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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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Tout au plus pouvait-on se
réjouir de ne pas avoir contracté une autre affection de la jungle dont
j’entendis parler. Nombre de Mien nous confièrent d’un ton plaintif qu’ils en
souffraient et en souffriraient hélas toujours. Ils l’appelaient koro et
décrivaient ainsi ses terribles effets : un rétrécissement soudain,
dramatique et irréversible de l’organe viril, lequel se rétractait jusque dans
l’intérieur du corps. Je ne demandai pas de détails supplémentaires, mais je ne
pus m’empêcher de me demander si ce koro de la jungle avait un rapport
avec le kala-azar transmis par une piqûre de mouche qui avait entraîné
la pathétique dissolution de mon oncle Matteo.
    Pendant un certain temps, Yissun, Hui-sheng, sa
servante et moi-même nous occupâmes à tour de rôle de nos deux malades. Nous
avions cru observer que les fièvres de la jungle ne s’attaquaient qu’aux
hommes, mais Yissun et moi étions peu enclins à nous inquiéter de notre sort. Toutefois,
lorsque la servante se mit elle-même à être atteinte des premiers symptômes du
mal, je déchargeai Hui-sheng de sa veille et la confinai à l’extrémité de la
barge, l’obligeant à dormir à l’écart. Aucun de nos efforts ne put améliorer la
condition des deux hommes. Ils étaient encore faibles et souffrants lorsque
nous atteignîmes enfin Pagan, et nous dûmes les transporter à terre pour les
confier aux bons soins des chamans médecins de leur armée. Je n’ai jamais su ce
qu’il était advenu d’eux, mais ils avaient au moins survécu jusque-là. Ce ne
fut pas le cas de la servante de Hui-sheng.
    Son affection avait semblé au départ la même que celle
des deux hommes, mais elle s’en était tout de suite plainte et en avait
souffert davantage. Je suppose qu’étant une femme elle fut naturellement plus
effrayée et démoralisée de se mettre à pourrir des extrémités, sous les bras et
entre les jambes. Mais elle se plaignit aussi, ce que les hommes n’avaient pas
fait, de douleurs sur toute la surface de son corps. Cela venait même de l’intérieur, affirmait-elle, ce que nous prîmes pour du délire. Mais Yissun et moi la
déshabillâmes avec précaution et trouvâmes, çà et là, ce qui ressemblait fort à
des grains de riz piqués sur sa peau. Lorsque nous essayâmes de les enlever, nous
découvrîmes que ce n’était que l’extrémité protubérante (tête ou queue, nous
n’aurions su le dire) de longs et minces vers qui avaient creusé profond dans
ses chairs. Nous tirâmes dessus par saccades, et ils s’extirpèrent à
contrecœur, continuant de sortir, empan par empan, comme si nous avions extrait
tout le fil issu des glandes séricigènes d’une araignée.
    La pauvre femme gémit, hurla et se tordit faiblement
durant la majeure partie de l’opération. Chaque ver n’était pas plus épais
qu’une ficelle, mais d’une longueur excédant parfois celle de ma jambe. Ils
étaient d’un blanc grisâtre, difficiles à attraper, résistants à la traction et
fort nombreux, au point que même le Mongol endurci qu’était Yissun 
et  moi-même  ne  pouvions  nous empêcher d’éprouver de
violents haut-le-coeur tandis que nous tirions les vers de leurs trous, puis
les jetions par-dessus bord. Quand nous eûmes fini, la femme ne se tortillait
plus, mais elle était étendue immobile, et morte. Peut-être les vers
s’étaient-ils enroulés autour de ses organes et, en les retirant, en
avions-nous trop gravement dérangé l’ordonnancement pour qu’elle survive. Mais
j’incline à croire qu’elle mourut plutôt de l’horreur de cette expérience.
Toujours est-il que, pour lui éviter des tourments supplémentaires (ce que nous
avions ouï dire des pratiques funéraires des Mien étant assez barbare), nous
nous dirigeâmes à coups de rames vers la rive et l’y enterrâmes profondément, à
l’abri de l’atteinte des gavials ou de tout autre prédateur de la jungle.

 
33
    Je fus heureux de revoir le vieux Bayan. Je fus même
heureux de revoir ses dents. Le blanc pur de la porcelaine et l’or étaient à
tout prendre moins insupportables que les dents noircies des Mien que j’avais
vues tout au long de ma descente de l’Irrawaddy. Bayan était un peu plus âgé
que mon père, il avait perdu quelques cheveux et pris un peu de poids depuis
notre campagne, mais il était toujours souple comme le cuir de sa bonne vieille
armure. Il était également, pour l’instant, légèrement

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