L'ultime prophétie
apaiser les craintes qu'elle lisait
sur les visages. S'ils préféraient avoir peur, tant pis pour eux. Ils avaient
dû eux-mêmes inspirer la peur à de nombreuses reprises.
— Tu es là depuis plus longtemps que moi, dit Tess à Sara.
As-tu une idée de l'endroit où ils se cachent ?
— Allons voir la gouvernante de Lozzi. Elle saura nous
dire qui la petite a vu régulièrement ces derniers temps.
— Ne crains-tu pas qu'elle soit aussi sous leur emprise ?
demanda Cilla.
— Nous allons vite nous en rendre compte, dit Tess, le
regard sombre et déterminé.
L'idée qu'on pût ainsi utiliser un enfant l'emplissait d'une
rage noire. Pour la première fois, elle ne répugnerait pas à exercer la justice
des Ilduins. Son heure avait sonné.
Tess assaillit de questions les gardes du palais et les responsables
qu'elles croisèrent, cherchant à se faire indiquer les appartements privés de
Lozzi. Si l'un d'eux répugnait à lui répondre, il se hâtait d'obéir en voyant
son regard furieux.
Ne te laisse pas guider par la colère , la mit en
garde Cilla par la pensée.
Si nous ne pouvons pas nous mettre en colère dans cette
situation, je me demande bien quand ? répondit Tess de la même façon. L’Ennemi
allait transformer cette jolie petite fille en une coquille vide. Sa cruauté
est sans limites.
Elle eut soudain une absence. Un souvenir qu'elle n'arrivait
pas à atteindre alimentait sa colère, tel un gaz invisible et volatil. Elle n'essaya
pas de se rappeler les détails. Elle en aurait le temps plus tard. Pour
l'heure, elle se contenterait d'y puiser des forces.
La gouvernante de Lozzi, Nona, était une femme à moitié
anari. En voyant les trois Ilduins entrer, elle écarquilla les yeux, surprise,
puis prit un air soupçonneux.
— Où est Lozzi ?
— Elle est avec son père, dit Tess. Tu es sa gouvernante,
n'est-ce pas ?
— Oui. Je suis plus sa mère, d'ailleurs, que celle qui l'a
mise au monde. Comment va ma petite fille ? Si vous lui avez fait du mal...
— Pas le moins du monde, dit Tess. Nous l'avons libérée de
l'emprise maléfique qui pesait sur son esprit et elle va bien maintenant. Si tu
l'aimes vraiment, tu m'aideras à trouver ceux qui lui ont fait cela. Sinon, je
te préviens, ne t'attends pas à vivre un jour de plus. Car ta vie prendra fin
ici et maintenant.
— Jamais je ne lui aurais fait de mal ! s'écria Nona.
Oui-da, elle avait changé ces derniers mois. Mais je pensais simplement qu'elle
grandissait... qu'elle avait dû entendre parler de ce qui se passait dans la
ville et avait peur pour moi...
Tess examina la femme. Son visage était anari mais ses yeux
étaient bozandari, son expression impassible comme celle des Anari mais ses
yeux sincères. Elle disait la vérité.
Tess se permit alors de sourire.
— Je te crois, Nona. Dis-nous maintenant, je t'en prie,
qui Lozzi a vu ces derniers temps. Car il est pratiquement certain que l'une de
ces personnes a pris possession de son esprit.
Nona prit une petite inspiration.
— Comprenez que je ne veuille pas accuser des innocents.
Elle ment , se dit Tess.
— Je veux des noms.
Nona secoua la tête.
— Si je vous donnais dix noms, et que le coupable soit
l'un deux, que feriez-vous des neuf autres ? Croyez-vous qu'ils ne sauront pas
qui les a soupçonnés, dénoncés ? Et qu'ils me pardonneront cette indiscrétion ?
Si vous pensez cela, alors c'est que vous ne connaissez rien à ce palais ou à
ces gens.
— Si tu te soucies de ta place et de ta sécurité,
réfléchis au danger que je représente. Je suis ici devant toi, Nona.
— Si tu es réellement une Ilduin, tu ne ferais pas de mal
à une innocente. Pas même pour punir le mal. A moins que tu ne sois toi-même
possédée par le mal que tu prétends combattre.
Tess se tut. La femme avait compris qu’elle bluffait. Elle
ne la torturerait pas pour obtenir des renseignements. Et elle concevait que
Nona refusât de parler. Quelle ait donné le nom du coupable importerait peu aux
innocents. Ils se vengeraient d'elle et elle serait incapable de se défendre.
— Nous avons besoin de l'aide de Lozzi, dit Sara, comme si
elle arrivait à lire dans les pensées de Tess, malgré le mur que celle-ci avait
érigé autour d'elles.
— Nona, Lozzi viendra avec nous dans la campagne à venir.
Elle voudra sans nul doute que tu l'accompagnes et nous ne voudrions pas qu'il
en soit autrement. Donc tu ne resteras
Weitere Kostenlose Bücher