Mémoires de 7 générations d'exécuteurs
de place chez lui.
Madame Masson lui répondit que cette cave ne serait libre que le lendemain. Ce retard dans la mise en possession, parut affecter désagréablement l’homme au vin d’Espagne cependant il fit son prix avec la propriétaire, et lui paya un quartier d’avance.
Le lendemain, le prétendu du Coudray allait au port Saint-Nicolas, louait un haquet, et achetait un quartaut de cidre, se faisait suivre par cet équipage jusqu’à une des portes du Louvre, où il prenait, chez le sculpteur Mouchy, la malle laissée en dépôt par madame Desrues, faisait charger cette malle à côté du quartaut et se dirigeait avec le tout vers la maison du Plat-d’Étain.
En entrant dans la rue de la Mortellerie, dans laquelle était située cette maison, Desrues fit une rencontre désagréable, celle d’un nommé Mévret, négociant, auquel il devait près de sept mille livres. Il déguisa son trouble, alla au devant de son créancier, et crut s’en débarrasser en lui renouvelant les promesses, dont en toutes circonstances il se montrait si prodigue ; mais Mévret, qui avait appris à ses dépens la valeur de ses promesses, ne s’y fia qu’à moitié, et fit suivre le taquet pour s’assurer de l’endroit où son débiteur déposait ses marchandises.
Lorsque la petite voiture fut arrêtée devant le Plat-d’Étain ; l’homme qui la conduisait se fit aider d’un porteur d’eau pour descendre le chargement dans la cave ; le quartaut se maniait aisément, mais la malle semblait des plus lourdes. Desrues du Coudray paya généreusement le voiturier et ceux qui l’avaient aidé ; puis, resté seul, il s’enferma clans la cave avec de la paille, des planches et des clous qu’il alla chercher dans le voisinage et il travailla pendant près de trois heures.
Ce ne fut que le 17 février que l’on le revit dans la maison de la rue de la Mortellerie.
Pendant cet intervalle un drame, non moins ténébreux que le premier, eut un dénouement à peu près identique : un second crime fut accompli.
VI – DESRUES
SUITE ET FIN
Le soir du jour où Desrues avait déposé la malle chez le sculpteur Mouchy, le jeune de la Motte s’était présenté à la maison de la rue Beaubourg pour voir sa mère. Il fut bien étonné, la sachant malade, d’apprendre qu’elle était partie pour Versailles. Desrues, qui avait réponse à tout, lui donna des explications qui le rassurèrent, et comme le jeune homme, bien que grand et vigoureux, se sentait légèrement indisposé, il le garda chez lui jusqu’au 10 février, où il l’emmena à Versailles sous prétexte de retrouver sa mère.
Cinq jours dans la maison de Desrues avaient suffi pour altérer profondément la santé du jeune de la Motte., Lorsqu’il se mit en route pour Versailles, il était pâle, abattu, il marchait avec peine, et ses membres tressaillaient agités par des frissons fiévreux. Desrues le réconfortait de son mieux, en lui assurant qu’il allait voir sa mère qui viendrait probablement au devant d’eux au bout de l’avenue de Paris. Chemin faisant, il lui insinua qu’il ne faudrait pas cependant s’inquiéter s’il ne la trouvait pas à la descente de voiture ; il lui représenta que madame de la Motte, très occupée du soin de lui ménager une charge à la cour, ne pourrait peut-être pas disposer d’un instant pour embrasser l’enfant qui lui était si cher ; il le conduisit à l’auberge de la Fleur-de-Lys, où madame de la Motte devait, disait-il, venir le trouver, et l’ayant placé au coin d’un bon feu, il sortit pour se mettre à la recherche d’une chambre.
Il en trouva une dans la rue de l’Orangerie, chez un tonnelier nommé Pecquet. Il se donna à cet homme pour un nommé Beaupré, qui venait à Versailles avec son neveu qu’il allait faire entrer aux bureaux de la guerre ; il convint avec lui de trente sols par jour pour prix de la chambre, et il y conduisit le jour même le jeune de la Motte, auquel il affirma que sa mère, ainsi qu’il l’avait présumé, se trouvait trop absorbée par les affaires pour venir le voir le jour même.
Le lendemain de cette installation le jeune homme allait beaucoup plus mal que la veille. Desrues avait déjà eu soin de prévenir la femme de son hôte qu’il redoutait une petite vérole pour son neveu, mais que, Dieu merci, étant médecin, il espérait bien triompher du mal et l’empêcher d’aboutir. En même temps, et afin, disait-il, de ménager la
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