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Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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sourcilla pas. Tant que Nur al-Din ne le chassait pas, la partie pouvait encore être gagnée. À lui de trouver comment.
    — Vous êtes puissant, et tel le dragon sur sa montagne, vous ne voulez pas quitter votre aire. Mais vos ailes sont immenses. L’une d’elles pourrait, si vous le souhaitiez, atteindre l’Égypte, tandis que de l’autre vous balaieriez le royaume de Jérusalem, sans que votre corps ne bouge…
    — Ne me flatte pas. Je dois déjà refaire l’unité du monde arabe. Ensuite, je me soucierai des Francs. Et vous, les Fatimides…
    (Palamède sentait une présence dans son dos, autre que celle de Saladin. Qui cela pouvait-il être ?)
    — … Nous sommes à votre service, souffla-t-il. Et nous vous supplions d’intervenir, non pour mon père, non pour le calife al-Adid, non pour l’Islam, mais pour elle !
    Il sortit de sous son manteau un coffret en ivoire et le présenta à Nur al-Din.
    Saladin s’approcha, lui prit le coffret et l’apporta au sultan.
    Avant qu’il ne l’ouvre – et sûr de son fait –, Palamède se redressa, et tâcha de garder une attitude des plus humbles, car tout dans son être respirait, suintait, puait la dévoration – la puissance. Il était sur le point de l’emporter.
    « Allons, se dit-il. Savoure cet instant… Nous sommes peut-être la plus faible de toutes les factions, il n’empêche ! C’est nous qui manipulons les autres. Allons, profite ! Regarde plutôt comme ici le jour se teinte de bleu sous l’action du soir… » Il promena son regard sur les murs du jardin, où la lune s’amusait à découper silhouettes et formes inhumaines, rappels du ténébreux passé de Damas. Sans même s’en apercevoir, il s’était mis à caresser d’une main distraite le pommeau de son épée, et d’une voix atone il déclara :
    — Si les glaives de Dieu entrent en action, rien ne pourra leur résister.
    Cette phrase parut attirer l’attention de Nur al-Din, qui leva les yeux dans sa direction – après avoir regardé dans le coffret.
    — Qu’est-ce que c’est ? demanda le sultan.
    — Des cheveux, que Son Excellence le calife du Caire vous prie d’accepter, car ils appartiennent à la plus précieuse, la plus fragile et la plus menacée des personnes qui soient.
    — Mais de qui parlez-vous ?
    — De la femme qui n’existe pas.
    Il y eut un mouvement dans le dos de Palamède, et l’ombre qui jusqu’alors s’y était tenue se dévoila, et se jeta à son tour aux pieds du sultan. Il s’agissait de Chirkouh le Borgne, l’oncle de Saladin, le plus habile sabre de l’Islam, et surtout le père de la femme qui n’existe pas.
    — Ô splendeur de l’Islam, dit Chirkouh, consultez le Coran, et demandez conseil au Très-Haut… Je vous en conjure ! Il faut aller au Caire !
    Nur al-Din leva la main, le faisant taire. Puis, prenant des mains de son médecin, ibn al-Waqqar, un magnifique Coran, il l’ouvrit au hasard, et lut – à la stupeur de l’assemblée : « Si les glaives de Dieu entrent en action, rien ne pourra leur résister… »
    C’était la guerre. Dieu l’avait voulue.

47.
    « Dieu, son créateur, n’a donné à personne le pouvoir d’évoquer toute la beauté de cette jeune fille. »
    ( CHRÉTIEN DE TROYES ,
Cligès. )
    Morgennes se trouvait dans un jardin enclos de hautes murailles. Tamarins et baobabs, fiers et droits, aussi immobiles que des géants à l’affût, cocotiers et palmiers à la tige élancée, balançant sur les allées leurs ombres délicates, constituaient les étranges piliers de cette verte cathédrale. Marchant à l’ombre d’un rideau de bambous, Morgennes se dirigea vers le cœur du jardin, où il avait aperçu une forme.
    Une femme.
    Tout à sa broderie, elle était assise sur la margelle d’un puits. Sa tête, penchée sur ses mains dans une attitude pieuse, était couverte par un voile de couleur blanche. Il était impossible de distinguer ses traits. Était-elle belle ? Aussi curieux que cela paraisse, incontestablement, oui. Aussitôt, Morgennes éprouva une curieuse sensation de déjà-vu, comme celle qu’il avait déjà ressentie en présence d’Azyme, de Guillaume de Tyr – ou à l’évocation du nom de Massada. Surtout, il se sentit troublé. Pourquoi ?
    Parce que pour la première fois depuis longtemps, il avait l’impression d’être de retour auprès des siens. Pourtant, il ne voyait qu’un voile. Qui plus est, celui-ci couvrait probablement la tête de la

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