Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
Vom Netzwerk:
être humain normalement constitué ne peut atteindre les Monts de la Lune sans se perdre lui-même. Et comme il est impossible de passer par la côte orientale…
    — Pourtant, je me rappelle avoir consulté à Alexandrie les travaux de Marin de Tyr, dont Ptolémée s’est inspiré, et qui mentionnaient ces montagnes, la source du Nil et la Queue du Serpent… Il y était même fait mention de ces marécages, mais pas de cette particularité.
    — Et pour cause ! Ceux qui s’y sont risqués l’ont oubliée ! En vérité, rares sont ceux à s’y être rendus et à en être revenus… Certaines personnes, pourtant, y vont de temps en temps, dans le plus grand secret.
    — Des chasseurs de dragons ?
    — Non. Des artistes, et des cuisiniers.
    Morgennes eut l’air surpris.
    — Ces champignons en forme de petite lune spongieuse, qui poussent dans ces marécages, sont très prisés par les amateurs de thé. Ils donnent, quand on les infuse, une saveur spéciale à ce « thé des dragons », ainsi nommé car on prétend que seuls les dragons peuvent l’ingérer sans mourir ! On raconte aussi qu’il rend immortel, mais ce n’est qu’une légende. Personne ne l’a jamais vérifiée…
    Morgennes, qui avait bu de ce thé à Constantinople, ne fit aucun commentaire. Mais il comprit mieux maintenant pourquoi il avait failli succomber à l’ingestion d’une simple tasse de thé. Ce qu’il comprenait moins, c’était pourquoi il avait survécu. Et pourquoi Constantin Coloman en buvait chaque jour…
    — En plus des champignons, ne sont-ils pas intéressés par les papillons noirs et blancs, dont ces marais pullulent ?
    — Absolument, fit Nicéphore. Comment le sais-tu ?
    — J’ai de bonnes raisons de penser que mon père et l’un de ses amis sont venus dans ces marais, il y a des années de cela. Je crois qu’ils en ont rapporté plusieurs petits champignons, ainsi que de la poudre de papillon… Qui a servi depuis à peindre des icônes, ou a été donnée en infusion à certaines personnes, dont ma mère. Mais comment ont-ils fait pour ne pas succomber à la malédiction des marais ?
    — Peut-être utilisaient-ils une armure spéciale ? D’antiques gravures montrent Alexandre le Grand descendant dans les eaux du port de Tyr à bord d’une cloche de cristal. Qui sait ? Peut-être une sorte de bulle de cristal, posée sur leur tête, leur a-t-elle permis de ne pas respirer l’air empoisonné des marais…
    — Fascinant ! s’exclama Morgennes.
    — Je crains que tout cela ne soit plus pour moi, soupira Marie. Nicéphore est loin, maintenant. Les marais l’ont englouti. Et il ne reste plus que moi, Marie…
    Pendant un instant, elle parut chanceler, et se passa la main sur le front.
    — Allons, levez-vous, princesse ! lui lança Gargano. Allez vous restaurer, et laissez-moi expliquer à Morgennes comment nous avons fait pour nous retrouver là.
    Marie ne se le fit pas dire deux fois, et quitta son siège. Elle marcha jusqu’au feu de camp, où elle saisit une tranche d’autruche, qu’elle attaqua de bon appétit.
    — Il faut que tu comprennes, dit Gargano en plaquant quelques délicats accords sur les touches de l’orgue, que pour une raison que nous ignorons, cet orgue – dont nous ne cessons de jouer depuis notre naufrage – nous épargne les pertes de mémoire. Tant que nous jouons, nous continuons d’être nous-mêmes… Alors nous jouons sans arrêt. Malheureusement, nous nous en sommes rendu compte trop tard, et nous n’avons pas pu éviter aux habitants de Crocodilopolis d’être réduits à l’état de fantômes, errant dans ces marais. Quand les premiers furent atteints, les autres, croyant qu’il s’agissait d’un maléfice lancé par Philomène, jetèrent tous ses pantins par-dessus bord…
    — Je les ai vus, dit Morgennes.
    — Ensuite, nombre des habitants de Crocodilopolis que nous avions engagés pour nous accompagner dans cette expédition, et qui étaient ravis de nous suivre à cause des liens les unissant au culte du Dragon, perdirent la tête à leur tour. Nous n’étions plus assez nombreux pour manœuvrer l’Arche, qui devint notre prison. Et deviendra notre tombe si tu n’y remédies pas. Enfin, alors que nous naviguions au quart de notre vitesse normale, le Nil amorça sa décrue. Et ce fut la fin. Nous nous sommes échoués ici. Et je ne nous vois pas attendre sa prochaine crue. Il faut que nous partions, et vite !
    Il montra à

Weitere Kostenlose Bücher