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Mon frère le vent

Mon frère le vent

Titel: Mon frère le vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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tout à gagner à le laisser parler.
    Il perçut le regard furibond de Roc Dur mais lui tourna le dos et suivit les Ugyuuns.
    Une fois à l'intérieur d'un ulaq, les hommes s'accroupirent près d'une lampe à l'huile. D'un coin sombre, une femme vint, jeune et belle ; son suk aurait pu être confectionné par Chagak, avec ses points compliqués et ses plumes magnifiques.
    Tandis que les yeux de Waxtal s'accoutumaient à l'obscurité, il observa l'intérieur du logis. Tout était propre et ordonné, ce qui l'étonna. Ce n'était pas la première fois qu'il pénétrait dans une demeure Ugyuun. Tout y était généralement entassé n'importe comment et il y régnait une odeur de bruyère pourrissant sur le sol et une puanteur de vieux poisson épaisse comme de la fumée. Cet ulaq, au contraire, fleurait bon la bruyère fraîche, l'ivraie nouvellement tissée et la viande qui cuisait. Les mèches des lampes à huile étaient épointées et même à l'autre bout de la pièce, il constatait que le rideau de la cache de nourriture était renflé.
    — Je suis Aigle. Voici Petite Plante, mon épouse, dit l'Ugyuun. Bienvenue dans mon ulaq.
    Waxtal hocha la tête puis prit un bâton de viande séchée dans un récipient que la femme lui tendait.
    — Vous possédez une belle demeure, remarqua Waxtal. Vous avez eu des chasses bienheureuses cet été.
    — Ce fut un bon été, dit l'homme qui sourit à sa femme.
    Elle posa une main sur son ventre et Waxtal se demanda si elle portait un enfant. Il leva les yeux sur l'épaule de son suk et remarqua un morceau d'ivoire qui y était cousu. Son ventre se serra instantanément et il eut la bouche sèche. La figurine représentait un guille-mot aux ailes déployées.
    L'œuvre de Kiin. Qui ne reconnaîtrait son travail ? Chaque sculpture était si... si... que dire ? Achevée. Comme si le couteau savait ce qui était nécessaire, quelles lignes, quelles courbes — et s'y tenait.
    — Troquerez-vous donc contre de l'eau et de la viande fraîche ? s'enquit Aigle.
    — Oui. Contre ce dont nous avons besoin ainsi que d'autres choses. Ça, ajouta-t-il en levant la main. Que demandez-vous pour cela ?
    La femme referma la main sur la figurine et regarda son mari avec angoisse.
    — Ce n'est pas à vendre, dit Aigle.
    Waxtal inclina la tête de côté et se resservit en viande.
    — Alors peut-être me direz-vous où vous l'avez eu. Peut-être pourrais-je trouver le sculpteur et en obtenir un semblable.
    L'homme sourit sans répondre.
    — Un ventre d'huile, proposa Waxtal.
    — De phoque ou de lion de mer ?
    — Un ventre de lion de mer.
    L'homme interrogea sa femme du regard et, un long moment, ils se contemplèrent en silence. Elle dit enfin :
    — C'est un Chasseur de Baleines, pas un Morse.
    Son époux acquiesça.
    — Le sculpteur est une femme, dit Aigle. Elle est des Premiers Hommes. Elle vit avec son mari et son fils sur la plage des Commerçants, seulement à deux jours d'ici.
    — Mais, intervint la femme, si tu vas chez les Chasseurs de Morses, ne leur parle pas d'elle. Elle y a des ennemis.
    — Des ennemis ?
    Mais la femme eut un regard inquiet et pinça les lèvres, refusant d'ajouter un mot.
    Cette nouvelle fut comme du sable sur la peau de Waxtal. Kiin — quel père possédait pire fille ? Déjà, elle avait quitté le Corbeau et était retournée à Samig. Comment lui, Waxtal, pouvait-il demander au Corbeau de l'aider? C'est alors qu'un sourire se dessina lentement sur son visage.
    — Les Chasseurs de Morses ne savent pas où elle est?
    La femme Ugyuun secoua la tête.
    — Ne te tracasse pas, ajouta Waxtal. Je ne leur dirai jamais.
    91
    P remiers H ommes
    Baie de Herendeen, péninsule d'Alaska
    Kiin aperçut Longues Dents alors qu'il était encore dans la baie. Elle le salua de la main, il en fit autant. Mais quand il accosta, il tira son ikyak sur la plage en lui tournant le dos puis garda ses mains et ses yeux occupés.
    Kiin attendit qu'il se tourne vers elle mais finit par perdre patience. Elle s'approcha de l'homme, hésita puis posa doucement une main sur son dos.
    — Ma mère ?
    Kiin crut un moment qu'il n'avait pas entendu, n'avait pas perçu sa présence, mais bientôt il releva la tête et affronta son regard. Kiin vit que les joues de Longues Dents étaient striées de larmes.
    — Elle est morte, dit-il entre deux sanglots.
    Kiin resta sans voix. Sa poitrine fut soudain froide et creuse.
    « Comment vais-je vivre sans ma mère ? fit en elle

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