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Ma mère la terre - Mon père le ciel

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Titel: Ma mère la terre - Mon père le ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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son seul effort. Il fut le premier à parler et il le fit sans commentaire de politesse sur le temps ou le travail de Chagak.
    — Nous voulons voir ton fils.
    La jeune femme croisa ses bras sur son suk dans un geste de protection.
    — Il dort, dit-elle, bien qu'elle sentît sa bouche sur son sein et ses petites mains pétrir sa poitrine.
    Mais Longues Dents prit la parole comme si Oiseau Gris n'avait rien dit et même comme s'il n'était pas là.
    — Nous avons voyagé pendant de nombreux jours. Nos femmes sont fatiguées. Ton grand-père leur a offert un abri dans son ulaq. Quand elles seront reposées, elles viendront t'aider.
    Sans être vraiment des paroles habituelles de politesse, il y avait au moins de la déférence dans sa voix.
    — Il sera agréable d'avoir de l'aide, répondit-elle.
    — Kayugh a un fils, lui aussi, dit Shuganan.
    — J'en suis heureuse pour toi, répondit Chagak, mais dès qu'elle eut parlé, elle vit le regard de cet homme s'assombrir avec une expression lui rappelant le chagrin qu'elle nourrissait au fond de son cœur depuis l'anéantissement de son peuple. L'enfant est-il malade? demanda-t-elle, oubliant qu'elle ne devait pas parler sans y être invitée.
    Mais Kayugh ne parut pas le remarquer. Il fit un pas en avant en disant :
    — Ma femme est morte après sa naissance et j'ai décidé de garder le bébé avec moi. Mais aucune de nos femmes n'a de lait pour le nourrir.
    Chagak sortit son fils de la chaleur du suk et le tendit à Kayugh pour le lui montrer. L'enfant était nu à l'exception d'une peau tannée passée entre ses jambes. Il remua les bras et les jambes dans l'air froid et se mit à crier.
    — C'est un bel enfant, dit Kayugh.
    — Tous les bébés paraissent beaux et forts à côté de ton fils, ricana Oiseau Gris sans regarder Kayugh.
    — Où est ton fils ? demanda Chagak.
    — Dans l'ulaq, répondit Kayugh, Coquille Bleue, l'épouse d'Oiseau Gris, s'occupe de lui.
    Chagak acquiesça, puis, comme s'il n'y avait personne sur la plage qu'elle et Kayugh, elle souleva son suk et pressa son sein pour en faire jaillir du lait. Ensuite elle remit Samig à sa place et le laissa téter.
    Après avoir réajusté son suk sur son fils elle dit:
    — J'ai assez de lait pour deux. Je vais nourrir ton fils.
    33
    Lorsque Chagak entra dans l'ulaq, il lui sembla que c'était un endroit différent. Les provisions entassées dans les estomacs de phoque étaient amoncelées au pied du tronc d'arbre central. Des fourrures s'empilaient dans les chambres et débordaient dans la pièce principale.
    Mais, bien qu'elle se fût attendue à entendre le bourdonnement des voix de femmes, celles-ci étaient silencieuses. Pendant un moment elle se tint immobile, regardant autour d'elle ces femmes, qui la dévisageaient.
    Elles étaient assises au centre de l'ulaq, se tournant le dos, le visage levé vers les étagères où étaient exposées les sculptures de Shuganan. Une des femmes, ayant un gros nez crochu, tenait la fillette sur ses genoux. Le petit garçon était assis à côté d'elle. Une autre femme au visage rond et plein était assise et regardait le sol, ses cheveux sombres tirés en arrière et nattés, mais ce fut la femme la plus petite qui retint l'attention de Chagak. Son suk était gonflé.
    « Coquille Bleue, la femme d'Oiseau Gris », pensa-t-elle, et en même temps elle entendit la voix de la loutre lui murmurer : « Que cette femme est jolie ! »
    Oui, pensa Chagak, tout le monde aurait plaisir à regarder le petit nez fin, les lèvres pleines et les grands yeux de Coquille Bleue. Involontairement elle toucha son propre visage et se demanda si quelqu'un aurait du plaisir à le regarder.
    Tout d'abord, elle n'eut pas envie de parler. Elle aurait voulu aller directement dans sa chambre en tirant le rideau entre elle et ces femmes. Mais elle avait dit à Kayugh qu'elle s'occuperait de son fils et, maintenant que les hommes surveillaient les feux, elle pouvait le faire.
    Finalement, elle déclara :
    — Les sculptures de Shuganan ne contiennent pas de mauvais esprits. Il ne faut pas en avoir peur et vous serez bientôt habituées à leurs regards.
    Ce fut comme si ces paroles rendaient la vie à ces femmes. Celle qui avait un gros nez parla aux autres et bientôt toutes les trois se mirent à dérouler leurs matelas d'herbe et à sortir leurs provisions. Cette femme semblait diriger tout le monde. Chagak s'approcha d'elle et lui montra où se trouvait la réserve des

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