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Marin de Gascogne

Marin de Gascogne

Titel: Marin de Gascogne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Escarpit
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garçon. J’espère que tu as fait honneur à la marine langonnaise ! T’es-tu bien battu, au moins ?  
    — La dernière année, j’étais sur un corsaire, mais nous avons été coulés par les Anglais.  
    Les femmes poussèrent des cris effrayés.  
    — Ne t’en fais pas, mon garçon, le général Bonaparte va se charger de leur donner une leçon… à eux et à quelques autres !  
    En cortège, tout le monde se dirigea vers le port. Quand Hazembat vit son fils, il posa le maillet et le fer qu’il tenait, et s’avança vers lui à pas lents. Il lui mit les mains sur les épaules et le regarda droit dans les yeux.  
    — Sois le bienvenu à la maison, matelot Hazembat. Puis il lui donna l’accolade comme on fait à un homme et à un égal. Grave, lui aussi, Perrot l’imita, puis tous les marins et les ouvriers du chantier vinrent lui serrer la main. Parmi eux, Capsus, le frère de Pouriquète, et Pishehaut, le frère de Jantet, s’attardèrent, avec dans les yeux leur vieille admiration du héros.  
    — Je vais être incorporé à l’automne, dit fièrement Pishehaut.  
    — Et moi l’an prochain, dit Capsus. Tu nous diras comment c’est, Hazembat ?  
    — Vous savez, je n’étais pas dans la marine régulière…  
    — Mais tu as été dans des batailles ?  
    — Oui, quelques-unes…  
    — Raconte-nous !  
    — Pas maintenant, trancha Perrot. Ce soir, je vous invite tous à trinquer et Hazembat nous racontera ses aventures !  
    Le dernier à se présenter fut le cousin Guitoun. Il arriva en clopinant et, passant son bras autour des épaules de Bernard, le conduisit vers la maison. Au passage, sa main effleura le cordonnet que Bernard portait au cou.  
    — Tu as toujours ta cocarde ?  
    — Oui, toujours.  
    — Ce n’est plus tellement la mode, tu sais. La République commence à se faire vieille. Tu crois encore en elle ?  
    — Oui, et toi ?  
    — Moi aussi, mais tu te rappelles l’histoire des grenouilles qui demandaient un roi ?  
    — Tante Laure la racontait.  
    — Les grenouilles d’ici s’agitent beaucoup en ce moment. C’est une vraie carraquère.  
    Tante Rapinette attendait en haut de l’escalier, inchangée et sévère, mais elle ne pouvait empêcher une certaine émotion de percer dans son regard.  
    —  Credèvi que t’avèvas perdut lo camin de la casa, gojat ! dit-elle. Tu n’étais pas pressé de rentrer !  
    Bernard lui planta deux baisers sur les joues.  
    — Moi, si, Rapinette, répondit-il en riant. C’est la mer qui n’était pas pressée de me laisser partir !  
    Touton Tignous était assis sur l’ancien fauteuil de tante Laure. Cametorte, l’autre frère de Jantet, qui écrivait sous sa dictée, en tailleur sur le plancher, se leva péniblement et tenta de courir vers Bernard, mais sa jambe ne suivait pas.  
    — Tu vois ? dit Tignous d’une voix de crécelle, deux invalides nous sommes devenus ! Heureusement que le petiot a gardé sa tête : c’est lui qui fait les écritures maintenant… Mais ça fait du temps que je ne t’avais pas vu ! Comment t’appelles-tu, déjà ?  
    — C’est Bernard Hazembat, touton ! cria Came-torte. Com vas, Bernard ? Tu vois, ma jambe ne s’est pas arrangée, avec le temps.  
    Il devait avoir dix-sept ans et Tignous moins de quarante, mais ils avaient l’air de petits vieux. Tignous toussa lamentablement et cracha dans un grand mouchoir à carreaux.  
    — Qu’est-ce qui lui est arrivé ? demanda Bernard à son père.  
    — La Sègue et lui ont fait de mauvaises affaires. Il s’est fait un sang noir qui lui est monté à la tête quand il a fallu vendre le chantier de Toulenne. La Sègue y gagne tout juste sa vie comme scieur de long.  
    — Mais les Escarpit ont du bien !  
    — Pas ceux de Toulenne. Ceux de Coimères en ont encore un peu, mais tout s’en est allé à la dérive après la mort de Michelot Escarpit, surtout quand son fils Bourrut est parti à la guerre comme maître d’équipage sur la frégate la Minerve. C’est son cousin Beyshevèle qui s’occupe du dernier courau qui leur reste.  
    — Ça ne va pas fort sur la rivière ?  
    — Non, pas trop. On perd de l’argent avec les réquisitions militaires et, avec le port de Bordeaux bloqué, le trafic périclite. Heureusement que les Dumeau sont là pour nous donner du fret !  
    — Ils font des sous, eux ?  
    — Bah ! tant qu’ils nous en laisseront pour

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