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Marguerite

Marguerite

Titel: Marguerite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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catégorie des bavards.
    — C’est l’impression que ça donne, approuva Talham sans en dire plus, car les notables avaient décidé de tenir secrets leurs soupçons d’incendie criminel pour ne pas provoquer plus de tensions qu’il y en avait.
    — Moi, fit Marguerite en étouffant un bâillement non dissimulé, tout ce chantier { venir m’épuise. Je monte me coucher.
    La conversation des hommes s’était prolongée tard.
    Charlotte était montée depuis longtemps et avait couché les enfants. Avant de se mettre au lit, la servante avait sorti des draps propres et préparé une paillasse à l’intention de la mère de sa maîtresse. Madame Lareau aimait bien rester au village quand l’occasion se présentait. Cela se passait toujours ainsi lorsque le souper finissait tard. Depuis la mort de la vieille mémé Lareau, Victoire pouvait se permettre de s’absenter une journée. En séjournant chez sa fille, elle renouait avec les souvenirs de sa prime jeunesse : le bruit des charrettes et des chevaux sur le chemin du Roi, les cris des marchands et le son de l’angélus qui ponctuaient la vie villageoise. Elle retrouvait cette atmosphère dont elle avait la nostalgie, même après tant d’années passées sur le chemin de la Petite Rivière.
    Lorsque le temps se fut calmé, son mari repartit à la ferme. Il lui fallait être sur place pour faire le train du matin. Le lendemain, un des garçons Lareau viendrait reprendre sa mère et la petite Appoline pour les ramener chez elles.

    *****
    Tôt le lendemain, on frappa à la porte des Talham.
    Charlotte alla répondre.
    — Une lettre pour vous, docteur, annonça-t-elle en tendant un billet plié en deux à son maître.
    Ce dernier le lut rapidement, fronça les sourcils et le replia soigneusement avant de le mettre dans la poche de sa veste.
    — Madame Ferrière ? s’informa Marguerite, plus inquiète que jamais.
    — Non, il s’agit de tout autre chose, répondit vaguement son mari, sans plus.
    Un timide soleil avait chassé le temps maussade de la veille pour éclairer la cuisine des Talham. Victoire, Marguerite et le docteur prenaient leur déjeuner avec Charlotte et les enfants. Le feu de l’âtre réchauffait la pièce et chassait l’humidité sournoise des matins d’automne.
    Depuis le lever du jour, d’impressionnants vols de bemaches sauvages traversaient le ciel, cacardant bruyamment. A l’époque de la migration, au printemps comme { l’automne, elles étaient des milliers à faire halte pour la nuit sur le bassin de Chambly après s’être gavées dans les champs des alentours. Ces beaux oiseaux brunâtres au long cou noir et aux joues blanches formant une mentonnière dessinaient d’immenses taches foncées sur la nappe d’eau. Tout { coup, on les voyait tournoyer longuement, comme pour chercher leur direction, et s’élever brusquement, formant de vastes «V» dans le ciel en s’envolant vers une mystérieuse destination.
    «C’est leur manière de danser le menuet», disait Marguerite { Melchior, qui s’accoudait { la fenêtre pour ne rien manquer du magnifique spectacle des grands oiseaux qui survolaient de si près la maison des Talham qu’on pouvait facilement observer leur ventre dodu.
    — En somme, se désolait Marguerite en tirant machinalement sur les plis de son tablier qui ne cachait plus son gros ventre, notre nouveau-né sera baptisé dans cette bâtisse laide et froide qui nous sert maintenant d’église.
    — Mais il y a pire, crois-moi, lui répondit tristement son mari en repensant à madame Ferrière.
    Victoire, qui faisait griller du pain sur le poêle, se retourna, intrigué par le ton de son gendre.
    — Madame Ferrière ne va pas bien, n’est-ce pas ?
    demanda-t-elle.
    La veille, en rentrant, le docteur avait vaguement mentionné sa visite chez les Ferrière.
    — On ne peut rien vous cacher, répondit évasivement Talham.
    — Qu’y a-t-il avec madame Ferrière ? interrogea Marguerite en servant du lait chaud aux enfants pour qu’ils trempent leur pain grillé.
    — Il ne faut pas parler de ces choses-là, madame, fit vivement Charlotte qui, comme tout le monde au village, avait entendu parler des souffrances de la dame en mal d’enfant. Les malheurs des autres, c’est pas bon pour vous et pour celui-là, ajouta-t-elle en désignant le ventre de sa maîtresse.
    Charlotte savait bien qu’il fallait éviter les drames ou les récits effrayants à une femme grosse. La domestique de madame Boileau,

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