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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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chré...
    — Et vous n’irez pas non plus.
    — Alors ça, Donata, je ne pourrais le jurer de
bonne foi. Dans le seul cadre de mes affaires, je pourrais être appelé à
retourner à Constantinople, et autour de cette cité s’étendent des terres non
chrétiennes. Mon pas pourrait glisser...
    — Promettez-moi aussi que vous ne partirez pas au
loin avant que nos enfants, si Dieu daigne nous en accorder, soient mûrs et en
âge de se diriger par eux-mêmes. Vous m’avez bien raconté comment votre père
avait laissé son fils errer dans les rues avec des gens peu recommandables,
n’est-ce pas ?
    J’éclatai de rire.
    — Donata, eux non plus n’étaient pas tous vils.
Votre mère en faisait partie.
    — Ma mère s’est élevée au-dessus de cette
condition, justement. Je ne veux pas que mes enfants soient un jour
abandonnés. Promettez-moi.
    — Je vous le promets, concédai-je.
    Je ne pris pas le temps de calculer, à cet instant,
que si notre mariage produisait un fils dans un intervalle raisonnable, je me
trouverais âgé d’environ soixante-cinq ans quand il atteindrait sa majorité. Je
pensais simplement que Donata aurait bien le temps de changer d’avis au cours
de notre vie commune.
    — Je vous le promets, Donata. Aussi longtemps
qu’il y aura des enfants à la maison, et à moins que vous n’en décidiez
autrement, j’y demeurerai moi aussi.
    Et la première année du nouveau siècle, en l’an mille
trois cent un, nous nous mariâmes.
    Tout fut fait selon les règles. Quand notre période de
fiançailles eut été jugée assez longue, le père de Donata et le mien prirent
avec un notaire les dispositions nécessaires pour que se déroule en la paroisse
de Saint-Jean-Chrysostome la cérémonie de l’impalmatura, la promesse de
mariage. À cette occasion, ils lurent attentivement le contrat de mariage, le
signèrent et lui conférèrent ainsi un caractère de confirmation, comme si je
n’avais été pour ma part qu’un jeune marié timide et gauche, à peine sorti de
l’adolescence... C’était moi, en fait, qui avais rédigé le contrat, avec le
concours de l’avoué de la Compagnie. Au terme de la cérémonie de l’impalmatura, je passai au doigt de Donata la bague de fiançailles. Les dimanches qui
suivirent, le pare Nardo proclama en chaire les bans et les apposa sur
la porte de l’église ; nul ne vint contester ce projet de mariage. Dona
Lisa engagea alors un frère scribe à la graphie impeccable pour rédiger les partecipazioni
di nozze (faire-part) et les fit porter, chacun additionné du traditionnel
sachet de dragées, par des messagers en livrée, à tous les invités à la noce.
Tout ce qui comptait à Venise était convié, car bien que les lois somptuaires [48] limitent
l’extravagance de la plupart des cérémonies familiales publiques, le doge
Gradenigo nous en exempta à titre gracieux. Aussi, quand le jour vint, ce fut
une célébration à l’échelle de la ville... avec messe nuptiale, banquets et
agapes, musique, chants et danses, beuveries assorties de toasts, suivies de
chutes dans le canal de fêtards éméchés, et jets à n’en plus finir d’amandes et
de curiàndoli [49] ... Quand tout ce qui requérait la participation de Donata et la mienne fut
achevé, ses demoiselles d’honneur lui offrirent la donora, coutume qui
consistait à lui placer un bébé dans les bras et à remplir ses chaussures de
sequins d’or pour lui souhaiter fécondité et richesse. Enfin, nous quittâmes la
fête qui continuait à battre son plein, dans l’ivresse et la joie, pour gagner
notre Ca’ Polo désertée de tous, à l’exception de quelques serviteurs, les
membres de ma famille étant censés dormir chez leurs amis durant notre nuit de
noces.
    Dans l’intimité de notre grand lit, je devais
redécouvrir Doris en Donata : elle avait sa peau lactée et les mêmes seins
légers, tels de doux coquillages aux fines pointes rosées. À ceci près que
Donata était une femme bien formée, en plein épanouissement de sa féminité (une
douce fourrure dorée était là pour en attester), elle était l’image même de sa
mère enfant, jusque dans la forme charnue de ses petites lèvres, que j’avais à
l’époque comparées à ces pâtes appelées « lèvres de femme ». Ce qui
se passa cette nuit-là me rappela fort un après-midi volé, de longues années
auparavant. Ce que j’avais alors enseigné, je l’enseignai une nouvelle fois,
commençant à faire passer

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