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Mémoires de 7 générations d'exécuteurs

Mémoires de 7 générations d'exécuteurs

Titel: Mémoires de 7 générations d'exécuteurs Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Henri Sanson
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inspirations de ce temps, renfermait en soi la solution des questions sociales si violemment agitées.
    J’anticiperais sur ce qui me reste à dire à une place plus opportune, si je m’étendais ici davantage sur ce sujet. J’ai cru devoir pourtant donner dès à présent une idée de cette longue carrière fournie par mon grand-père au milieu d’événements si tragiques, car cela justifie, et l’épigraphe de ce livre, et ce que j’avançais tout à l’heure en disant que je ne croyais pas qu’il fût possible de trouver une personnification plus complète de l’exécuteur que Charles- Henry Sanson.  
    Je reviens maintenant à sa jeunesse dont nous connaissons déjà les principaux détails. Ils sont consignés dans ces annales de famille dont il avait repris et suivi sans relâche la continuation, quoi qu’il fût bien loin de prévoir jusqu’à quel point elles se confondraient avec l’histoire du pays.
    La dernière partie du règne de Louis XV est sobre de sang. Après Lally et La Barre, la soif est étanchée ; la cour se vautre dans le vice sans le souiller de cruauté. Aussi ne trouvé-je sur le registre de mon aïeul que des condamnés de la Tournelle. Ce sont des scélérats vulgaires, dont les crimes ne dépassent pas ce niveau de dépravation qui est inhérent aux mauvaises exceptions de la nature humaine. La seule chose digne de remarque, c’est que tous ou presque tous avaient interjeté appel devant le Parlement des sentences rendues contre eux par des juridictions inférieures, et que cet appel n’aboutissait le plus souvent qu’à une aggravation de peine. Ainsi il était rare que les simples bailliages condamnassent les malheureux qu’ils avaient à juger à être rompus vifs et attachés sur la roue jusqu’à ce que mort s’en suive, ce qui était assurément un des plus terribles raffinements de férocité que l’imagination humaine ait pu concevoir ; la corde et la potence leur paraissaient un châtiment suffisant. Eh bien, généralement le Parlement n’infirmait la sentence que pour substituer le premier de ces supplices à l’autre. On se demande vainement pourquoi ce surcroît de rigueur de la part d’une cour souveraine, à laquelle ces malheureux ne s’adressaient que dans l’espoir d’obtenir au contraire un allégement à leur sort. Cette roue était un odieux emblème pour la justice, et l’on se sent saisi d’une indignation mêlée de haine en la voyant si souvent figurer dans les arrêts du corps le plus élevé de la magistrature du royaume. Où étaient donc alors ce sens moral si pur, ce calme plein de force et de modération qui n’ont cessé depuis de caractériser chez nous l’action judiciaire ?
    Parmi ces crimes obscurs dont je viens de résumer l’ensemble et de tirer le seul enseignement qu’ils puissent offrir, je rencontre, en 1774, un parricide qui mérite peut-être plus d’attention. Un marchand de chevaux, nommé Chabert, domicilié dans l’enclos même du Palais-de-Justice, avait un fils unique à qui il nourrissait l’espoir de laisser son commerce florissant. Malheureusement ce jeune homme répondait mal à cette tendre sollicitude. Adonné déjà à la débauche, non seulement il passait sa vie dans l’oisiveté et les plaisirs, mais encore il aspirait an moment où la mort de son père le rendrait maître d’une petite fortune amassée lentement par le travail, et qu’il avait hâte de gaspiller pour la satisfaction de ses vices.
    Au nombre de ses compagnons habituels de plaisir se trouvait un ouvrier appelé Cellier, à qui il n’hésita point à faire part de ses coupables impatiences, qui prirent bientôt la forme d’un projet criminel : celui de se défaire de son père, pour jouir plus tôt de la liberté et de l’aisance qu’il ambitionnait.
    Cellier était aussi une nature perverse et un esprit faible : deux raisons pour que la semence perfide des excitations du jeune Chabert fructifiât. Il se laissa gagner, et consentit à commettre l’horrible attentat dont ce fils dénaturé avait conçu le projet. Unis désormais comme deux complices, ils fixèrent ensemble le jour et l’heure où il faudrait agir. Chabert remit lui-même à Cellier un grand couteau qu’il avait pris soin d’aiguiser et d’affiler, pour être plus sûr que le meurtrier ne manquerait pas son coup.
    Un soir que Chabert père rentrait chez lui, entre huit et neuf heures, Cellier, qui l’y attendait caché, lui porta deux coups de

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