Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Mon témoignage devant le monde-Histoire d'un Etat clandestin

Mon témoignage devant le monde-Histoire d'un Etat clandestin

Titel: Mon témoignage devant le monde-Histoire d'un Etat clandestin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jan Karski
Vom Netzwerk:
subie à Krakow au cours de l’année 1941. La Gestapo était convaincue de sa destruction complète, cependant nos pertes étaient inférieures à la moitié de ce qu’imaginait l’occupant.
    Je me trouvai dans le groupe retiré de Krakow : il fut décidé que je serais transféré à Warszawa où je reprendrais le genre de travail que je faisais en 1939, « un travail de liaison au premier degré ». Je devais prendre la direction d’une unité dont la tâche consisterait principalement à assurer la liaison entre les dirigeants politiques de la Résistance à Warszawa.
    La nécessité et l’importance du travail de liaison comportent les difficultés et les dangers inhérents à la conspiration. Son but est d’éviter les réunions trop fréquentes des principaux responsables. Il demande avant toute autre qualité une totale impartialité, de la bonne volonté et une conduite loyale et désintéressée. Les opinions et les sympathies personnelles ne doivent pas intervenir dans ce travail. Une violation de ces règles pouvait facilement provoquer des malentendus, des intrigues, des dissensions et des rivalités de toutes sortes. C’est-à-dire des comportements nuisibles à l’unité de la Résistance.
    Je me jurai d’accomplir cette tâche sans décevoir la confiance qui m’était accordée.

Chapitre XXI Une mission à Lublin
    Le premier problème que j’eus à résoudre, dès mon retour à Warszawa, fut la création d’une « légende » propre non seulement à ne pas éveiller la suspicion de la Gestapo, mais aussi à ne pas exposer ma famille et mes amis. La règle de la clandestinité exigeait de limiter le plus possible le nombre de gens dans la confidence de ce que l’on faisait, d’abord pour préserver sa propre sécurité, mais surtout dans l’intérêt de l’organisation. Ceux à qui je pouvais me confier devaient être soigneusement sélectionnés et ne pas être jugés simplement du point de vue de leurs bonnes intentions ou de leurs sympathies pour notre cause, mais d’après leurs capacités à la servir, à se taire, à ne pas donner prise à la négligence ou aux nombreuses méthodes employées par la Gestapo.
    Trois de mes frères et une sœur habitaient à Warszawa. Je n’avais pas revu ma sœur et n’avais pas communiqué avec elle depuis ma visite à son appartement, après mon évasion du transport de prisonniers, en novembre 1939. J’en avais eu quelques nouvelles depuis, et je m’attendais à la trouver dans de pires dispositions qu’alors. Son mari avait été assez fortuné et, du point de vue matériel, elle était encore relativement à l’aise, mais elle restait désespérée et inconsolable. Elle s’était complètement retirée de la société et se refusait à voir ses amis et les membres de sa famille. J’étais certain que ce serait une erreur d’aller la voir.
    Mon frère aîné, Marian, chez qui j’avais reçu mon ordre de mobilisation au matin du 24 août 1939, était un homme sur qui je pouvais entièrement compter. Il savait presque tout à mon sujet. Nous étions restés en contact par l’intermédiaire de connaissances communes. Nous nous étions même rencontrés une fois à Warszawa dans le cadre de la Résistance. Mon frère avait été arrêté au cours de la deuxième année d’occupation et envoyé au camp de concentration d’Oswiecim, lequel – par un étrange coup du sort – avait été créé dans la caserne de mon ancienne unité militaire. Par miracle, il en a été libéré. Parfois il me racontait ce qu’avait été sa détention. Les Allemands avaient transformé cette ancienne caserne en un des plus terribles lieux de la terre. Il m’avait raconté, sur ce camp, des histoires qui dépassaient en horreur toutes celles que j’avais entendues par ailleurs. Les gardiens étaient pour la plupart des dégénérés, des criminels de tous types, des homosexuels, choisis délibérément. Les criminels en particulier avaient été stimulés par la promesse d’une clémence proportionnée à la cruauté qu’ils déploieraient à l’égard des détenus cix .
    Marian avait quarante-huit ans. C’était un homme cultivé, expérimenté et compétent. Il occupait une fonction importante dans l’appareil central de la Délégation du gouvernement en exil et en savait bien plus que moi sur le fonctionnement interne de la Résistance. Bien que les contacts avec la famille et les proches aient été mal vus au sein de la

Weitere Kostenlose Bücher