Marguerite
qui marchait d’un pas vif.
— Mademoiselle
Emmélie,
fit-elle,
essoufflée.
C’est
votre mère qui m’envoie { votre cuisine chercher un morceau de lard pour le bouillon.
— Il te faudrait aussi quelques bons morceaux de viande.
Suis-moi.
Elles atteignirent rapidement la maison des Boileau, hors d’haleine. Emmélie laissa Charlotte { la cuisine.
— Tu n’as qu’{ bien faire tout ce que te recommanderas Ursule, notre cuisinière, et ensuite, tu retournes immédiatement chez le docteur.
Monsieur Boileau, qui était sur le qui-vive, vint rejoindre Emmélie.
— Comme ça, il demande à venir au monde, ce petit ?
— Oui, père. Mère s’occupe de tout. Je file chez ma tante Lareau.
— Je t’accompagne. Viens, nous devons seller les bêtes nous-mêmes, puisqu'Augustin est parti.
Monsieur Boileau se frottait les mains, heureux de toute cette activité qui annonçait une nouvelle naissance au sein du clan. Les nombreux deuils qui avaient assombri sa famille n’avaient jamais altéré sa nature optimiste. [ ses yeux, Dieu choisissait la survivance des êtres forts. Ainsi, la naissance demeurait un événement attendu dans la joie, mais avec ce qu’il fallait de résignation, advenant la mort du nouveau-né, si fréquente.
Mais l’heure n’était pas aux épanchements de toute nature. Il fallait faire vite. Bonne cavalière, Emmélie savait seller un cheval. Elle s’approcha de Princesse, la jument préférée de son frère René. En apercevant la selle, la jument manifesta sa bonne humeur. Elle manquait d’exercice depuis le départ de son maître. Pour sa part, son père possédait un splendide cheval, un vif étalon noir qui répondait au nom pompeux de Majesté.
— Tout doux, mon vieux, fit le bourgeois en caressant le museau de son cheval.
Le garçon d’écurie aida Emmélie { sangler la jument et à la sortir du bâtiment, puis il fit de ses mains un marchepied pour aider la jeune fille à monter en selle.
— Allons-y, fit Emmélie.
Le père et la fille allaient sortir de la cour lorsque la jolie tête de Sophie apparut { l’une des lucarnes de l’étage.
— Où allez-vous si prestement? cria Sophie.
— Marguerite va accoucher, nous partons avertir sa mère ! Prépare-toi, tu iras remplacer tante Victoire auprès des enfants si elle veut venir, lui répondit sa sœur qui venait d’avoir cette bonne idée.
— Jamais de la vie !
— Suffit, mademoiselle Sophie ! hurla son père. Si ta tante a besoin de toi, tu iras. Nous serons de retour dans moins d’une heure. Allons, dit-il en se tournant vers Emmélie, un peu de charité chrétienne ne fera pas de tort
{ ta sœur. Partons.
Et il lança sa monture au galop sur le chemin de la Petite Rivière, suivi par sa fille. Le temps lourd et gris annonçait l’approche imminente d’un orage.
*****
Victoire, la petite Esther et la jeune Marie dans ses jupes, ne fut pas surprise de les voir arriver.
— C’est Marguerite ? demanda-t-elle simplement.
— Ma chère Victoire, clama monsieur Boileau en embrassant joyeusement sa cousine, réjouissez-vous, dans quelques heures, vous serez grand-mère pour la première fois. — Tout va bien, tante Victoire, la rassura Emmélie.
Mère est avec Marguerite et ne partira que lorsque tout sera terminé.
— Quand je pense que je ne peux même pas y aller. Les plus vieux sont aux champs, puis Marie est encore trop jeune pour s’occuper de la maisonnée. On a besoin des garçons pour garder le troupeau avant de rentrer les bêtes { l’étable pour faire le train. C’est dans ce temps-là que Marguerite me manque gros. Je pouvais me fier { elle n’importe quand !
— Nous avons tout arrangé, ma bonne Victoire, affirma Monsieur Boileau. Sophie viendra prendre la relève. Avec l’aide de vos grands gars et de Marie, je suis sûr qu’elle pourra être utile.
Incrédule, Victoire regarda son cousin. Il ne parlait pas sérieusement. Que viendrait faire ici la capricieuse Sophie ?
— J’aurais plus confiance avec Emmélie.
— Ma tante, dit gentiment Emmélie, j’ai promis {
Marguerite de rester près d’elle. Elle est bien seule, vous savez que la Charlotte est une incapable.
— Voyons donc ! Tu parles d’une drôle d’affaire. C’est moi qui devrais accoucher ma fille, comme ça c’est toujours fait dans ma famille, de mère en fille, avança Victoire, consternée.
— Ne vous inquiétez pas, ma tante, nous avons fait quérir la bonne femme Stébenne et. .
—
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