Morgennes
n’iraient pas plus loin.
— Descendons ! fit Gargano.
— Mais où ? Il y a de l’eau partout !
— On va nager. Restez à côté de moi. Je vais essayer de gravir cette falaise. Il y a peut-être une issue, tout en haut.
Après avoir placé Marie sur son dos et l’y avoir fermement arrimée à l’aide d’une corde que Morgennes lui avait donnée, Gargano commença l’ascension de cette septième et ultime cataracte ; cataracte dont personne n’avait jamais entendu parler, et qui ne figurait sur aucune carte. Mais l’eau avait lissé la pierre, rendant l’escalade impossible. Gargano finissait toujours par glisser – et quand il ne glissait pas, il était chassé par l’incroyable quantité d’eau qui leur tombait dessus, et menaçait à chaque instant de les engloutir, Marie et lui.
— Autant escalader une rivière ! se lamenta-t-il quand, pour la troisième fois, il retomba au pied de la cascade bouillonnante.
Chaque tentative se soldait par un échec. C’était un exploit que personne ne pouvait accomplir seul.
— Il nous faudrait de l’aide, conclut Gargano.
Marie eut une idée en voyant une chauve-souris effectuer un piqué. La désignant, elle proposa :
— Elles pourraient peut-être nous aider ?
— Excellente idée !
Puis Gargano se gratta la tête :
— Mais comment ?
— Elles pourraient nous porter ?
— Nous sommes trop lourds.
— Alors elles n’ont qu’à transporter cette corde au sommet, et l’attacher à un rocher, fit-elle en dénouant celle avec laquelle Gargano l’avait amarrée sur son dos. De cette façon, nous aurons moins de mal à grimper…
— Excellente idée !
Aussitôt dit, aussitôt… Non, ce ne fut pas fait. Car les chauves-souris entendaient négocier.
— On se demande qui leur a appris à marchander ! s’étonna Marie. Que veulent-elles ?
— Oh, rien que je ne comprenne… Elles veulent dormir, et pour cela elles veulent un peu d’obscurité.
— De l’obscurité ? Mais il n’y a que ça ici !
— Il faut croire que non, fit Gargano en souriant de toutes ses dents, ce qui dessina dans la nuit de ces cavernes une étrange et effrayante mosaïque – car il avait les dents phosphorescentes.
— Il y aurait une sortie ?
— Mieux que ça, poursuivit Gargano.
— Mieux ?
— Des tas et des tas de sorties, parce que nous sommes au fond du cratère d’un ancien volcan.
— Ce n’est pas très rassurant.
— Elles disent qu’il dort depuis longtemps, mais surtout, qu’il a des dizaines de milliers de « Lumières-embêtantes » dont elles veulent qu’on les débarrasse.
— Des « Lumières-embêtantes » ? Qu’est-ce que c’est ?
— Des diamants ! À foison. Les chauves-souris veulent que nous les prenions, ou du moins que nous fassions en sorte qu’ils cessent de répercuter la lumière de l’extérieur. Elles disent que les diamants et la lumière les gênent pour voler.
Marie étreignit Gargano, puis ce dernier dit aux chauves-souris qu’ils acceptaient de les « débarrasser » des diamants. Au besoin, Gargano provoquerait un glissement de terrain, de façon à les enterrer. Rien de très compliqué, en somme.
— Je n’aurai qu’à taper du pied, expliqua-t-il.
— Quand même ! fit Marie. Prends garde à ne pas taper trop fort. Je n’ai pas envie que la montagne s’écroule, ni que le volcan se réveille.
Deux grosses chauves-souris emportèrent donc leur corde tout en haut de la chute d’eau (dont elles leur apprirent au passage le nom, Mosioatounya, ce qui signifiait : « Fumée-qui-gronde »), puis trois petites chauves-souris choisies parmi les plus habiles nouèrent la corde à un éperon rocheux.
Ensuite, Gargano reprit l’ascension de « Fumée-qui-gronde » en s’aidant de la corde, sous les encouragements des chauves-souris qui voletaient autour d’eux pour lui prodiguer des conseils. Même ainsi, ce ne fut pas facile. Gargano avait enfilé une solide paire de gants. Mais la corde était si tendue, et le trajet si long, qu’à mi-parcours ses gants se déchirèrent. Il dut terminer en tenant la corde dans ses mains nues, ce qui lui arracha la peau et quelques cris de douleur. Serrant les dents, il continua de grimper, s’efforçant de cacher sa souffrance à Marie.
Quand ils atteignirent, au bout de trois quarts d’heure d’une ascension exténuante, l’éperon rocheux auquel la corde avait été fixée, Marie et Gargano se
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