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Marguerite

Marguerite

Titel: Marguerite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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temps suffisant pour apprécier l’onctueuse boisson. Quelques questions somme toute anodines vinrent ensuite sur la fameuse succession Rouville qui servait de prétexte à la rencontre. En quelle année son grand-père, René-Ovide, avait-il acheté la seigneurie de Rouville de son frère ?
    Les fiefs de Chambly-Est étaient-ils compris dans la transaction ? Comment envisageait-il le développement de sa future seigneurie ?
    — Songez à la prospérité qui s’annonce bientôt pour Pointe-Olivier, lança Pétrimoulx, qui en voyait déjà les signes annonciateurs: le nombre d’habitants augmentait, les terres cultivables se développaient et les moulins donnaient un bon rendement.
    On avait commencé à défricher les riches terres de Monnoir, la seigneurie voisine qui appartenait à Sir John Johnson, l’influent loyaliste. Ces terres étaient en quelque sorte le prolongement de tous ces fiefs que possédaient les Rouville dans la partie de la seigneurie de Chambly-Est. C’était sans doute la raison pour laquelle Sir John avait choisi de construire à Pointe-Olivier son manoir tout neuf. Ce dernier avait la réputation d’avoir du flair et de savoir lire l’avenir qu’apporterait le progrès. N’affirmait-on pas que Johnson possédait plus de propriétés que quiconque dans les deux Canada réunis ?
    En disant cela, le notaire Pétrimoulx savait très bien qu’il tournait peut-être une épine dans le cœur d’un Rouville.
    — Etonnant, tout de même, que deux grands hommes qui ont combattu ensemble pendant la guerre contre les Bostonnais soient si. . différents.
    — Ces vieilles disputes ne concernent pas les jeunes générations, répondit Rouville pour clore ce chapitre qu’il ne souhaitait pas aborder.
    — Vous faites bien de raisonner ainsi, monsieur de Rouville. Bientôt, les blés et fourrages qu’on cultivera dans Monnoir afflueront sur les quais de Pointe-Olivier avant de prendre la direction de Québec ou des Etats-Unis. Espérons qu’un jour le gouvernement creusera un chenal dans la rivière Chambly
    pour
    améliorer
    la
    navigation,
    et
    surtout,
    qu’on se décidera { percer ce canal de Chambly dont on parle depuis toujours.
    — Tous ces développements sont inévitables, c’est le progrès ! approuva Ovide, qui se demandait où Pétrimoulx voulait en venir.
    — C’est une grande chance d’être jeune alors que nous en sommes aux premiers balbutiements d’un siècle rempli de promesses. Vous avez certainement entendu parler de ces nouveaux bateaux mus par la vapeur qui ne sont plus à la merci des vents. Il ne tardera guère qu’on en construise au Bas-Canada. En rappelant aux autorités la fidélité de votre famille qui a toujours bien servi Sa Majesté, vous obtiendriez facilement que le tracé du futur canal passe sur vos fiefs, plutôt que d’avantager la seigneurie de monsieur Christie. Après tout, les Rouville sont de vieille et noble souche canadienne dont on ne compte plus les états de service.
    « Ce notaire n’est pas bête », se disait Ovide { mesure que le rusé renard lançait ses réflexions d’un ton négligent, comme si elles surgissaient spontanément, { mesure qu’il parlait. «Mon père devrait en faire son procureur, comme l’a fait Sir John, plutôt que d’employer le fils Boileau qui doit le berner», se dit le jeune homme en accusant gratui-tement le notaire de Chambly.
    — Malheureusement, les négociants de Chambly sont les plus forts, prononça Ovide avec aigreur, ce sont eux qui détiennent les clés du commerce de la région.
    Il détestait évoquer ces petits négociants qui comptaient leurs pièces d’argent, entassant portugaises, aigles américains, bonnes livres anglaises et vieux louis français dans de petits sacs de cuir pour les empiler ensuite dans leurs coffres ou un tiroir de bahut. Il aurait bien voulu les chasser de ses pensées tout en se laissant aller au plaisir de la dégustation.
    Ce porto était tout simplement délectable.
    — Oui, admit Pétrimoulx. Mais les clés peuvent changer de mains.
    — Que voulez-vous dire ?
    — Eh bien, ces messieurs Boileau et Bresse qui ont des accointances politiques avec les Papineau et le Parti canadien de Pierre-Stanislas Bédard, le frère du curé de Chambly, pourraient un jour s’en repentir. Ce Bédard fait tout pour s’attirer les foudres du gouverneur { Québec.
    Sans compter qu’il ne se gêne pas pour dénigrer monsieur de Bonne, un parent de votre mère, ce me semble

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