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Marcof-le-malouin

Marcof-le-malouin

Titel: Marcof-le-malouin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ernest Capendu
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rehaussé de garnitures en argent massif, et fermé à l’aide d’une double serrure dont la clef ne quittait jamais le gentilhomme. Le marquis ouvrit le manuscrit, l’appuya sur la table, et s’adressant à sa femme :
    – Julie, lui dit-il, lorsque vous aurez pris connaissance de ce que contient ce volume, vous connaîtrez dans leur entier tous les secrets de ma famille. Écoutez-moi donc attentivement. Toi aussi, mon fidèle serviteur, continua-t-il en se retournant vers Jocelyn. Toi aussi, n’oublie jamais ce que tu vas entendre ; et, si Dieu me rappelle à lui avant que j’aie accompli ce que je dois faire, jurez-moi que vous réunirez tous deux vos efforts pour exécuter mes volontés suprêmes ! Jurez-moi, Julie, que vous considérerez toujours, et quoi qu’il arrive, Marcof le Malouin comme votre frère ! Jure-moi, Jocelyn, qu’en toutes circonstances tu lui obéiras comme à ton maître.
    – Je le jure, monseigneur ! s’écria Jocelyn.
    – J’en fais serment sur ce Christ ! dit la religieuse en étendant la main sur le crucifix cloué à la muraille.
    – Bien, Julie ! Merci, Jocelyn !
    Et le marquis, après une légère pose, reprit avant de commencer sa lecture :
    – L’époque à laquelle nous allons remonter est à peu près celle de ma naissance. Vous n’étiez pas au monde, chère Julie ; vous n’étiez pas encore entrée dans cette vie qui devrait être si belle et si heureuse, et que j’ai rendue, moi, si tristement misérable…
    – M’avez-vous donc entendue jamais me plaindre, pour que vous me parliez ainsi, Philippe ? répondit vivement la religieuse en saisissant la main du marquis.
    – Vous plaindre, vous, Julie ! Est-ce que les anges du Seigneur savent autre chose qu’aimer et que pardonner ?
    – Ne me comparez pas aux anges, mon ami, répondit Julie avec un accent empreint d’une douce mélancolie. Leurs prières sont entendues de Dieu, et, hélas ! les miennes demeurent stériles ; car, depuis dix années, j’implore la miséricorde divine pour que votre âme soit calme et heureuse ; et vous le savez, Philippe, vous venez de l’avouer vous-même, vous n’avez fait que souffrir longuement, cruellement, sans relâche !…
    Le marquis baissa la tête et sembla se plonger dans de sombres réflexions. Enfin il se redressa, et prenant la main de Julie :
    – Qu’importe ce que j’ai souffert, dit-il, si maintenant je dois être heureux par vous et près de vous…
    – Un bonheur fugitif, mon ami. L’habit que je porte ne vous indique-t-il pas que j’appartiens à Dieu seul ?
    – Ne pouvez-vous être relevée de vos vœux ?
    – Et que deviendrions-nous, Philippe ?
    – Nous fuirions loin, bien loin d’ici… Nous cacherions, dans une patrie nouvelle et ignorée, notre amour et notre bonheur !…
    – Vous ne pouvez en ce moment abandonner la cause royale !
    – Cela est vrai.
    – Puis, lors même que nous parviendrions à fuir, en quel endroit de la terre trouverions-nous la tranquillité ?
    – Hélas !… Julie, ces misérables nous poursuivraient sans trêve et sans pitié s’ils découvraient que je suis encore vivant ! C’est là ce que vous voulez dire, n’est-ce pas ?
    Julie garda le silence.
    – Oh ! murmura le marquis dont l’indignation douloureuse s’accroissait à chaque parole, oh ! les infâmes. Ne pourrai-je donc jamais les écraser sous mes pieds comme de venimeux reptiles !…
    – Taisez-vous, Philippe ! s’écria la jeune femme. N’oubliez pas que notre religion interdit toute vengeance !
    Le marquis ne répondit pas ; mais il lança un regard étincelant à Jocelyn, et tous deux sourirent, mais d’un sourire étrange.
    – Oubliez ces rêves, Philippe ; oubliez cet avenir impossible ! continua Julie. Pour rompre mes vœux, il faudrait un bref de Sa Sainteté ; et croyez-vous qu’un tel acte puisse s’accomplir dans le mystère ? On s’informerait de la cause qui me fait agir, et on ne tarderait pas à découvrir la vérité.
    – Peut-être ! répondit lentement le marquis. Lorsque vous connaîtrez davantage l’homme dont je vais lire l’histoire, histoire tracée de sa propre main, vous changerez sans doute d’opinion, et vous penserez avec moi que celui qui fut capable de faire ce qu’il a fait, peut nous sauver tous deux, et assurer notre bonheur à venir…
    – Lisez donc, mon ami. J’écoute.
    Alors le marquis se pencha vers le manuscrit, et commença à voix

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