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Mon frère le vent

Mon frère le vent

Titel: Mon frère le vent Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Sue Harrison
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elle inspira profondément.
    — Paniers, aujourd'hui, dit-elle assez fort pour que le soleil l'entende.
    Le soleil saurait qu'elle avait empli ses jours de travail, que ni ses mains ni son esprit n'étaient paresseux.
    — Kukutux ! Kukutux !
    Elle reconnut la voix de Roc Dur et son cœur battit à tout rompre. Les femmes bavardaient entre elles, prétendant que cet homme, leur chef, prendrait bientôt une cinquième épouse.
    Kukutux avait essayé de ne pas se laisser aller à espérer un tel honneur. Cinquième épouse ! se tança-t-elle. Tu fus première épouse d'un bon chasseur. Et tu espères maintenant être cinquième ?
    Mais avec si peu d'hommes restants chez les Chasseurs de Baleines, quelle femme ne se réjouirait d'être une cinquième épouse ? Même celle-ci avait l'espoir d'enfanter des fils. Et si la nourriture était parcimonieuse, la portion d'une cinquième épouse ne serait pas plus maigre que ce que Kukutux recevait — des reliefs donnés par des femmes qui avaient pitié d'elle.
    Aussi respira-t-elle profondément pour s'avancer vers Roc Dur.
    — As-tu besoin de quelque chose ? s'enquit-elle avec une politesse qui la fit trembler.
    En même temps, elle se dit : « N'oublie pas qu'il est souvent en colère. » Quelle femme veut un mari toujours furieux ? Malgré tout, son cœur tremblait d'espoir.
    — Tu as une bonne vue, dit-il. Meilleure que la plupart.
    Kukutux leva le menton. Depuis son enfance, elle possédait ce don de voir des aigles quand les autres ne voyaient que le ciel.
    — Regarde dans cette direction. Que vois-tu ?
    Kukutux se protégea les yeux de la main, oubliant la
    douleur habituelle.
    — Deux ikyan, dit-elle enfin.
    Roc Dur hocha la tête.
    — Non, dit Kukutux en plissant les yeux. Un ik, un ikyak.
    Roc Dur ferma les mains sur sa canne. Kukutux leva le regard sur lui. Ses yeux étaient durs et plats comme un galet noir et elle n'y lut rien.
    — Guette des marques, ordonna-t-il.
    — L'ik porte des marques jaunes et rouges, dit-elle au bout d'un moment.
    — Un commerçant, marmonna Roc Dur dans un souffle. Tu as des paniers ? Les femmes ont-elles des paniers à troquer ou des ventres de poisson séché, des rideaux d'herbes ?
    — Quelques-uns, répondit Kukutux.
    — Que fais-tu de tes journées ? Tu n'as plus de mai i à t'occuper.
    — Comment pouvons-nous tresser, à ton avis ? La cendre a détruit presque toute notre herbe à paniers.
    Roc Dur s'éloigna en grommelant sur la paresse des femmes.
    — Alors, que vas-tu dire à ces commerçants, Ro: Dur ? demanda Kukutux laissant sa colère parler bien qu'elle sache qu'il était trop loin pour entendre. Que les Chasseurs de Baleines n'ont rien pris cette année ? Qu'ils sont une tribu de femmes ?
    Waxtal déplaça son pied de façon à sentir la défens.e partiellement gravée au fond de son ikyak. Il avait vou 'u la finir avant d'atteindre le village des Chasseurs de Baleines, mais l'hiver avait été consacré aux tâches de
    femmes : raccommoder les parkas, attraper et préparer le poisson, s'occuper des lampes à huile. Quel homme pouvait passer une soirée à sculpter après une journée de tâches féminines ? Mais il gardait ses doléances dans sa bouche. Il avait à manger et un endroit où vivre. Il y aurait un temps pour sculpter et alors, une fois les défenses achevées, leur pouvoir serait total : Hibou et Œuf Moucheté feraient leur propre travail de femme.
    Même si les tempêtes avaient empêché les marchands d'atteindre l'île des Chasseurs de Baleines avant l'hiver, ils avaient eu suffisamment d'huile et avaient pris des lions de mer et des phoques, du poisson et des oiseaux. Ils avaient passé l'hiver sur une île abritée dont les grottes étaient chauffées de l'intérieur par les esprits des montagnes. Waxtal avait entendu des récits de tels lieux et savait désormais qu'ils étaient véridiques. Lui et les marchands avaient ainsi passé un bon hiver, à l'abri et avec de quoi manger.
    C'était enfin le printemps et ils étaient arrivés à destination. Waxtal balaya la plage du regard et pointa sa pagaie en direction des ulas qui dessinaient des bosses derrière la plage.
    — Vous voyez? s'écria-t-il à l'adresse des deux hommes. Le village.
    Il guida son embarcation vers le rivage, en tête, pour montrer où accoster. Il sortit de son ikyak et attendit que les autres en fassent autant.
    — Je vous avais bien dit que j'étais déjà venu !
    Mais il remarqua soudain que

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