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Ma mère la terre - Mon père le ciel

Ma mère la terre - Mon père le ciel

Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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pas ce qu'elle et Shuganan leur diraient. Et alors, les Petits Hommes viendraient et il y aurait un autre massacre. Chagak réprima un frisson, puis elle se souvint de la sagesse de Shuganan. Il saurait ce qu'il convenait de dire pour être convaincant.
    La voix de la loutre parut revenir pour lui chuchoter que même si les Chasseurs de Baleines croyaient Shuganan, même s'ils combattaient les Petits Hommes et les décimaient, son fils serait en danger.
    « Oui, se dit-elle, s'ils découvrent que mon fils a été engendré par un ennemi, ils tueront l'enfant. » Cette idée la glaça d'horreur et elle comprit qu'elle devait chasser cette mauvaise pensée.
    — Non, dit-elle à haute voix, personne ne le saura. Je ne le dirai pas, Shuganan non plus. L'enfant sera sauvé.
    Comme s'il avait compris ses paroles, le bébé poussa un petit cri et Chagak le sortit de son suk. A la prochaine lunaison, il serait assez grand pour dormir dans un berceau. Pour l'instant elle était heureuse de l'avoir contre elle pour la nuit.
    Elle écarta les couvertures et retira les peaux souillées qu'elle irait rincer dans la mer avant de les mettre à sécher sur la plage. Elles deviendraient raides et dures, mais elle leur rendrait leur souplesse en les étirant avec ses doigts et ses dents afin de pouvoir les utiliser encore.
    Quand elle eut fini de s'occuper du bébé, elle l'enveloppa dans une fourrure propre et le remit sous son suk. Parce que c'était le jour où il allait recevoir son nom, Chagak était supposée rester dans l'ulaq jusqu'à ce que Shuganan ait préparé le feu de bois sur le rivage. Mais depuis qu'il avait été si sévèrement corrigé par Homme-Qui-Tue, le vieil homme se réveillait tard le matin et était lent à se mettre en train. Fatiguée d'attendre dans l'air confiné de l'ulaq, Chagak monta sur le toit. Le matin était gris mais clair et le vent apportait une riche senteur de phoque.
    Mais quel homme avait pu chasser le phoque ? Ce ne pouvait être Shuganan. Chagak regarda vers la mer. Ses yeux s'agrandirent et, posant ses mains autour du bébé, elle descendit pour courir vers la plage.
    Shuganan s'éveilla et se tint immobile, écoutant pour deviner si Chagak était éveillée. Il y avait longtemps que ses bras et ses jambes ne l'avaient fait autant souffrir. Il n'arrivait pas à se lever.
    Pourtant, aujourd'hui devait avoir lieu la cérémonie au cours de laquelle l'enfant recevrait son nom. Il ne pouvait rester couché. Il se redressa lentement. La douleur lui fit venir les larmes aux yeux. Il les essuya d'un revers de main.
    «A quoi suis-je bon? se demanda-t-il. Je n'arrive même plus à me lever. Comment vais-je pouvoir pagayer dans un ikyak? Comment vais-je apporter de la viande pour Chagak et le bébé ? Elle a besoin d'un chasseur. »
    Il appela la jeune femme mais elle ne répondit pas. Il l'appela encore, surpris de ne pas la voir venir. C'était jour de fête. Qu'y avait-il de plus sacré que le jour où un enfant recevait son nom, prenait son identité? Chagak devait rester dans l'ulaq tandis qu'il préparait le feu sur la plage pour la cérémonie.
    Une peur soudaine accéléra son pouls. Il pensait avoir convaincu Chagak de garder son fils, mais peut-être se trompait-il. Qu'arriverait-il si elle avait fait un geste irréparable avant que le bébé n'ait reçu son nom afin de pouvoir réclamer sa place dans le monde des esprits ? La peur de Shuganan se transforma en douleur et il dut appuyer ses deux mains contre sa poitrine pour comprimer les battements de son cœur.
    Mais sûrement, Chagak comprenait l'importance de la vie du bébé dans le plan qu'ils avaient élaboré. Peut-être n'éprouvait-elle pas un besoin de vengeance. Peut-être voulait-elle seulement s'échapper. Elle pourrait le faire plus facilement sans un vieil homme invalide et sans un bébé encombrant.
    Oubliant ses douleurs, Shuganan se redressa dans une position assise et appela encore. Toujours pas de réponse.
    « Elle est sortie vider le seau », pensa-t-il, mais il aperçut le seau dans un coin. Peut-être avait-elle oublié la cérémonie qui devait avoir lieu et était-elle seulement sortie prendre l'air. Mais Shuganan se rendit compte de la folie d'une telle pensée. S'appuyant sur une épaule, et utilisant son bras droit comme levier, il parvint à se soulever.
    Quand il fut debout, la raideur de ses genoux parut être la seule chose qui le retint et il fit quelques pas chancelants.
    « J'aurais dû lui parler

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