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Ma mère la terre - Mon père le ciel

Ma mère la terre - Mon père le ciel

Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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répondre : « Non, elle n'est pas morte, Petit Canard s'est trompée. »
    Mais Longues Dents répéta :
    — Oui, elle est morte. Puis, prenant le bras de Kayugh, il ajouta : viens avec moi, nous allons contrôler les provisions.
    — Où est ma fille ? demanda Kayugh, soudain irrité par l'insensibilité de Longues Dents.
    Nez Crochu lui tendit Baie Rouge. La fillette se frottait les yeux d'un mouvement convulsif parce qu'elle avait été réveillée brusquement. Kayugh serra l'enfant contre lui et se détourna du cercle d'hommes et de femmes qui s'était formé devant lui. Il demanda à Nez Crochu :
    — Donne-moi mon fils.
    Il vit le regard de surprise de Longues Dents et entendit le ricanement d'Oiseau Gris. Nez Crochu hésita et dit :
    — Il pleure.
    — Donne-moi mon fils, répéta Kayugh en posant Baie Rouge pendant que Nez Crochu allait chercher l'enfant.
    Les bras et les jambes du bébé tremblaient de froid et ses cris se transformèrent en gémissements ressemblant à ceux que proféraient parfois les bébés phoques.
    — Il a froid, dit Nez Crochu qui se tourna vers Petit Canard pour lui demander d'apporter une fourrure.
    Quand il fut enveloppé, le bébé cessa de pleurer comme s'il avait seulement besoin de chaleur. Kayugh prit l'enfant d'abord avec quelque maladresse, puis il le plaça dans le creux de son bras avant de se baisser pour prendre Baie Rouge et s'éloigner du cercle de son peuple.
    Kayugh trouva un endroit abrité par des rochers où le sol était sec. Il s'assit et installa
    Baie Rouge sur un de ses genoux en laissant son bras gauche reposer sur sa cuisse. Il regarda ses deux enfants. Baie Rouge s'appuya contre lui en fermant les yeux, mais Amgigh tenait ses yeux grands ouverts comme s'il étudiait le visage de son père.
    Kayugh pouvait pleurer maintenant avec sa fille à moitié endormie et seul son fils pour le voir. Un fils ne pouvait avoir honte de voir pleurer son père sur la mort de sa femme, mais, bien qu'il souhaitât verser des larmes, Kayugh n'y parvint pas. Il continua à regarder son fils et vit combien il était beau, avec ses fins sourcils et ses grands yeux noirs.
    Sa fille aussi était jolie. Elle ressemblait tellement à Blanche Rivière et Kayugh se demanda pourquoi, avec ces deux beaux enfants, l'esprit de Blanche Rivière avait décidé de les quitter. Y avait-il un autre esprit qui fût déjà parmi les Lumières Dansantes qui l'ait enlevée à Kayugh, loin de la terre ? Jambe Rouge aurait-elle fait une chose pareille? Non, au cours de toutes les années où elle avait été l'épouse de Kayugh, Jambe Rouge avait toujours pensé beaucoup plus aux autres qu'à elle-même.
    Peut-être Kayugh n'avait-il pas été un bon mari. Peut-être avait-il trop pensé à lui-même et pas assez à ses femmes. Mais non, il avait aimé ses femmes. Et il était un bon chasseur. Les avait-il laissées sans viande? Sans peau de phoque pour travailler? Sans boyaux pour coudre ?
    Elles avaient eu une bonne vie ensemble. Ses épouses avaient été comme des sœurs, s'occupant l'une de l'autre. Baie Rouge les appelait toutes les deux « maman ».
    Peut-être que ses femmes n'avaient pas choisi de mourir? Peut-être lui avaient-elles été enle-vées parce qu'il n'avait pas assez apprécié ce qu'il possédait.
    Il avait été un chasseur honoré dans un grand village. Ils avaient une belle plage, suffisamment de nourriture et, bien que jeune encore, Kayugh avait deux bonnes épouses, un fils poussant dans le ventre de sa mère, une jolie petite fille bien portante. S'était-il jamais attardé à penser combien la vie s'était montrée bonne pour lui ? Il n'aurait su le dire. Il avait tant de choses à penser, la chasse, réparer son ikyak, faire des voyages pour aller troquer la marchandise.
    Il avait suffi d'une nuit pour bouleverser sa vie. Une vague — un raz de marée —, quelque chose qui n'arrivait qu'une ou deux fois au cours d'une vie, mais qui avait atteint trois fois en cinq ans le peuple de son village.
    Au cours des années précédentes, les pertes n'avaient pas été aussi considérables, mais cette fois seul l'ulaq de Kayugh, celui qui se trouvait à l'endroit le plus élevé, n'avait pas été détruit et beaucoup de gens étaient morts.
    Si Petit Canard n'avait pas parlé d'une autre vague, qui allait arriver l'été suivant, peut-être que Kayugh serait resté avec ceux qui avaient décidé de reconstruire le village, mais il avait pensé à sa fille et au

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