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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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achevés par des appendices palmés. Plus étonnant encore, il avait sur la
poitrine ce qui ressemblait à s’y méprendre à deux énormes seins (assez
semblables à ceux de Tofaa), et sa tête rappelait vaguement celle d’une vache
fort laide.
    — Grands dieux, quel est le nom de cet
animal ? demandai-je. S’il n’était pas aussi épouvantablement hideux, je
croirais presque à une sirène.
    — Rien qu’un poisson, fit Tofaa. Nous l’appelons dugong.
    — Pourquoi tant d’agitation autour d’un poisson ?
    — Certains de ceux qui sont rassemblés là sont
les marins qui l’ont harponné et apporté jusqu’ici. Les autres sont des
marchands de poisson qui attendent de pouvoir en acheter des parts à revendre.
Le seul à être bien habillé est le magistrat du village. Il est en train de
leur faire signer des déclarations sous serment.
    — Pourquoi diable ?
    — Cela arrive chaque fois qu’on en attrape un.
Avant que le dugong puisse être débité en quartiers et mis en vente, les
pêcheurs doivent jurer qu’aucun d’entre eux n’a commis la surata avec
lui pendant qu’on le ramenait au rivage.
    — Vous voulez parler d’une... copulation ?
Avec un poisson ?
    — Ils le font toujours, bien qu’ils jurent le
contraire. Elle haussa les épaules et sourit avec indulgence.
    — Ah, vous autres...
    J’aurais par la suite bien d’autres occasions de
pester (et de me repentir) d’appartenir au même sexe que ces mâles hindous,
mais c’était la première fois. Je décrivis un large cercle autour du dugong et
des hommes, et remontai la principale artère de Cuddalore. Toutes les replètes
villageoises portaient le sari enroulé qui couvrait juste ce qu’il fallait de
leur crasse corporelle, mais laissait entrevoir les bourrelets de leur ventre.
Les hommes, maigrelets, ayant moins à exposer, le faisaient davantage,
n’arborant rien d’autre qu’un turban arrangé un peu n’importe comment et une
large pièce de tissu drapée autour des reins, le dhotì. Les enfants,
eux, ne portaient que la tache de peinture de leur front.
    — Y aurait-il un caravansérail ? m’enquis-je
auprès de Tofaa. Peu importe le nom que vous lui donnez, mais un endroit où
loger le temps de préparer notre voyage ?
    — Dak bangla, indiqua-t-elle.
La maison de repos du voyageur. Je vais demander.
    Elle se dirigea d’autorité vers un passant, lui saisit
le bras et lui cracha sèchement une question au visage. Contrairement à ce
qu’aurait fait un homme dans n’importe quel autre pays, il ne prit pas ombrage
d’avoir été aussi impudemment abordé par une femme. Au lieu de cela, il recula
et répondit très humblement. Tofaa sembla impérieusement l’accuser de quelque
chose, à quoi il répliqua d’une voix encore plus faible. La conversation
s’enchaîna ainsi de questions en réponses, elle grondant, lui larmoyant, à
présent. Je les regardais, stupéfait. Bientôt, Tofaa me rapporta la conclusion
du colloque.
    — Il n’y a pas de dak bangla à Cuddalore.
Si peu d’étrangers y viennent... et ceux qui y séjournent plus d’une nuit sont
encore plus rares. Ce sont là des Chola inférieurs tout crachés, vous savez.
Dans mon Bengale natal, on vous aurait reçu avec la plus cordiale hospitalité.
Enfin, ce misérable nous offre tout de même de loger chez lui.
    — Ma foi, c’est très serviable de sa part,
notai-je.
    — Il nous prie de le suivre jusque là-bas et
d’attendre quelques instants qu’il y soit entré. Ensuite nous frapperons à sa
porte ; il nous ouvrira, nous lui demanderons un lit et un repas, et il
nous enverra promener comme des malpropres.
    — Je ne comprends pas.
    — C’est normal. Vous verrez.
    Elle parla à l’homme qui fila d’un trot anxieux. Nous
lui emboîtâmes le pas, nous frayant un chemin parmi les porcs, la volaille et
les enfants, sans compter les excréments et les tas d’ordures éparpillés de par
les rues. Vu les maisons qu’habitaient les résidents de Cuddalore, dont aucune
n’était plus élégante que les huttes des Mien d’Ava, je remerciai le ciel qu’il
n’y ait pas de dak bangla disponible, car toute construction
prévue pour des voyageurs de passage n’aurait pu être qu’une porcherie. La
maison de notre hôte ne valait guère mieux – de simples briques de terre cuite
liées à la bouse de vache –, comme nous le comprîmes dès que nous le vîmes
disparaître à l’intérieur. Après une brève attente dans la

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