Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
Vom Netzwerk:
que vous le croyiez ou
pas, ce papier m’a occupé tout l’après-midi et m’a tenu actif jusqu’à cette
heure tardive de la soirée. C’est que, comprenez-vous, il s’agissait de la
troisième directive relative au « diamant rouge », et, il faut bien
l’admettre, ce dernier est devenu difficile à trouver dans la masse confuse
comprise entre les deux moignons des cuisses... Il a en effet, vous le
saisissez aisément, déjà bénéficié par deux fois de mes délicates attentions.
C’est pourquoi il requiert toute mon adresse et ma concentration...
    Lorsque je réussis à l’interrompre, je lui demandai
avec rudesse :
    — Vous m’avez dit que c’était Mar-Janah et
qu’elle était encore vivante. Cette chose n’est pas elle ! Et l’on ne peut
concevoir qu’elle soit encore en vie.
    — Si, c’est bien elle. Et si, elle est encore
vivante. J’ajouterai même qu’elle sera probablement capable de se maintenir
encore en vie quelque temps, à condition qu’elle bénéficie du traitement
approprié et de l’attention voulue... si quelqu’un est assez cruel pour le
décider. Approchez-vous donc, seigneur Marco, et voyez par vous-même.
    C’est ce que je fis. La chose était en vie, hélas...,
et il s’agissait bien de Mar-Janah. Au sommet de ce qui avait été son corps, là
où s’était tenue sa tête, pendait de ce qui semblait être la peau scalpée de
son crâne une longue natte de cheveux pas encore déracinée, des cheveux de
femme, et l’on distinguait encore la couleur brun rouge et les boucles... des
cheveux de Mar-Janah.
    La chose émit un bruit. Elle ne pouvait plus me voir,
mais elle avait dû m’entendre à travers ce qui restait de son oreille, et
peut-être même identifier ma voix. Le bruit qu’elle produisit n’était qu’un
gargouillis de sanglot liquide, mais il sembla dire :
« Marco ? »
    D’une voix contenue (je ne me serais jamais cru capable
d’une chose pareille), je fis remarquer au Caresseur, sur le ton de la
conversation :
    — Vous m’avez déjà décrit avec de charmants
détails, maître Ping, la Mort des Mille, qui me semble bien être ce que nous
voyons là. Mais... vous l’avez appelée tout à l’heure d’un nom légèrement
différent. Quelle est la nuance ?
    — Oh, elle est infime. Vous ne pouvez déceler à
l’œil nu ce qui la caractérise. La Mort des Mille consiste, vous le savez, à
mutiler graduellement le corps du sujet par l’ablation progressive de ses
diverses parties, lesquelles ont été découpées en morceaux ou en tranches, ou
localisées à la sonde et lentement arrachées... Le tout est interrompu par des
intervalles de repos durant lesquels le sujet est nourri et désaltéré. La Mort
des Mille améliorée ne diffère que par un détail : on ne donne à manger au
sujet que des morceaux de son propre corps. Comme boisson, on ne lui sert
que... qu’est-ce que vous faites ?
    J’avais sorti mon couteau de ceinture et le plongeai
dans la scintillante pulpe rouge que je croyais être les restes de la poitrine
de Mar-Janah, y ajoutant l’ultime pression qu’il fallait pour être certain que
les trois lames s’enfonceraient au plus profond. Je ne pus qu’espérer que la
chose était dorénavant plus morte qu’auparavant, car elle sembla s’affaisser
mollement et ne produisit plus aucun bruit. À cet instant, je me souvins avoir
affirmé au mari de Mar-Janah, il y avait bien longtemps, que jamais je ne
pourrais sciemment donner la mort à une femme. Il m’avait alors simplement répondu,
sans insister : « Vous êtes encore jeune. »
    Maître Ping grinçait silencieusement des dents tout en
dardant vers moi un regard furieux. J’étendis très calmement le bras et tirai
le torchon de soie avec lequel il s’était essuyé les mains. Je l’utilisai pour
nettoyer mon couteau et le lui jetai rudement avant de refermer mon arme et de
la réintégrer dans mon étui de ceinture.
    Il eut un reniflement de haine et lâcha :
    — Monstrueux gâchis des dernières touches qui
restaient à venir. Quand je pense que j’allais vous accorder le privilège d’y
assister... Quel sabotage !
    Son mépris se fondit dans un sourire moqueur.
    — Cependant, dirais-je, c’est là une impulsion
bien compréhensible de la part d’un mécréant comme vous. Et puis vous aviez,
après tout, payé pour elle.
    — Tout le monde n’a pas fini de payer pour elle,
maître Ping, fis-je en le bousculant avant de

Weitere Kostenlose Bücher