Montségur et l'enigme cathare
fondée la
Société du Souvenir et des Études cathares, qui devait se développer et devenir,
même après la disparition de Roché, un instrument inappréciable de la recherche
scientifique sur le catharisme. Il y a là une volonté nettement exprimée de
retrouver les sources du catharisme et aussi ses prolongements visibles et invisibles.
Mais tout cela s’accomplit dans le respect des disciplines scientifiques et
avec toutes les précautions d’usage, même si des hypothèses hardies ont pu être
formulées.
Déodat Roché avait orienté sa quête personnelle vers ce qu’il
pensait être une voie initiatique, consistant à substituer la certitude à la
foi, grâce à des exercices spirituels qui ouvraient sur des horizons ignorés du
plus grand nombre. Dans cette quête, il s’était appuyé sur la philosophie de Rudolph
Steiner, ce personnage envoûtant et passionnant qui avait fondé l’École d’Anthroposophie
à la suite de ses différends d’ordre intellectuel avec les chefs de la Société
de théosophie. Il faut reconnaître à Rudolph Steiner, en dehors de ses dons
réels et de sa vision intérieure, une grande
honnêteté allant jusqu’aux scrupules les plus minutieux. Il n’avait pas
apprécié les tendances fâcheuses de la Société de théosophie à accepter d’emblée
toutes les doctrines soi-disant secrètes et la soumission des théosophes à la
tradition extrême-orientale. Steiner prétendait que l’Occident avait sa propre
tradition et qu’il suffisait de la retrouver. On comprend que Déodat Roché, formé
à cette école, eut le souci de contribuer à la connaissance de cette tradition
occidentale en étudiant le catharisme et en lui redonnant une certaine
actualité. Déodat Roché, convaincu, comme Steiner, que tout est en nous, a œuvré
de manière fort utile à cette renaissance du catharisme, à la fois dans les
cercles dits occultistes, mais aussi dans l’esprit du grand public, ainsi que
dans la région elle-même. De ce fait, il mérite l’admiration et le respect de
tous ceux qui cherchent honnêtement à savoir qui étaient les Cathares.
Tel n’était pas Antonin Gadal, président du Syndicat d’initiative
d’Ussat-les-Bains, modeste instituteur en retraite, très influencé par une
théosophie d’ailleurs fort mal assimilée par cet ancien agnostique. Certes, il
était amoureux de sa région, prêt à tout pour la mettre en valeur, dans le plus
complet désintéressement matériel. Il était aussi un de ces rêveurs impénitents
dont parle René Nelli.
Antonin Gadal était né dans le Sabarthès, en cette haute vallée
de l’Ariège où les grottes ont gardé le souvenir de bien des époques passées. Dans
sa jeunesse, avant la Première Guerre mondiale, il avait fait la connaissance d’Adolphe
Garrigou, qui avait consacré son existence à des recherches archéologiques et
scripturaires sur le problème du catharisme. Enthousiasmé par Garrigou, Gadal
devint son disciple passionné. Mais il ne se contenta pas de faire des
recherches, d’explorer les grottes, de méditer sur la Gnose médiévale. Il « inventa »
le Saint-Graal pyrénéen d’après quelques vagues études sur Wagner et Parzival , publia une biographie d’Adolphe Garrigou
et une sorte de roman historique sur l’initiation cathare telle qu’il l’avait
rêvée. Plus tard, il publia un ouvrage intitulé De l’héritage
des Cathares dans lequel il désignait explicitement ceux qu’il pensait
être les actuels héritiers de la tradition cathare : les Rose + Croix
de Hollande, que l’on connaît actuellement sous le nom d’École Spirituelle de
la Rose + Croix d’Or. Déjà, l’étonnant poète Maurice Magre avait
relié les Rose + Croix aux Cathares, et avait prétendu que Kristian
Rosenkreutz, fondateur des rosicruciens, était un initié cathare instruit par
des Albigeois réfugiés en Allemagne. En dehors du fait que Kristian Rosenkreutz
est une figure mythique, cette filiation n’a rien d’absurde, a priori. Et c’est
pourquoi, à Ussat-les-Bains, se trouve un centre de repos et de méditation de
la Rose + Croix d’Or [21] . Les membres de cette
société philosophique entendent d’ailleurs, encore de nos jours, continuer l’œuvre
d’Antonin Gadal, décédé en 1966, et assumer l’héritage cathare. Ils ont
constitué à Ussat un musée Gadal, et ne manquent pas une occasion de rendre
hommage à la mémoire du « fidèle et inlassable divulgateur des
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