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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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ma gratitude. (Je lui indiquai l’argent répandu sur
la table.) Ceci peut-il suffire à récompenser votre mansuétude ?
    — Hum, grogna-t-il sans se compromettre.
    Mais il se mit prestement à attraper les pièces d’or
posées sur la table, l’air de ne pas y toucher. Pour la première fois, je
remarquai qu’il avait des ongles aussi longs que des serres.
    — J’ai cru comprendre que la femme avait été
condamnée à la Mort des Mille..., dis-je, anxieux.
    Dédaignant la monnaie de papier, il rafla les pièces
et les déversa dans sa bourse de ceinture, avant de répondre
laconiquement :
    — Non.
    — Non ? fis-je en écho, plein d’espoir.
    — Le mandat requérait la Mort des Mille améliorée.
    Après un bref instant de stupéfaction, je redoutai
d’obtenir les éclaircissements voulus sur ce terme. Je demandai donc
simplement :
    — Bien, quoi qu’il en soit, elle peut bien être
un moment suspendue ? Le temps que j’obtienne du khakhan un mandat de
révocation de la sentence ?
    — C’est possible, certes..., fit-il avec un
empressement suspect. Si vous le désirez vraiment... Souvenez-vous, seigneur
Marco... c’est bien votre nom, n’est-ce pas ? Je suis un homme honnête
dans mes transactions. Je ne vends pas d’article sans que le client l’ait vu.
Vous feriez mieux d’examiner d’abord ce que vous achetez. Je vous rétrocéderai
votre... témoignage de gratitude... si d’aventure vous changez d’avis.
    Il se retourna, parcourut la pièce d’un pas sautillant
jusqu’à la porte blindée et me la tint ouverte afin que je le suive jusqu’à la
chambre de torture, où... mon Dieu, je n’aurais pas dû.
    Dans ma hâte à venir en aide à Mar-Janah, j’avais
négligé de considérer certains détails. Cette jolie femme avait dû inspirer au
Caresseur ses tortures les plus raffinées, qu’il avait dû lui administrer avec
une cruauté retenue, en les étirant dans le temps pour en jouir. Pire que cela.
L’ordre d’exécution devait mentionner qu’elle était l’épouse d’un certain Ali
Baba, et le Caresseur avait dû n’avoir aucun mal à faire le rapprochement avec
l’esclave déjà venu visiter en une occasion son atelier, qui l’avait si
terriblement dégoûté. (Je le revis, les yeux révulsés, s’exclamant en le
découvrant : «  Qui... Quelle est donc cette... chose ? ») Et Ping n’avait pas manqué de se souvenir qu’il s’agissait de mon esclave ;
or n’avais-je pas été l’un de ses visiteurs les plus odieux lorsque, en parlant
farsi sans savoir qu’il comprenait la langue, je l’avais qualifié de
« dégénéré qui jouissait du supplice des autres » ? Comment
s’étonner qu’il ait consacré à cette victime ses attentions les plus dévouées,
cette femme mariée à l’infect esclave de Marco Polo, l’individu qui avait un
jour osé l’insulter aussi grossièrement ? Et voici qu’à présent ce même
Marco Polo était ici à le supplier, plaidant et s’humiliant de la façon la plus
abjecte... Le Caresseur n’était donc pas seulement désireux de me montrer le
travail qu’il avait amoureusement réalisé de ses mains ; il en était
diaboliquement fier et jouissait par avance du plaisir de me faire découvrir ce
qui résultait, pour une grande part, de mon impertinence.
    Dans cette chambre de torture dont la torche éclairait
faiblement les murs de pierre, éclaboussée de sang et imprégnée d’une odeur
repoussante, maître Ping et moi étions debout côte à côte, les yeux fixés sur
l’objet dressé au centre de la pièce, rouge et brillant, dégoulinant et encore
environné d’une légère vapeur. Plus exactement, je le regardais tandis qu’il me
dévisageait à la dérobée, jubilant dans l’attente d’un commentaire de ma part.
Mais j’attendis et ne dis rien. Je n’aurais pas pu, de toute façon, occupé que
j’étais à ravaler ma salive, déterminé à ne pas lui laisser voir mes
haut-le-cœur ou à vomir devant lui. Aussi, probablement pour m’aiguillonner,
commença-t-il à me décrire de la façon la plus pédante la scène qui s’étalait
devant nous :
    — Vous vous rendez compte, je présume, que la
Caresse que nous voyons ici a débuté depuis un certain temps déjà. Observez le
panier : voyez comme il reste peu de petits papiers non tirés, et par
conséquent non encore dépliés. Il n’en reste plus que quatre-vingt-sept,
puisque j’ai tiré aujourd’hui le neuf cent treizième. Et

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