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Ma mère la terre - Mon père le ciel

Ma mère la terre - Mon père le ciel

Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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Homme-Qui-Tue la surveillait sans rien dire. Avec soin, Chagak souleva la tête de Shuganan et pressa le bol contre ses lèvres. Tout d'abord la plus grande partie du liquide s'éparpilla, mais il finit par boire.
    — Très bien, lui dit-elle avec douceur. Bois encore un peu. Tu vas reprendre des forces. Tu te sentiras mieux.
    Quand le bol fut vide, Chagak désigna la robe et dit à Homme-Qui-Tue :
    — J'ai besoin d'une autre robe, quelque chose qui le tienne au chaud. Je dois lui retirer son chigadax et son parka.
    Pendant un moment Homme-Qui-Tue ne dit rien, les yeux durs, le regard sombre, mais finalement il acquiesça et Chagak retourna encore dans l'ulaq et cette fois elle rapporta la lourde robe en fourrure de phoque qui se trouvait sur la couche de Shuganan. Elle l'étendit sur ses jambes et lui retira son chigadax. A chaque mouvement, Shuganan poussait un cri. Homme-Qui-Tue se mit à rire et la haine de Chagak à son encontre grandit encore.
    — J'ai besoin de ton couteau, dit-elle, les dents serrées.
    Elle leva les yeux et répéta : couteau.
    — Couteau, articula-t-il dans la langue de Chagak.
    Il tira son couteau de chasse de son étui fixé sur son avant-bras gauche.
    — Couteau ? répéta-t-il en le lui tendant, mais quand elle voulut le lui prendre il l'éloigna.
    Chagak se leva, la main tendue, et attendit comme une mère se tient devant un enfant capricieux et finalement Homme-Qui-Tue lui donna le couteau.
    Chagak coupa le chigadax et le parka, elle coupa également les manches sur toute leur longueur avant de rendre le couteau à Homme-Qui-Tue pour pouvoir retirer doucement les vêtements du corps de Shuganan. Une blessure s'étendait depuis le milieu de sa poitrine jusqu'à son cou et des ecchymoses marquaient sa cage thoracique.
    — Il a plusieurs côtes cassées, constata Chagak à haute voix.
    Elle ne s'adressait pas à Homme-Qui-Tue mais à tout esprit qui pourrait l'entendre et peut-être lui venir en aide.
    La grand-mère de Chagak lui avait dit un jour que les côtes cassées devaient être enveloppées et comprimées, mais si la côte avait perforé le poumon, le blessé avait très peu de chances de survivre. Quels en étaient les signes? Du sang écumant à la bouche, de la toux et, bien que Shuganan eût saigné de la bouche, elle était certaine que cela provenait de ses dents cassées qui lui avaient coupé les joues et la langue.
    En utilisant des bandes de peaux de phoque, Chagak enveloppa le torse de Shuganan et les serra étroitement. Il geignit à plusieurs reprises et chaque fois Homme-Qui-Tue éclata de rire, comme si ce spectacle était divertissant, mais Chagak continua en faisant semblant de ne pas l'entendre.
    Lorsque ce travail fut terminé, elle se mit à coudre la blessure de la poitrine, puis appliqua de la pâte de caribou sur toutes les autres blessures.
    Chagak était assise sur ses talons, mais Homme-Qui-Tue se pencha et poussa le bras gauche de Shuganan du pied. Celui-ci tressaillit.
    Homme-Qui-Tue cracha par terre et s'exprima dans sa propre langue en désignant le bras de Shuganan.
    — Oui, il est cassé, dit Chagak, sans dissimuler plus longtemps sa colère. Tu es un chasseur tellement fort! Tu n'es si fort que pour frapper un vieil homme. Les esprits en tremblent !
    Et à son tour, elle cracha par terre.
    Aussitôt Homme-Qui-Tue la saisit par les cheveux, ses doigts lui égratignant le crâne. Il poussa son visage près du bras de Shuganan puis il articula lentement dans la langue de la jeune femme :
    — Répare son bras! Il doit sculpter. Répare son bras.
    Chagak haussa les épaules. Homme-Qui-Tue vivait avec eux depuis suffisamment longtemps pour comprendre sa langue, une langue trop sacrée pour être parlée par quelqu'un qui détruisait les villages.
    — Je vais lui réparer le bras, dit-elle.
    Homme-Qui-Tue la relâcha et Chagak commença par masser lentement le bras cassé.
    Elle n'avait jamais soigné ce genre de blessure, mais un jour, dans son village, le shaman l'avait fait. C'était un homme doté d'un grand pouvoir spirituel.
    « Je porte son amulette », pensa-t-elle en tenant l'objet sacré à deux mains. Elle se mit à chanter. Ce n etak pas le chant du shaman, mais une mélodie de femme, quelque chose d'apaisant faisant appel aux esprits pour guérir les enfants. C'était ce qu'elle connaissait de mieux.
    Le shaman avait utilisé un long morceau de bois, ressemblant à un os, quelque chose qui évoquait la force et la

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