Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Marguerite

Marguerite

Titel: Marguerite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
Vom Netzwerk:
années auparavant. Tôt le matin, il avait emprunté un bac qui l’avait mené sur la rive est de la rivière Chambly.
    De l{, il s’était mis en route pour Pointe-Olivier, dernière étape d’un voyage de deux semaines qui l’avait d’abord mené à Québec. Marie-Anne de Rouville, sa mère, l’avait enjoint d’aller présenter ses amitiés { son parent, le juge Pierre De Bonne, qui vivait des jours difficiles, constamment houspillé par ses ennemis politiques. Il avait transmis les salutations de son père, le colonel de Rouville, à ses vieilles connaissances de la capitale. Au retour, Ovide s’était arrêté quelques jours à Trois-Rivières, chez des cousins éloignés de la famille Hertel.
    À partir de Québec, le jeune homme avait fait le voyage avec la voiture de la malle poste. Arrivé à Trois-Rivières, n’en pouvant plus de se faire bringuebaler sur un chemin défoncé par une diligence tape-cul, il s’était embarqué sur une petite goélette en direction de Sorel. Le voyage était plus long, mais ô combien plus reposant. Les vents avaient été favorables et l’embarcation avait traversé le lac Saint-Pierre sans incident avant de mouiller pour la nuit { l’entrée de ces fameuses îles luxuriantes situées au cœur d’une multitude de chenaux. Ovide avait finalement récupéré sa monture, laissée en pension chez un aubergiste fiable, pour ensuite longer le chemin qui suivait la rivière Chambly. Il avait traversé les villages de Saint-Ours, de Saint-Denis et de Saint-Charles.
    A Saint-Hilaire, il aurait bien voulu faire une halte prolongée, mais on l’attendait à Pointe-Olivier.
    Niché au pied de l’imposante montagne du même nom, le petit village de Saint-Hilaire était en quelque sorte le chef-lieu de la seigneurie de Rouville, dont il hériterait un jour. Dans toute la région, c’était l’endroit qu’il préférait entre tous. Sa famille possédait cette petite seigneurie depuis quatre générations ; elle constituait le plus important des fiefs de l’apanage familial, et pourtant, aucun des seigneurs n’avait daigné y vivre. Aux yeux d’Ovide, c’était presque un crime. A vingt-trois ans, le futur seigneur de Rouville entendait bien réparer ce tort. Il ferait construire un manoir dont la magnificence dépasserait celle de tous les manoirs existants dans le Bas-Canada, y compris le château Saint-Louis de Québec. Il avait déj{ choisi l’endroit, sur les hauteurs d’un promontoire, et rêvait d’une splendide bâtisse aux lignes palladiennes se mirant dans les eaux de la rivière Chambly.
    Son père, Melchior de Rouville, avait donné un terrain aux villageois de Saint-Hilaire sur lequel se dressait un modeste presbytère-chapelle.
    Lorsque
    son
    tour
    viendrait,
    Ovide ferait bâtir une église digne de ce nom. Il améliorerait le rendement des moulins et développerait les terres. Saint-Hilaire damerait le pion à Chambly, qui représentait tout ce qu’il détestait: la maudite famille Boileau et ses acolytes Bresse, Bédard et Talham. Et surtout, Marguerite Talham, dont la beauté l’attirait comme un aimant attire le fer. La vue de cette femme provoquait chez lui des sentiments violents. Elle le savait, la diablesse, avec sa longue tresse effrontée qui tombait sur sa croupe et ses regards affolés.
    Elle baissait les yeux dès qu’elle l’apercevait, pour mieux le tenter. La belle gueuse avait gardé le silence, se moquant allègrement de son vieux mari. Un jour, il la prendrait encore et lui ferait payer cher ses provocations.
    Il prenait tout son temps, profitant de la journée chaude et ensoleillée comme un ultime moment de liberté avant de réintégrer le giron familial, puisqu’il était de retour {
    Chambly, définitivement. Enfin, en attendant de vivre un jour dans sa seigneurie, il louait une petite maison, voisine du manoir familial, dans le faubourg Saint-Jean-Baptiste.
    A vrai dire, c’était sa mère qui avait tout manigancé, { sa façon.
    — Saviez-vous que la maison de la veuve Anderson est à louer? avait annoncé un jour madame de Rouville à son mari.
    — Vous voulez parler de cette petite maison en bois derrière chez nous? Je l’ignorais.
    — Peu importe, avait répliqué brusquement son épouse.
    Elle conviendrait fort bien à Ovide. Il pourrait conserver l’indépendance nécessaire { sa condition de jeune homme de bonne famille. La maison a besoin d’être meublée et le loyer est de cinquante livres par an. Votre

Weitere Kostenlose Bücher