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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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certains pouvaient avoir pris ombrage de
ma remarque, jusqu’à me haïr mortellement.
    Je promenai mon regard sur les toits en pagode des
nombreux édifices du palais, comme si je cherchais à trouver dans le jaune de
leurs tuiles le nom de celui qui m’avait si mystérieusement accosté, lorsque je
vis un vaste nuage de fumée monter brusquement du bâtiment principal. Il était
beaucoup trop dense pour provenir d’un brasero ou du four d’une cuisine, et
trop soudain pour émaner de l’incendie d’une pièce. Cet épais nuage noir, qui
semblait bouillonner en enflant, paraissait contenir des débris du bâtiment et
du toit. Une fraction de seconde plus tard, le son de l’explosion me parvint
tel un coup de tonnerre, assez puissant pour me faire dresser les cheveux sur
la tête et soulever les pans de mon vêtement. Je vis tous les occupants de la
colline se retourner en même temps que moi, et, l’instant d’après, tout le
monde courait vers le bas de la pente pour se rapprocher du sinistre.
    Je n’eus pas besoin de m’avancer beaucoup pour
comprendre que l’explosion s’était produite dans mes appartements. Le salon de
ma suite s’était désintégré, murs et toit pulvérisés. Il était à présent à ciel
ouvert et à la vue de la foule qui s’amassait. Tout ce qui, à l’intérieur,
n’avait pas été détruit par l’explosion brûlait. Le nuage noir de la
déflagration initiale, intact, se tordait dans les convulsions de sa lente
expansion et commençait à s’étendre sur la ville, mais la densité des fumées de
l’incendie était telle qu’elle maintenait les spectateurs à distance. Seul un
petit nombre d’esclaves du palais entraient et sortaient précipitamment de la
zone enfumée, transportant des seaux d’eau et les jetant sur les restes
incandescents. L’un d’eux, m’ayant reconnu, lâcha le sien dès qu’il me vit et
s’approcha de moi en courant d’un pas plutôt chancelant. Il était si noir de
fumée et ses vêtements si roussis que je mis un moment à identifier Narine.
    — Oh, mon maître, n’approchez surtout pas !
Ce qui s’est produit est terrible !
    — Que s’est-il passé ? demandai-je. Mais je
ne l’avais déjà que trop deviné.
    — Ça, je n’en ai aucune idée, maître. J’étais
endormi dans mon réduit quand soudain... bismillah ! je me suis
réveillé pataugeant dans l’herbe du jardin, les vêtements en flammes, au milieu
d’un déluge de débris de mobilier qui retombaient autour de moi.
    — Les filles ! hurlai-je d’une voix
pressante. Qu’est-il arrivé aux filles ?
    — Mashallah, maître,
elles sont mortes, et de la plus horrible façon. Si ce n’est pas là l’œuvre
d’un djinn vengeur, ce devait être l’attaque d’un dragon crachant le
feu.
    — J’en doute, hélas..., fis-je d’une voix
misérable.
    — Alors ce doit être un oiseau rukh, qui
les a déchiquetées du bec et des serres, car les filles ne sont pas seulement
mortes... leurs corps n’existent plus ! Elles ne sont plus qu’une bouillie
éclaboussée sur ce qui reste de murs. Jumelles elles étaient dans la vie,
jumelées elles sont parties dans la mort. Elles demeureront désormais
inséparables, car nul ne peut identifier à qui a appartenu tel ou tel de leurs
restes.
    — Bruto barabào, haletai-je,
consterné. Mais ceci n’est l’œuvre d’aucun rukh, djinn ou dragon,
hélas... C’est bel et bien moi qui en suis le responsable.
    — Et dire, maître, que vous m’avez un jour assuré
que jamais vous ne pourriez tuer une femme.
    — Cruel esclave ! criai-je. Cela n’avait
rien de délibéré !
    — Allez... Une erreur de jeunesse, ça arrive.
Nous pouvons en attendant nous réjouir qu’elles n’aient pas eu d’animal de
compagnie avec elles, chien, chat ou singe : la pauvre bête aurait été
indissolublement mélangée avec elles dans l’au-delà.
    J’avalai péniblement ma salive. Que ce fut ma faute ou
la volonté de Dieu, la disparition de ces deux jolies jeunes femmes constituait
une terrible perte. Mais je fus obligé d’admettre que, pour moi, elles étaient
déjà perdues, à tout prendre. L’une d’elles, les deux peut-être, m’avaient
trahi auprès de l’hostile Ahmad, et la pensée m’avait effleuré que Buyantu
pouvait être l’imprécatrice du Pavillon de l’Écho. Il était clair, à présent,
que ce n’avait pu être elle. Je sursautai lorsqu’une autre voix résonna dans
mon

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