt.
— Puis-je ? demanda l'empereur en s'approchant de sa
fille.
— Elle va bien à présent, dit Tess.
Elle se leva et se plaça aux côtés d'Archer et d'Alezzi.
Cilla et Sara la rejoignirent. Tess paraissait plus pâle qu'à son entrée mais
elle se tenait droite et forte.
L'empereur serra sa fille contre lui et pleura à chaudes
larmes de soulagement. Il se calma au bout de quelques minutes et se leva pour
faire face à ses hôtes.
— Merci.
Les Ilduins s'inclinèrent comme une seule femme.
— Et vous, ajouta l'empereur en s'adressant à Archer,
dois-je m'incliner devant vous ?
Archer secoua la tête.
— Non, aucun homme n'a à s'incliner devant moi. Je ne suis
ici que pour accomplir mon devoir.
— J'avoue avoir du mal à croire que vous soyez Annuvil,
fils aîné du Roi Premier Né.
Archer esquissa un petit sourire.
— Il n'est pas nécessaire que vous le croyiez. Tout ce qui
compte est la menace que représente Ardred pour ce monde.
— Je connais les légendes anciennes et les prophéties,
concéda Maluzza. Un devin déclara à ma naissance que j'y jouerais un rôle. Mais
je n'arrive pas à croire pourquoi Ardred appellerait de ses vœux la désolation
que ce jeune prophète nous prédit. En quoi lui serait-ce profitable ?
— Je l'ignore. Je n'ai jamais compris cette partie-là de
sa personnalité. Je soupçonne que nous ne sommes que des pions sur l'échiquier
des dieux. Je suis sûr d'une chose, en revanche : ce jeu ne s'achèvera pas tant
que lui et moi n'aurons pas réglé nos comptes.
— Et quelle sera l'issue ?
— L'un de nous doit mourir.
— Et le monde entier doit être entraîné dans cette folie ?
— Il semblerait que oui. Ardred le veut ainsi depuis
toujours. Il ne lui suffisait pas de me haïr et de chercher à me tuer. Il a
entraîné le peuple des Premiers Nés avec lui, d'abord en créant sa propre faction,
puis en obligeant mon père à en former une qui me serait fidèle. Des guerres
inconcevables s'ensuivirent. Avez-vous vu la plaine de Dederand, cette vaste
étendue de verre noir et stérile ? Ce fut là que le dernier coup fut porté.
Mais même cette dévastation ne paraît pas l'avoir arrêté.
L'empereur plissa le front, comme s'il cherchait à assimiler
le sens de ces paroles.
— Et nous devons traverser cette plaine pour affronter
Ardred, ajouta Archer, car il se trouve dans les montagnes près de la Source de la Terre.
— Cet itinéraire est dangereux, dit l'empereur. La plaine
est glissante et comporte bien des obstacles. Nous perdrons des hommes au cours
de cette traversée.
Archer opina.
— Je crois que c'est ce qu'il cherche. Je voudrais pouvoir
garantir votre sécurité et celle du reste du monde si je l'affrontais seul.
Mais je ne le puis pas. Il a installé des nids d'espions sous son contrôle et
ils se transformeront en armées à sa solde. Seuls ceux qui accepteront de le
servir survivront et prospéreront. Les autres mourront.
— Dans ce cas, dit l'empereur d'une voix résolue, nous
devons nous préparer. Ensemble. Pour le bien de notre peuple.
— Oui, approuva Archer, pour le bien de notre peuple.
— Mais avant cela, dit Sara, nous devons nous occuper des
espions qui se cachent à l'intérieur du palais. Si nous ne le faisons pas,
l'Ennemi connaîtra chaque détail de nos projets.
— Allons-y, mes sœurs, répondit Cilla. Il est temps de
montrer à l'Ennemi que nous savons nous défendre.
Tess était entourée de ses sœurs. La nouvelle de leur
arrivée avait déjà fait le tour du palais et même les nobles bozandari
paraissaient raser les murs sur leur passage. Elle n'aimait pas l'idée qu'on
eût peur d'elle. Mais elle ne fit rien pour
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