Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Monestarium

Monestarium

Titel: Monestarium Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
Vom Netzwerk:
préoccupation. Je m’emploie à
vous seconder, bien modestement, mais de toute mon âme.
    L’autre grommela une insulte.
L’appréhension gagna Jaco. Il se complotait quelque chose dont il avait été
tenu à l’écart, preuve que sa vie ne tenait plus qu’à un fil. Éloi était
derrière tout cela, or cette gale d’homme lui écraserait la tête avec délice
s’il en avait l’occasion. Le Ribleur feinta :
    — Les plus grands, de César à
Néron, sont tombés à l’issue de stratagèmes déloyaux, souvent ourdis par leurs
proches.
    — Hein ? Nez quoi ?
    Jaco décida de ne pas s’appesantir
sur les connaissances qu’il avait acquises grâce à son ancien maître respecté.
Il n’en voulait plus au vieillard de l’avoir contaminé depuis que Pauline était
sauve. Au fond, les années passées à son service avaient été les seules durant
lesquelles Jaco s’était senti un homme libre.
    — Les plus grands empereurs,
les plus intrépides combattants ont toujours été trahis par des ambitieux sans
envergure qui voulaient récupérer, à peu de frais et de risques, ce que leurs
prédécesseurs avaient bâti. Ainsi va le pouvoir.
    — Si t’as qu’ec chose à sortir,
crache-le ou étouffe-toi avec ! rétorqua l’Ours.
    — Il se murmure de bien
vilaines choses, seigneur.
    La grosse paluche de l’Ours
s’abattit sur son col, et il se sentit soulevé de terre par une poigne sans
aménité.
    — Crache, j’te dis !
    Jaco râla. L’autre le lâcha. Il
détestait ce barbare sans cervelle. L’Ours était de ces bêtes féroces qui
fascinent les populaces, les entortillent par leur grande gueule et leur vue
courte pour les pousser au chaos et au carnage. Il lui vint l’envie de défaire
les deux compères qui faisaient régner la terreur sur le clos des
lépreux : l’Ours et Éloi. Une seule certitude l’arrêta : un autre
prendrait aussitôt leur place et se vengerait à son tour sur les plus faibles
des humiliations qu’il avait dû digérer.
    — C’est-à-dire… j’ai laissé
traîner mes longues oreilles pour vous servir. N’accordez pas votre confiance à
ceux qui vous flattent pour mieux vous abattre.
    — Tiens donc ! Ceux qui
m’flattent ? Et toi, l’asticot, tu me prendrais pas pour plus benêt que
j’suis ?
    — Jamais ! s’offusqua
Jaco. D’ailleurs, à quoi me servirait de vous nuire ? Je ne suis pas de
taille à prendre votre place. Regardez-moi ces muscles, fit-il en pliant le
bras, ne dirait-on pas ceux d’une pucelle ?
    — Et d’une pucelle maigrelette,
gloussa l’autre, satisfait par la maigre bosse des biceps de son bouffon.
    — Je me ferais égorger en un
rien de temps. Alors que vous me protégez. Où serait donc mon avantage ?
    La pertinence de cette démonstration
se fraya un chemin dans l’épais cerveau de Célestin l’Ours. Pourtant, il
argumenta :
    — Ceux-là don’c’tu causes,
y’z’ont qu’à tenter d’m’embrocher !
    — Que nenni, ils auraient trop
peur de vous manquer et d’encourir votre fureur. Mieux vaut utiliser la ruse…
C’est du moins ce que je ferais à leur place.
    — Qué ruse ?
    — Je ne sais, mon maître. Il en
est tant. Vous pousser à commettre une erreur qui vous mettrait en grand
danger, par exemple. D’autant que si le coquin d’ambitieux est assez malin, il
prendra soin de m’écarter avant de votre conseil. Tous savent bien que je me
démène pour affermir votre règne. N’y voyez pas que de l’admiration de ma part.
Il s’agit aussi d’intérêt. Vous êtes ma dernière chance de rester sauf. Si par
exemple Éloi, qui ne me porte guère dans son cœur, venait à vous succéder, je
ne donnerais pas cher de mes abattis.
    Une lueur méfiante s’alluma dans le
regard de Célestin. Il hésita, puis :
    — Ben… C’te l’Éloi, justement,
qu’a un plan pour nous sortir de c’trou maudit.
    — Une évasion ou un autre
soulèvement ?
    — L’deuxième. Mieux préparé
c’te fois. Avec des armes. Pas de quartier. On sort. Si on nous empêche, on
tranche dans la barbaque.
    Une sueur glacée dévala dans le dos
de Jaco. Le comte ne reviendrait jamais sur sa parole concernant Pauline. De
cela, il était certain. Il avait rempli sa part de marché en fomentant le
premier soulèvement, Aimery de Mortagne avait rempli la sienne. Pourtant, Jaco
imagina. Il vit des moniales pourchassées comme des proies par les brutes qu’Éloi
aurait chauffées à blanc. Il les vit renversées,

Weitere Kostenlose Bücher