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Marco Polo

Marco Polo

Titel: Marco Polo Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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détestable que cela, après tout.
    — Je suis heureux de l’entendre, mais guère plus
convaincu. Il faut justement que j’aille le voir à l’instant.
    Oncle Matteo se leva.
    — T’aurait-il demandé de t’arrêter me voir en
passant, pour je ne sais quelle raison ?
    — Non, non. Je dois juste aller récupérer auprès
de lui une somme d’argent dont je ne sais que faire.
    — Ah, fit mon oncle, reprenant sa position
couchée. Donne-la à Nico, il l’investira dans la Compagnie. Tu ne pourrais
faire meilleur placement.
    Après un instant d’hésitation, je fis remarquer :
    — Je note, mon oncle, que tu as l’air de bien
meilleure humeur que lors de notre dernier entretien.
    — E cussì ? Les
affaires ont repris, c’est tout.
    — Oui, mais je ne faisais pas référence ici aux
détails... disons, matériels.
    — Ah ! Tu parles de ma fameuse condition, reprit-il, le ton empreint d’une ironie désabusée. Tu préférerais sans
doute me voir abattu, drapé dans ma mélancolie ?
    — Au contraire, mon oncle. Si tu as pu faire,
dans une certaine mesure, la paix avec toi-même, je m’en réjouis.
    — C’est bien aimable à toi, mon neveu,
répondit-il d’une voix radoucie. C’est vrai, je vais beaucoup mieux. J’ai
découvert qu’un homme qui n’était plus en mesure d’éprouver du plaisir pouvait
en trouver un non moins délectable à en donner.
    — Quel que soit le sens de ces mots, j’en suis
fort aise pour toi.
    — Tu ne voudras peut-être pas le croire,
glissa-t-il presque hésitant, je me suis rendu compte que j’étais même en
mesure de donner du plaisir à celle qui est en train de me raser. Oui... arrête
de me regarder de cet air ahuri... à une femme ! En retour, elle
m’a enseigné quelques-uns des secrets qu’utilisent les femmes pour donner du
plaisir.
    Soudain presque gêné de son propre embarras, il ajouta
dans un grand rire, pour dissiper le malaise :
    — Qui sait ? Une nouvelle carrière s’ouvre
peut-être à moi ! Merci pour ta sollicitude à mon égard, Marco, mais ne me
fais pas rougir davantage. Si Ahmad t’attend, tu ferais mieux de t’y rendre
sans délai.
    Lorsque j’entrai dans le somptueux sanctuaire alloué
au Premier ministre, à la fois vice-régent et ministre des Finances, il ne se
leva pas et ne me gratifia d’aucun salut. Au contraire, alors que le khakhan ne
l’avait jamais exigé, il eut ostensiblement l’air d’attendre de ma part un ko-tou, me laissa longuement l’exécuter et, quand je me relevai, ne m’offrit pas de
m’asseoir. Le wali Ahmad ressemblait à tous les Arabes – nez en bec de
faucon, barbe noire au poil raide, teint plutôt sombre –, si ce n’est qu’il
semblait plus propre que la plupart de ceux que j’avais croisés dans le Levant,
ayant adopté l’usage de Kithai qui consistait à prendre des bains fréquents.
Ses yeux apparaissaient également d’une froideur inhabituelle chez les Arabes
et plus généralement même chez les Orientaux. Les yeux marrons sont souvent
chauds comme le qahwah, mais les siens ressemblaient davantage à des
éclats d’agate verte de Moka. Il portait l’aba et le keffieh arabes, mais
plutôt que tissés d’un fragile coton, ceux-ci étaient en soie et colorés comme
des arcs-en-ciel.
    — Vos gages, Folo [13] ,
articula-t-il de mauvaise grâce.
    Loin de pousser sur sa table une bourse d’argent, il
ne me proposait qu’un tas désordonné de papiers. Je m’en saisis et les
examinai. Les feuilles avaient toutes la même apparence : taillées dans un
sombre et robuste papier couleur de mûre, elles étaient décorées sur les deux
faces de dessins alambiqués, d’une multitude de mots inscrits à l’encre noire,
à la fois en caractères han et en alphabet mongol, et d’un grand sceau à
l’encre rouge, aux motifs raffinés et complexes. Je n’émis aucun remerciement.
J’avais conçu pour l’homme qui était en face de moi une antipathie immédiate et
n’étais pas loin de suspecter de sa part quelque fourberie. Aussi dis-je
simplement :
    — Veuillez m’excuser, wali Ahmad. Suis-je
censé être payé en pagherì ?
    — Je n’en sais rien, répondit-il, perfide. Que
signifie ce mot ?
    — Les pagherì sont les accusés de
réception que l’on reçoit lors d’un emprunt ou les reconnaissances de dette que
l’on signe lorsqu’on met un objet en gage. Ils sont d’un usage fréquent dans le
commerce, à Venise.
    — Eh bien, dans ce cas,

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