Marilyn, le dernier secret
traumatisme des journées d'isolement en cellule capitonnée ne la quittait plus depuis.
On s'en doute, les anxiétés de l'actrice pesaient sur son quotidien, l'incitant à adapter son environnement pour essayer de les apaiser. Les épais rideaux couvrant le mur de sa chambre jouaient un rôle précis : ne pas laisser passer le moindre rayon de lumière afin que son sommeil si fragile ne soit pas interrompu avant la complète levée du jour.
Comme Ralph Roberts et Allan Snyder l'avaient expliqué aussi, la comédienne ne se couchait jamais sans avoir vérifié à plusieurs reprises que la porte de sa chambre n'était pas complètement fermée. Une précaution logique si l'on considère la nature de ses phobies.
Or Eunice Murray semblait avoir négligé, oublié même, cette donnée qu'il lui était pourtant impossible d'ignorer.
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Le point essentiel du témoignage de l'assistante concerne donc la porte de la chambre. Elle prétendait avoir trouvé la serrure fermée. Une description confirmée ensuite par le Dr Greenson pour justifier le recours au tisonnier brisant la fenêtre. Sans cette serrure condamnée, c'est bien l'ensemble du déroulé de la nuit du 4 août qui s'effondre.
Les interprétations psychologiques, insuffisantes pour prouver quoi que ce soit, de même que les souvenirs de proches de la victime, sans doute altérés par le temps, ne suffisent pas pour trancher. Il faudrait des éléments solides, tangibles…
Contre toute attente, ils ne manquent pas.
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La confirmation provient d'où on l'attendait le moins. D'Eunice elle-même.
Murray revint à plusieurs reprises sur ce point. Certes, elle ne l'avait pas fait publiquement continuant, dans ses mémoires par exemple, à raconter comment elle avait tenté en vain d'ouvrir la porte. Mais au fil des années, elle avait entretenu une correspondance mesurée avec une poignée d'admirateurs de la star, dont certains s'interrogeant sur la thèse du suicide. Si la plupart des échanges se consacraient aux habitudes de la comédienne, certaines missives abordaient les circonstances de son décès. Et, en 1982, dans une lettre adressée au collectionneur Justin Clayton, Eunice Murray reconnut, sans aller plus loin, que la porte n'était pas condamnée.
Cette confidence ne fut pas un acte isolé. Quatre ans plus tard, l'ancienne assistante communiquait la même information à Roy Turner, chercheur spécialisé dans les premières années de Monroe. À l'époque peu intéressé par les circonstances du décès et ne percevant pas l'enjeu de l'information, Turner n'avait pas relancé Murray. Une prudence d'autant plus regrettable qu'il s'agissait peut-être, de la part de Murray, d'une tentative d'orientation de la conversation vers les événements du 4 août. Car, en près de dix ans d'échanges, c'était en effet le seul indice qu'Eunice avait délivré volontairement.
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Les propos mesurés à Justin Clayton et Roy Turner n'étaient en rien des cas isolés. Patti Mocella, la nièce d'Eunice, et Steven Miller, son infirmier avaient eux aussi évoqué devant moi une confidence semblable.
Mais si, grâce à ces quatre témoignages, la thèse de la porte fermée se trouvait d'un coup sérieusement ébranlée, une confirmation infaillible devait encore survenir. Or, par chance, la preuve définitive existait.
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Tony Plant, citoyen américain fasciné par Marilyn Monroe en général et le mystère de son décès en particulier, avait consacré plusieurs années à essayer d'approcher de la vérité, lisant l'ensemble des documents publiés sur ce thème et, à chaque fois que c'était possible, en rencontrant les témoins encore en vie.
Membre actif du DD Group – une entité virtuelle rassemblant autour de David Marshall des admirateurs de l'actrice décidés à unir leurs forces et informations pour élucider les circonstances de sa mort – Tony avait, voilà quelques années, longuement rencontré Linda Nunez.
Le père de celle-ci, le Dr Gilbert Nunez, avait racheté le 12305 Fifth Helena Drive en 1962 et y avait habité avec sa famille jusqu'en 1977. Comme on peut s'en douter, l'acquisition de l'ultime résidence d'un mythe hollywoodien avait été riche en émotions pour les Nunez. D'autant que si les effets personnels de Marilyn ne se trouvaient plus dans la villa, l'aspect et l'agencement de celle-ci n'avaient pas changé depuis le fameux 4 août 1962. Personne d'autre n'avait vécu entre ses murs depuis la disparition de la
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