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Ma mère la terre - Mon père le ciel

Ma mère la terre - Mon père le ciel

Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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devrait insister pour que Blanche Rivière travaille moins et se repose davantage?
    Il se dirigea vers les femmes. Leurs bavardages s'arrêtèrent et elles le regardèrent. Il posa la main sur la tête de son épouse et la caressa.
    — Nez Crochu, dit-il, ma femme va avoir beaucoup de nuits sans sommeil avec notre nouveau fils, pourrait-elle être dispensée de ramer aujourd'hui ?
    — Cela ne posera pas de problème, répondit Nez Crochu, mon fils est assez fort pour prendre sa place.
    Kayugh regarda l'enfant et vit un éclair de fierté briller dans ses yeux. Oui, ce serait une bonne manière de préparer Premier Flocon à conduire un ikyak. Il se souvint combien cette tâche lui avait paru ardue la première fois. Pagayer dans un ik de femme serait plus facile que de se trouver dans un ikyak d'homme.
    — Merci, murmura Blanche Rivière.
    Mais quand Kayugh se tourna vers Petit Canard pour voir si elle approuvait sa décision, celle-ci avait la tête baissée sur une botte d'herbe sèche qu'elle nouait.
    Le lendemain, ils partirent tôt le matin et naviguèrent jusqu'au coucher du soleil. Ils s'arrêtèrent, alors, pour passer la nuit sur une plage couverte de rochers gros comme des poings. Les femmes récoltèrent assez de bois mort pour faire du feu, mais il n'y avait pas de proches collines pour offrir un abri.
    Ils se rassemblèrent en un demi-cercle autour du feu, dos au vent, afin d'abriter les flammes. Les femmes sortirent de la viande sèche. Petit Canard éplucha des pousses de bambous verts et fit cuire à la broche des poissons qu'elle avait attrapés durant la journée, puis elle planta des baguettes dans le sable autour du feu.
    L'effort de la journée de voyage avait donné une telle faim à Kayugh qu'il n'attendit pas que le poisson placé devant lui soit complètement cuit, dès que la peau commença à grésiller, il saisit l'une des baguettes plantées dans le sable et se mit à manger.
    Quand il eut mangé la moitié du poisson, il tendit la baguette à Blanche Rivière pour lui en offrir l'autre moitié, mais elle secoua la tête.
    — Il faut manger, lui dit-il.
    — Je vais le faire, dit-elle en essayant de sourire, mais la fatigue se lisait sur son visage et ses yeux étaient cernés de noir, ce qui inquiéta Kayugh.
    Les paroles de Petit Canard lui revinrent en mémoire et, durant le reste de la soirée, il surveilla Blanche Rivière. Il fut soulagé de la voir manger et il remarqua qu'elle riait en écoutant les histoires de Longues Dents. Bien qu'elle marchât lentement, en portant une main à son ventre, elle aida les autres femmes à entretenir le feu et à préparer l'endroit pour dormir.
    Quand il se coucha pour la nuit, Kayugh avait presque oublié ses soucis.
    Tout d'abord le bruit se situa dans les rêves de Kayugh. C'était un cri de mouette, puis le cri d'une femme dans les douleurs de l'enfantement, mais peu à peu il se réveilla et se rendit compte que c'était le cri étouffé d'un bébé.
    Il se redressa et, dans le petit jour, il vit que Petit Canard et Longues Dents avaient également été réveillés par le bruit.
    — C'est ton fils, dit Longues Dents.
    A ces mots, Kayugh ressentit une sorte de vertige. Chez les Premiers Hommes, un bébé ne pleurait pas aussi longtemps que celui-ci l'avait fait. Un bébé restait attaché contre sa mère, au chaud, sous son suk, et il était capable de téter quand il le voulait.
    Petit Canard se glissa hors de sa couche et aux yeux de Kayugh ses mouvements étaient trop lents, chaque pas semblait lui coûter. Mais quand il essaya lui-même de se redresser, il sentit ses bras et ses jambes d'une lourdeur de pierre. Aussi resta-t-il assis, comme si l'enfant qui pleurait n'était pas le sien, comme si la femme que Petit Canard secouait n'était pas la sienne.
    Petit Canard tourna la tête vers lui et quand elle parla ses mots étaient lents, comme s'ils faisaient partie d'un rêve.
    — Elle a saigné, dit-elle, puis elle ajouta plus bas : elle est morte, Kayugh. Un esprit est venu la chercher.
    Kayugh ne put ni bouger ni parler. Longues Dents vint près de lui et soudain tout le camp se réveilla.
    — Viens, dit Longues Dents, et sa voix donna à Kayugh la force dont il avait besoin.
    Il arracha la couverture de ses jambes et se leva.
    — Allons sur la plage, reprit Longues Dents, les femmes vont s'occuper de Blanche Rivière.
    — Elle est morte, dit Kayugh en regardant Longues Dents comme s'il espérait l'entendre

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