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Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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Morgennes l’une des touches cassées de l’orgue, ainsi qu’un tuyau à moitié tordu.
    — Il est en train de rendre l’âme…
    — Et c’est pour ça que vous comptez sur moi ? demanda Morgennes.
    — Oui. Dieu t’a mis sur notre route. Ta mémoire est si exceptionnelle que si nous nous dirigeons vers les Monts de la Lune, qui est le chemin le plus court pour quitter les marais, nous avons peut-être une chance d’en réchapper. Qui sait s’il n’existe pas un passage menant vers la côte orientale de l’Afrique, et que personne n’a découvert ?
    — Pourquoi ne m’avez-vous pas parlé de vos projets avant ? J’aurais pu vous aider !
    — Morgennes, un autre destin t’attendait. En outre, je te rappelle que tu rêvais d’être fait Templier, et donc chevalier. Et puis, nous devions garder notre mission secrète, car les ophites – nos pires ennemis – avaient des espions partout. En Khârezm, dans les monts Caspiens, à Constantinople, en Terre sainte, et bien sûr en Égypte. Eux qui ne rêvent que du Grand Dragon et de son retour, crois-tu qu’ils nous auraient laissé mener à bien notre projet ? D’ailleurs, ils ont gagné Philomène à leur cause, ce qui signa l’échec de notre expédition… Ainsi, leur dieu ne finira jamais dans une cage, au beau milieu du zoo de Constantinople.
    Gargano plaqua quelques nouveaux accords, qui vibrèrent un certain temps. Puis il tourna la tête vers une femme agenouillée dans la boue, regard éteint et mains posées sur les cuisses.
    — Qui est-ce ? demanda Morgennes. Que lui arrive-t-il ?
    — Une habitante de Crocodilopolis. Elle est en train de se changer en arbre. C’est un processus assez lent, mais malheureusement irréversible…
    Sur le conseil de Gargano, Morgennes s’approcha de la jeune femme. Ses cheveux et sa peau cuivrée commençaient à prendre une teinte végétale, mordorée. Elle gardait la tête baissée, et ne la leva pas quand Morgennes lui adressa la parole. Comme elle ne réagissait pas, il la toucha du bout des doigts.
    Elle était aussi froide qu’une plante. C’est alors qu’il vit ses genoux. Ils n’étaient pas simplement posés sur le sol – ils s’enfouissaient dans la boue, telles des racines. Regardant autour de lui, Morgennes s’aperçut qu’elle n’était pas la seule à se transformer en arbre. D’autres avaient les bras collés au corps ou étaient tordus dans des positions impossibles. Les crocodiles ne les attaquaient pas parce que ce n’étaient plus des êtres humains.
    Morgennes laissa tranquille ce qui avait été une femme, et fit quelques pas à l’intérieur des marais. Des arbres qu’il avait jusqu’à présent à peine regardés lui apparaissaient maintenant sous leur vrai visage. Dans leurs troncs, leurs racines et leurs branches, Morgennes voyait se dessiner, ici un bras, là une tête, ailleurs une jambe. Un torse figurait le départ d’une souche.
    Soudain, Morgennes repensa à Dodin. Dans quel état était-il ? Mettant ses mains autour de sa bouche, Morgennes appela encore :
    — Dodin ! Dodin !
    Allons, se morigéna-t-il, c’est inutile. « Si ça se trouve, il ne sait plus son nom… »
    Dieu avait eu sa revanche. Restaient, quelque part en France, Jaufré Rudel, et au Moyen-Orient, dans les geôles d’Alep, ce mystérieux Renaud de Châtillon – auquel il comptait bien rendre visite, un jour prochain.
    — À condition de quitter ces marais…
    Morgennes courut vers Marie Comnène, et lui demanda :
    — Comment se fait-il que je ne sois pas atteint ? Est-ce à cause de ma mémoire ? De la musique ?
    — Je l’ignore. Mais le simple fait que tu sois arrivé jusqu’ici et que tu nous aies reconnus prouve que tu es quelqu’un de spécial, Morgennes. Qui sait, peut-être es-tu une sorte de dragon ?
    — Cela ne me fait pas rire, dit Morgennes. De plus, je me permets de vous faire remarquer que vous êtes là vous aussi, Gargano et toi. Et que les marécages m’affectent… Mais, peu importe. Je vais vous sortir d’ici. Que faut-il faire exactement ?
    Marie eut un geste las en direction de l’orgue et décréta :
    — Bientôt, nous ne pourrons plus tirer une seule note de cette splendide œuvre d’art. C’est cet orgue qui aurait mérité d’être ajouté à la collection de mon oncle. Pas le dragon…
    Elle inspira une profonde bouffée de l’air fétide des marais, et poursuivit :
    — Quelque part, plus au sud, les marécages

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