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Métronome

Métronome

Titel: Métronome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lorànt Deutsch
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n’avaient plus de fonctions, tombèrent sous les pioches des ouvriers pour permettre la construction d’hôtels particuliers et de quelques maisons locatives destinées à des artisans.
    Pendant la Révolution française, la forteresse du Temple fut transformée en prison. Louis XVI et sa famille y furent incarcérés, le petit Louis XVII y mourut le 8 juin 1795.
    Quant à l’église du Temple, elle fut vendue en 1796 à un particulier qui la fit raser. Restait le donjon, devenu lieu de pèlerinage pour les royalistes. Napoléon, agacé par le culte rendu au monarque guillotiné, ordonna la destruction de la tour par un décret de 1808.
    Aujourd’hui, le souvenir des Templiers vit sur les plaques émaillées bleues encadrées de vert : boulevard du Temple, rue du Temple, square du Temple, rue Vieille-du-Temple. Pas si vite ! En entrant au 73 de la rue Chariot, dirigez-vous vers la gauche, vous verrez le dernier vestige de l’Enclos, une tourelle du XIII e siècle. Rien n’est prévu, pour l’instant, pour la mettre en valeur ; mais, en septembre 2009, un programme de fouilles autour du Carreau du Temple pourrait, je l’espère, la remettre un peu en lumière.
    Le procès qui s’ouvre pour juger les Templiers est écrit à l’avance. Sous la torture, des aveux sont extorqués à des malheureux prêts à confesser tous les péchés du monde. L’Inquisition est appelée à l’aide, et elle sait y faire : elle brise les os, brûle les chairs, arrache les bras, disloque les chevilles, écrase les génitoires avec une science consommée.
    Sodomie et hérésie constituent l’essentiel des accusations, et des peines légères sont promises à ceux qui acceptent de se déclarer coupables.
    Le 18 mars 1314, Jacques de Molay, grand maître du Temple, et trois autres dignitaires sont extraits de leurs cellules et traînés sur le parvis de Notre-Dame où ils doivent entendre la sentence prononcée contre eux. Les quatre hommes avancent revêtus de loques crasseuses, cheveux et barbe en bataille… À la vue de ces prisonniers détruits par sept ans d’humiliations et de supplices, la foule qui se presse laisse échapper un long murmure de compassion. Selon un scénario bien réglé, les Templiers déchus confessent leurs crimes et leurs fautes. En fait, ils récitent la leçon qu’on leur a apprise en échange d’une peine légère.
    Mais voilà que les juges condamnent les accusés à la prison à perpétuité ! À ce moment, Jacques de Molay se redresse, il n’est plus la pauvre victime résignée, il redevient le maître, et sa voix ferme s’élève sur le parvis. Face au peuple de Paris, il clame son innocence, il hurle :
    — Les crimes dont on m’accuse ne sont que mensonges ! La règle templière est sainte, juste et catholique. Oui, je mérite la mort parce que dans mon indignité, dans la crainte des tourments qui m’accablaient, trompé par le pape et le roi, j’ai prononcé de fausses confessions !

Hugues de Pairaud, autre autorité du Temple, rendu audacieux par l’exemple, proteste à son tour, jure de son innocence, dénonce les tortionnaires et renie ses aveux…
    Un frisson d’effroi parcourt la foule. Ces hommes que le pouvoir présente comme de pervers violeurs et blasphémateurs apparaissent soudain pour ce qu’ils sont : des êtres désemparés, tombés dans les rets du filet tendu par Philippe le Bel.
    Le mouvement de la multitude est lent comme une houle, mais assez perceptible pour faire blêmir les cardinaux. Les gens de Paris s’avancent, ils s’approchent de l’estrade où trônent les prélats, et ils ont des gueules mauvaises : les Parisiens n’aiment pas qu’on les trompe et qu’on leur mente. Les cardinaux sentent le danger, il faut en finir, et vite. Les accusés sont remis à la hâte au prévôt du roi, et qu’il se débrouille avec la sentence…
    Il faut apaiser la colère parisienne et terminer l’affaire. Le soir même, sur ordre royal, Jacques de Molay est brûlé vif sur l’île aux Juifs, petite langue de terre posée sur la Seine face au palais de la Cité.
    On attache le condamné au poteau et il demande qu’on le tourne vers la cathédrale Notre-Dame, afin de mourir avec dans les yeux l’image de la foi.
    — Les corps sont au roi de France, mais les âmes sont à Dieu, dit-il avant que les flammes ne ronronnent.
    Selon le témoignage du chroniqueur Geoffroy de Paris, témoin de la scène, le maître des Templiers lance alors une

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