Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
Vom Netzwerk:
vieilli ? Était-il fatigué ? Las ?
    Toujours est-il que, plutôt que de rester dans son palais pour y recevoir les doléances de ses sujets, ou les ambassades de ses voisins, Nur al-Din s’était retiré dans l’une des mosquées de Damas. Il y passait ses journées à lire le Coran, et à en discuter le sens avec son médecin particulier, le docteur ibn al-Waqqar (d’une maigreur encore plus inquiétante que celle de Saladin, parce qu’il était plus grand), et un savant venu de Perse, nommé Sohrawardi.
    En compagnie de ces deux doctes personnages, Nur al-Din parcourait les méandres de la parole divine, goûtant l’extase à chaque verset. Ses sujets ne voyaient pas cette activité d’un bon œil, car la science consistant à interpréter la parole divine rapprochait chaque jour un peu plus Nur al-Din des chiites – pour qui le Coran avait un sens caché. Mot après mot, verset après verset, Nur al-Din, Sohrawardi et ibn al-Waqqar avançaient, tels trois explorateurs en terre inconnue, cherchant le blanc où Dieu s’était dissimulé, ôtant au texte un voile que les musulmans orthodoxes – les sunnites – disaient n’existe pas.
    Mais Nur al-Din n’en avait cure. Quand il tenait le Livre entre ses mains, et qu’il en parcourait les pages, il était le plus heureux des hommes.
    — Maître ! Pardon de vous déranger, splendeur de l’Islam, mais il y a ici un visiteur qui demande à s’entretenir avec vous…
    Nur al-Din ouvrit les yeux, et vit son cher Saladin, genou à terre en face de lui.
    — Relève-toi, fils (ainsi appelait-il ceux qu’il aimait). Dis moi ce que tu veux…
    — Le visiteur que voici, fit Saladin en montrant Palamède derrière lui, est venu depuis Le Caire pour…
    — Approche, coupa Nur al-Din.
    Palamède s’avança, courba la tête et s’agenouilla, mains écartées. Il s’agissait maintenant de faire preuve de la plus grande humilité. Quelques années plus tôt, son propre père, Chawar, était venu trouver le sultan à Damas pour lui demander, avant de le trahir, la même chose que ce qu’il venait chercher aujourd’hui… Il fallait se montrer repentant, et humble, très humble… Palamède se dit que ce ne serait peut-être pas une très bonne idée que d’accabler le sultan de richesses, puisqu’il le trouvait, non pas dans la Grande Mosquée de Damas, mais dans une petite mosquée, tranquille et noble, située au milieu d’un jardin d’arbres fruitiers. Des cris d’oiseaux, les branches des arbres agitées par le vent, le ruissellement de plusieurs minuscules cours d’eau, faisaient un rempart aux bruits de la ville. En vérité, hormis leurs paroles et les sons du jardin, on aurait dit que cette humble mosquée servait d’abri au silence.
    Palamède se jeta brusquement aux pieds de Nur al-Din, et lui lança :
    — Pardon ! Mon père – le noble, et cependant bien menacé, vizir Chawar – vous supplie de lui venir en aide. En échange, il vous envoie ma tête, que je vous prie d’accepter. La voici…
    Nur al-Din le regarda d’un air amusé. Sa tête ? Elle ferait peut-être un bien joli trophée, comme celle de ce chevalier blond qu’il avait, quelques années auparavant, envoyée en cadeau au calife de Bagdad dans un superbe céphalotaphe en argent. À moins qu’il ne s’en serve pour l’une de ces parties de polo, qu’il avait tant aimé disputer, autrefois, avec Saladin. Mais il ne jouait plus. Et ce n’était pas d’une tête dont il avait besoin, mais de paix. Pour méditer.
    Or cet individu le dérangeait. Sa langue était fourchue comme celle des serpents, sa peau tannée comme celle des crocodiles, et ses ongles lui rappelaient les formidables griffes de ce même reptile, dont les momies avaient autrefois fait fureur, ici, à Damas.
    — Que veux-tu ?
    — Le roi des Francs, Amaury, marche sur l’Égypte. Cinq cents Hospitaliers l’accompagnent. Nous le soupçonnons de vouloir nous soumettre…
    — Ne l’êtes-vous pas déjà ?
    — Non. En partie seulement… Mais c’était pour mieux le tromper, car nous n’aspirons qu’à une seule vérité, qui est celle de l’islam…
    — Continue…
    — Deux musulmans peuvent avoir une vision divergente d’une même situation. Il suffit que ces deux visions respectent également la charia. C’est pour cela que j’en appelle à votre grandeur d’âme.
    Une ombre bougea derrière Palamède, qui sentit une brise souffler sur son cou. Mais il resta coi, et ne

Weitere Kostenlose Bücher