Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
Vom Netzwerk:
couleur initiale. Mais la
corne unique n’avait jamais été dorée. En fait, comme je pus le constater une
fois que les hommes l’eurent sciée de la tête en forme de casque de l’animal,
elle n’était pas vraiment constituée de corne, ni d’ivoire, comme l’était une défense.
Cela avait plutôt l’air d’une solidification de longs poils étroitement
assemblés, collés en une lourde boule terminée en pointe. Mais les Mien, encore
tout excités de leur bonne fortune, m’assurèrent qu’il s’agissait bien de la
fameuse « corne de licorne » utilisée pour stimuler la virilité et
qu’ils allaient en tirer un prix considérable... qu’ils convertiraient,
pensais-je, en une ample provision de noix d’aréquier.
    Le chef du village prit possession de la précieuse
corne, et les autres commencèrent à dépecer l’animal de sa pesante cuirasse, à
en couper la carcasse et en porter les parts fumantes au village. L’un des
hommes tendit à chacun d’entre nous un morceau de cette viande directement
sortie du four, pour ainsi dire, et nous la trouvâmes tous goûteuse, bien qu’un
peu filandreuse. Nous envisagions de partager le repas du soir des Mien
lorsque, revenus au village, nous découvrîmes que tous les morceaux de la
viande de licorne avaient été trempés dans la puante sauce nuoc-mâm. Nous
déclinâmes donc l’honneur de nous joindre à eux et mangeâmes à la place du
poisson que nos pilotes avaient péché dans la rivière.
    Bien que le peuple Mien se déclarât bouddhiste, le
seul comportement vaguement religieux que nous observâmes chez eux fut leur
inquiétude panique et pleurnicharde au sujet des démons nat des
environs. Les Mien appelaient leurs enfants, quel que soit leur prénom,
« Petit Ver » ou « Cochon » pour que les nat les
dédaignent. Bien qu’il y ait partout de l’huile à portée de main (de poisson,
de sésame, et même du naphte qui affleurait du sol de la jungle en plusieurs
endroits), les Mien ne graissaient jamais les harnais de leurs éléphants, ni
les roues de leurs chariots ou de leurs brouettes. Le grincement,
prétendaient-ils, éloignait les nat. Dans un village, je remarquai que
les femmes devaient transporter l’eau depuis une source éloignée et leur
suggérai de bâtir un conduit à l’aide de longues cannes de bambou fendues afin
d’apporter l’eau directement jusqu’au village. « Amè ! » crièrent
les villageois ; cela allait attirer le nat résident de l’eau, le
«  nat aquatique », bien trop dangereux pour côtoyer les
habitations. La première fois que les Mien virent Hui-sheng allumer son
encensoir dans notre campement, à l’heure du coucher, ils murmurèrent « amè ! » et envoyèrent Yissun nous avertir qu’ils n’employaient jamais d’encens ni
de parfums (comme s’ils avaient besoin de nous l’apprendre) car les odeurs
agréables étaient susceptibles d’attirer les nat.
    Au fur et à mesure de notre descente sur le fleuve,
alors que nous arrivions dans des régions plus peuplées, nous trouvâmes dans
nombre de villages un temple de briques en terre cuite appelé phra. Il
était circulaire, en forme de cloche à main retournée, sa bouche posée sur le
sol et son manche effilé montant vers le ciel tel un clocher. Dans chaque phra vivait un lama bouddhiste, ici appelé pongyi. Il avait le crâne rasé
et une robe jaune, désapprouvait la vie terrestre en général et le comportement
de ses congénères Mien en particulier, et attendait dans une impatience morose
de quitter Ava pour atteindre le nirvana. Pourtant, j’en rencontrai un assez
convivial pour engager la conversation avec Yissun et moi. Ce pongyi se
trouva être tellement instruit qu’il savait même écrire et me montra à quoi
ressemblait l’écriture mien. Il ne put rien ajouter à l’histoire que j’avais
entendue à propos des archives de son peuple qui avaient fini dans leurs
estomacs, mais il savait que cette écriture avait disparu d’Ava il y avait
moins de deux siècles, lorsque la nation du roi Kyanzittha, qui régnait alors,
avait inventé un alphabet.
    — Le bon roi, qui était attentionné,
déclara-t-il, veilla à ce qu’aucun caractère ne contienne d’angles. Il dessina
du doigt les lettres sur le sol poussiéreux de son phra. Notre peuple n’a
de support pour écrire que des feuilles, et pas d’autre instrument que des
bâtons pour y gratter nos caractères ; des formes angulaires pourraient
les

Weitere Kostenlose Bücher