Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Ma mère la terre - Mon père le ciel

Ma mère la terre - Mon père le ciel

Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
Vom Netzwerk:
l'ikyak.
    Il acquiesça.
    Chagak vit qu'il était assis dans son ikyak comme les chasseurs de son village, les jambes étendues. Pour tenir dans l'ikyak, elle devrait s'installer entre ses jambes et elle ne voulait pas se trouver aussi près de lui.
    — Non, dit-elle en reculant, je dois rester avec Shuganan.
    — Il est assez fort pour rester seul. Nous ne serons pas absents longtemps.
    Stupéfaite, elle le regarda sans répondre en sentant une terrible peur l'envahir. Depuis combien de temps cet homme connaissait-il sa langue? Avait-il toujours compris ce qu'elle et Shuganan disaient?
    — Tu es surprise que je parle ta langue ? dit-il en riant. Tu penses que je ne sais rien et que tu pouvais faire des plans sans que je le sache... Je connais d'autres femmes de ta tribu. Tu crois donc qu'elles ne m'ont rien appris? Quelquefois la meilleure façon de connaître l'ennemi est d'être ami d'abord.
    Chagak se sentit envahie par une faiblesse qui assombrissait tout autour d'elle.
    — Je te parle maintenant pour que tu comprennes ce que je dis. Mais une épouse doit aussi comprendre la langue de son mari.
    Il eut un sourire découvrant ses larges dents blanches et fit signe à Chagak de monter dans l'embarcation. Voyant qu'elle ne bougeait pas, il lui prit le bras et le lui tordit.
    — Monte, ordonna-t-il.
    Chagak se glissa dans l'ikyak en se tenant aussi loin qu'elle le put. Il la saisit par la taille et l'attira brutalement plus près de lui en la serrant entre ses jambes, puis il remonta le panneau les enfermant tous les deux jusqu'à la taille.
    Il poussa ensuite l'ikyak au centre du ruisseau et Chagak sentit la secousse quand le courant les entraîna vers la mer. Elle ne s était jamais aperçue combien l'eau pouvait être près des jambes et être aussi froide.
    Pendant un moment, Homme-Qui-Tue pagaya en silence, puis il se mit à parler, montrant ses armes, son ikyak, la mer, les falaises, en disant tous ces mots dans la langue de Chagak puis il les répétait dans sa propre langue. Très souvent le mot était similaire mais c'était la première fois que Chagak l'entendait.
    Une sorte de sourde colère monta dans la poitrine de Chagak et elle resta silencieuse, refusant de répéter les mots de ce peuple détesté. En aucune façon, elle ne voulait se rapprocher de lui. L'odeur de la sueur de cet homme se mêlant à celle du poisson de son chigadax effaçait la bonne senteur du vent et de la mer.
    — Répète, cria-t-il en la frappant sur le côté de la tête, répète, femme stupide !
    Chagak se raidit dans l'attente d'un nouveau coup, mais il se contenta de pagayer plus vite et dirigea l'ikyak vers le nid de varech qui s'étendait à l'est de la falaise.
    La marée était basse et le varech s'étendait sur les rochers découverts; au-dessus de l'eau on le voyait flotter comme de longues cordes de babiche.
    — Arrache des patelles, dit-il en lui tendant un couteau de femme qu'elle avait vu à l'intérieur de l'ulaq, un couteau qui avait peut-être appartenu à la femme de Shuganan.
    Homme-Qui-Tue conduisit l'ikyak près d'un gros rocher et Chagak se pencha, en utilisant le plat de la lame pour détacher les mollusques des rochers. C'était un dur travail, mais elle y était habituée.
    Homme-Qui-Tue faisait avancer l'ikyak lentement parmi les rochers, contrôlant la profondeur de l'eau avec l'extrémité de son harpon.
    Quand ils étaient entrés dans le marais, les loutres avaient disparu, mais à mesure que l'ikyak avançait lentement, sans faire beaucoup de bruit, elles commencèrent à faire surface, certaines se hasardant à suivre l'ikyak en regardant Chagak travailler, d'autres nageant au milieu du varech. Chagak leur lança quelques arapèdes et d'autres vinrent les rejoindre. Certaines se roulèrent sur le dos et s'exposèrent ventre en l'air, en se laissant balancer par les vagues, les yeux fermés. Des conteurs d'histoires racontaient que les loutres avaient leur propre village sous l'eau.
    Chagak essaya de les regarder sans bouger trop brusquement. Les mères loutres tenaient leurs bébés entre leurs pattes en nageant sur le dos. D'autres jouaient, leurs fines têtes sombres plongeant et réapparaissant au milieu du varech, l'une d'elles apporta des moules du fond de l'eau et posa une pierre sur son ventre pour écraser les coquilles comme le font les pêcheurs.
    Chagak avait prétendu que les loutres étaient ses frères et ses sœurs lorsqu'elle avait eu ses premières règles, faisant

Weitere Kostenlose Bücher