Métronome
remplacement de l’ancien oratoire, que certains jadis pensaient même être la tombe de saint Denis.
Après sainte Geneviève, une autre célèbre pénitente fréquenta ces lieux : Jeanne d’Arc. Une statue rappelle que la Pucelle vint prier ici le 7 septembre 1429, espérant libérer Paris du joug anglais et bourguignon. Cette fois, elle échoua dans sa tentative et fut blessée à la cuisse au cours des combats.
L’église actuelle date en grande partie du XVIII e siècle, les seuls vestiges de l’église primitive de 1204 – qui ont donc vu prier Jeanne – sont les quatre premières travées de la nef, séparées du reste par des piliers ronds.
Le village ancien se situait derrière la station de métro, au niveau de la place Paul-Éluard, au bout de l’avenue Marx-Dormoy. Petit endroit, car le village était un village-rue, peu étendu, très modeste, mais si prestigieux.
*
* *
En ce X e siècle, l’importante foire du Lendit déménage : elle quitte le bourg de Saint-Denis, où elle se déroulait jusque-là, pour se rapprocher de Paris. Elle s’établit quasiment à mi-chemin de l’abbaye et de la ville : au village de La Chapelle, sur l’emplacement de l’actuel rond-point de La Chapelle.
Lendit… ce terme nébuleux serait tiré du latin indictus , qui signifie fixer, notifier. Chaque mois de juin, durant quinze jours, des milliers de marchands arrivés de toute la Francie, mais aussi de Provence, de Lombardie, d’Espagne ou de Constantinople, se donnent rendez-vous pour proposer étoffes, moutons, herbes, épices, parfums et – ce qui est plus rare – feuilles de parchemin ! Du coup se précipitent à La Chapelle les maîtres en toges noires, qui exercent leur art dans les écoles ouvertes à l’intérieur des monastères, mais aussi dans les institutions établies sur la montagne Sainte-Geneviève en dépit de l’indignation de l’évêque de Paris. Enseignement libre ou religieux ? Déjà le débat est entamé, mais tous ont besoin du précieux support des parchemins importés d’Orient, tous se retrouvent côte à côte au Lendit pour faire leurs emplettes.
La foire de La Chapelle attire également une foule mêlée venue acheter quelques provisions ou simplement admirer les boutiques temporaires, à la fois proprettes et élégantes, si différentes des tristes ouvroirs de Paris. On se presse ici comme au spectacle, pour voir se déployer la grande scène du monde… C’est un peu l’air d’ailleurs que l’on respire à travers ces couleurs et ces odeurs. On s’étonne devant la richesse des soies, on admire les funambules, les cracheurs de feu, les danseurs et les joueurs de fifres, ils sont si joyeux ! Et puis, au milieu des boutiques, dans une baraque de bois, se tient l’abbé de Saint-Denis, raide, grave, le sourcil froncé. Il est là pour juger, trancher et apaiser les controverses qui ne manquent pas d’opposer commerçants et clients.
Chaussures dorées, les jambes enveloppées dans des tissus colorés, veste de laine ou de lin joliment tissée, glaive sur le côté et canne à la main, manteau court bleu ou vert, les riches messieurs sont accompagnés de leurs dames. Celles-ci ont chaussé des bottines qui les protègent de la boue et de la poussière des rues, elles ont revêtu deux tuniques, une courte et une plus longue, mauves, violettes ou rebrodées d’or, et la mode veut que le cheveux soient couverts d’une petite écharpe. Face à ces couleurs déployées par les Parisiennes et les Parisiens aisés, les paysans et les artisans portent des habits plus ternes, gris, beiges, marron, car ils ne sauraient rivaliser avec le bon goût luxueux des belles dames et des gentilshommes.
Qui a hérité de la foire du Lendit ?
Avec le développement de l’université parisienne, au XIII e siècle, la foire du Lendit – et sa vente de parchemins – devint une fête pour les maîtres et leurs élèves. Le matin de l’ouverture, dès l’aube, on voyait les étudiants se réunir sur la montagne Sainte-Geneviève. Ils se formaient en compagnies pour se mettre en marche au son des fifres, des trompettes et des tambours, puis se dirigeaient joyeusement vers La Chapelle. Une belle fresque de ce joyeux défilé est visible dans la cour de la Sorbonne.
En 1444, la foire retourna à Saint-Denis en raison des désordres commis par les étudiants. Plus tard, le Lendit se mua en foire aux bestiaux, puis au XIX e siècle en fête foraine dite « fête
Weitere Kostenlose Bücher