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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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eut le don de mettre Kubilaï dans une telle rage qu’il choisit
finalement de nommer au poste de ministre des Finances l’une de mes plus
anciennes connaissances, le vénérable Mathématicien de la Cour Lin-ngan.
Kubilaï alla même plus loin dans la voie de sa nouvelle détestation des
musulmans ; il édicta des lois restreignant de manière drastique leur
liberté individuelle sur le territoire de Kithai, limita le champ de leurs
activités mercantiles et leur interdit définitivement la pratique de l’usure,
dont ils avaient jusque-là bénéficié, diminuant les profits exorbitants qu’ils
engrangeaient. Il contraignit tous les musulmans à renier publiquement la
partie de leur saint Coran qui les autorisait à duper, à escroquer, voire à
tuer tous ceux qui ne croyaient pas en l’islam. Il alla jusqu’à instaurer une
loi les obligeant à manger du porc, s’il leur était servi par un hôte ou
un tenancier d’auberge. Je pense que cette loi ne fut jamais vraiment appliquée
et qu’on ne chercha pas non plus à la faire respecter avec rigueur. Je sais
aussi que ces décisions contribuèrent à envenimer considérablement les
relations entre le khanat et la plupart des riches et puissants musulmans qui
résidaient à Khanbalik. Je l’avais appris en surprenant plus d’une fois sur
leurs lèvres de sourdes imprécations, dirigées non pas à l’encontre de Kubilaï,
mais de ces « infidèles de Polo » qu’ils accusaient d’avoir incité le
khakhan à les persécuter.
    Depuis mon retour du Yunnan à Khanbalik, je ne
trouvais plus guère d’attrait à la capitale, devenue pour moi aussi
inhospitalière que déplaisante. Le khakhan, fort occupé à nommer les nouveaux wang, préfets et magistrats de la province récemment acquise de Manzi, n’avait
pas de nouvelle tâche à me confier, et, de son côté, la Compagnie Polo n’avait
pas besoin de mes services. La nomination de Lin-ngan au poste de ministre des
Finances n’avait nullement modifié les affaires de mon père. Au contraire, la
suppression d’un certain nombre des activités commerciales des musulmans avait
entraîné une augmentation proportionnelle des siennes, mais il était
parfaitement à même de s’en charger seul. Il était également en train de
reprendre en main les rênes que Matteo avait tenues jusqu’alors et formait de
nouveaux contremaîtres pour fabriquer les kashi dont s’étaient si bien
occupés Mar-Janah et Ali. Je me trouvais donc assez désœuvré, et il m’apparut
salutaire de quitter pour un temps la cité de Khanbalik, ne serait-ce que pour
laisser s’éteindre certains troubles et griefs qui couvaient encore, telles des
cendres incandescentes. J’allai à la rencontre du khakhan pour lui demander
s’il aurait une mission quelconque à me confier à l’extérieur. Ayant un temps
réfléchi à la question, il me répondit avec un fond de malice :
    — Oui, j’en ai une, et je te remercie de t’être
porté volontaire. Désormais, l’empire Song est devenu la province de Manzi qui
fait partie intégrante de notre khanat. Cependant, elle ne lui paie pas encore
de tribut. S’il avait été là, l’ancien ministre des Finances n’aurait pas tardé
à mettre sur la région le grappin de son ortaq. Mais étant donné qu’il
ne l’a pas fait et que tu y es pour quelque chose, je pense qu’il n’est que
justice que tu t’en charges à sa place. Tu vas donc te rendre à Hangzhou,
capitale de la province de Manzi, et tu inaugureras là-bas quelque nouveau
système de perception de taxes qui puisse alimenter comme il convient notre
trésor impérial, sans trop fâcher toutefois les populations locales.
    Je n’en demandais pas tant, cela va sans dire, et je
me serais volontiers passé d’une telle charge.
    — Sire, c’est que je ne connais rien à la
taxation...
    — Eh bien, dans ce cas, tu l’appelleras
autrement. L’ancien ministre des Finances l’avait baptisée, je crois, du nom de
« tarification des transactions commerciales ». Tu pourras la nommer
« impôt », ou « levée », ou encore « involontaire
contribution de bienveillance », si tu veux. Je ne vais pas te demander,
rassure-toi, de vider ces sujets nouvellement annexés jusqu’à la dernière goutte
de leur sang. Mais j’attends de chaque ménage, dans toutes les régions de la
province de Manzi, qu’il me verse un tribut d’un montant respectable.
    — Combien de contribuables cela représente-t-il
au total,

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