Marcel Tessier racontre notre histoire
commerce des fourrures. La plus importante d’entre elles, la Compagnie des Cent-Associés, cède une partie de son territoire à la Communauté des Habitants en 1645. Pour la première fois, les habitants de la colonie peuvent alors participer à l’enrichissement de la colonie. On dit en effet qu’à partir de cette date, environ 80% des profits demeurent dans la colonie. Après 1665, la Compagnie des Indes occidentales prend le contrôle de l’exportation. En 1739, 20 ans avant la Conquête, la fourrure représente encore 70% de toutes les exportations. La marchandise déchargée sur le quai d’un port de France est vendue à des artisans venus de partout. Ils transforment les peaux en chapeaux ou en vêtements.
18 MÉDARD CHOUART DES GROSEILLIERS ET PIERRE-ESPRIT RADISSON
M édard Chouart des Groseilliers arrive à Québec en 1637. Il n’est âgé que de 16 ans. Il accompagne les Jésuites. Son beau-frère, Pierre-Esprit Radisson, né en France, arrive aux Trois-Rivières avec ses parents en 1651. L’année suivante, il tombe entre les mains des Agniers et, pendant plusieurs mois, partage leur existence en tant que prisonnier. Grâce à son intelligence et à sa force de caractère, il réussit à déjouer ses geôliers et à rejoindre les Trois-Rivières deux ans plus tard. Après avoir accompagné les pères Ragueneau et Duperron comme interprète chez les Onontagués, il retrouve son beau-frère des Groseilliers. Les deux hommes s’associent et partent en exploration.
En 1659, ils explorent le Wisconsin, débouchent dans le Mississippi et reviennent, au printemps 1660, avec une énorme cargaison de fourrures. L’année suivante, ils repartent de Trois-Rivières, mais vers le nord cette fois, jusqu’à la baie d’Hudson. Durant ce voyage exténuant, toutes sortes d’aventures vont mettre leur vie en danger. Ils seront les premiers Blancs à traverser la baie James puis, plus tard, le lac Supérieur, le pays des Cris, le Manitoba, l’ouest de la rivière Rouge.
AU SERVICE DE L’ANGLETERRE…
Au printemps 1663, chargés d’une cargaison de fourrures d’une grande richesse, ils reviennent aux Trois-Rivières. Mais le gouverneur d’Avaugour, invoquant pour motif qu’ils étaient partis faire le commerce sans sa permission et sans permis, confisque leur cargaison. Les deux explorateurs réclament leurs droits auprès des autorités françaises. En vain. Frustrés, ils passent alors au service de l’Angleterre.
À Boston, ils rencontrent des représentants de Charles II qui les emmènent en Angleterre où ils informent le roi de la richesse énorme que recèle en fourrures l’immense territoire de la baie d’Hudson. Sous leur inspiration, on fonde la célèbre compagnie de ce nom. Le roi paie de sa bourse l’entretien des deux hommes à Windsor. Leurs voyages de 1668 à 1670 dans ces vastes régions auront un retentissement énorme non seulement en Angleterre, mais aussi en France. À Québec, ils feront parler d’eux dans les journaux. Même mère Marie de l’Incarnation fait état de la chose dans sa correspondance.
… ET DE LA FRANCE!
À partir de 1670, les deux beaux-frères établissent des postes stratégiques à la baie d’Hudson. Les Anglais refusent de leur verser le traitement promis. Mais les deux compères ont une grande faculté d’adaptation… En 1674, ils passent donc en France offrir leurs services à Colbert.
Par la suite, Radisson convole. C’est son troisième mariage. Il épouse la fille de Sir John Kirke, l’un des frères ayant pris Québec en 1629 et devenu depuis un personnage important dans la Compagnie de la Baie d’Hudson. Chouart des Groseilliers est fait Chevalier de la Jarretière. Revenu au Canada, il meurt près de Sorel. Sa femme, qui lui aura donné deux enfants, est la fille d’Abraham Martin dont les terres verront la capitulation de Québec près d’un siècle plus tard, et en resteront tristement célèbres.
Radisson continue ses voyages, se dispute avec La Barre, le nouveau gouverneur, puis repasse au service de l’Angleterre. Témoin de la peste et du grand incendie de Londres, il assiste aussi au couronnement de Jacques II. Il est tantôt Français et catholique, tantôt Anglais et sans doute protestant. Il meurt pauvre, à Londres. La Compagnie de la Baie d’Hudson remet une modeste somme à sa femme, sans doute pour payer ses obsèques. La date exacte de sa mort (entre le 17 juin et le 2 juillet 1710) et le lieu de sa sépulture
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