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Morgennes

Morgennes

Titel: Morgennes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: David Camus
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cet exploit !
    — Ah non ? fit Morgennes.
    Ce disant, il lui tendit la savate de Nur al-Din. Le Templier, qui s’appelait Dodin le Sauvage et dont le nom reflétait bien le tempérament, s’en saisit en ouvrant de grands yeux, et décréta :
    — Qu’est-ce que c’est ?
    — La pantoufle de Nur al-Din.
    Dodin en scruta les motifs, sans rien laisser trahir de ses sentiments, puis déclara :
    — Ce peut être la pantoufle de n’importe qui.
    — Puis-je la récupérer ? demanda Morgennes.
    — Non, dit Dodin. Je la garde pour la faire examiner. En attendant, veuillez nous suivre au Krak des Chevaliers, où votre histoire sera entendue et votre cas jugé.

19.
    « Mais à quoi bon me disculper, alors que je n’ai aucune chance d’être cru ? »
    (CHRÉTIEN DE TROYES, Guillaume d’Angleterre .)
    —  Si vous n’en voulez pas, s’emporta Coloman, moi je l’emmène !
    — Prenez-le, et grand bien vous fasse ! répliqua vivement Galet le Chauve, le maître du Temple de Tortose, un homme à la tête aussi lisse qu’une pierre.
    Ils se disputaient au sujet de Morgennes, dont il s’agissait de mesurer le rôle dans la déroute de l’armée de Nur al-Din, et de savoir s’il avait, ou non, usurpé le rang de chevalier alors qu’il n’était même pas écuyer…
    Beaucoup avaient reconnu en lui le comédien applaudi à Jérusalem, d’autant plus facilement que je l’avais enfin rejoint.
    Pour l’heure, alors que la journée s’acheminait vers le couchant, nous étions tous dans la grande salle du Krak des Chevaliers, sur un pilier de laquelle était gravée cette inscription : «  Sit tibi copia, Sit sapientia, Formaque detur Inquinat omnia sola, Superbia si comitetur. »
    C’est-à-dire, traduisit Morgennes pour lui-même : « Aie la richesse, aie la sagesse, aie la beauté, mais garde-toi de l’orgueil qui souille tout ce qu’il approche. »
    Méditant cette phrase, il passa la main sur ses blessures, au ventre et au bras. Les médecins du Krak l’avaient bien soigné, en appliquant un mélange d’herbes et de boue sur ses plaies.
    En effet, après l’avoir arrêté, les Templiers avaient escorté Morgennes au sommet du Djebel al-Teladj, au Krak des Chevaliers. À cette époque (en 1163), la forteresse était entourée d’une seule enceinte, flanquée de tours rectangulaires. Une modeste chapelle, une cour, un petit château, formaient l’intégralité du Krak – que des moines chevaliers travaillaient à renforcer par une seconde enceinte, en forme de triangle.
    — Elle sera prête dans un an, apprit à Morgennes Keu de Chènevière, un jeune Hospitalier chargé de le conduire, d’abord à l’infirmerie, ensuite à la grande salle. Quand elle sera achevée, cette place forte sera véritablement imprenable… Loin des hommes, comme Dieu, et pourtant comme Lui ne cessant de veiller sur eux…
    — Magnifique, avait dit Morgennes en admirant les échafaudages, où des ouvriers enturbannés s’activaient.
    Mais ce n’était pas l’heure de la visite. En vérité, parmi les nombreux partis présents au Krak en cette fin de journée – Templiers, laïcs, Byzantins, et bien sûr Hospitaliers –, nombreux étaient ceux à penser que le comportement de Morgennes, plutôt qu’héroïque, relevait du sacrilège.
    — Il n’est pour rien dans la victoire d’aujourd’hui !
    — Il a cherché à nous berner !
    — Se faire passer pour saint Georges !
    — C’est un usurpateur ! Un comédien !
    — Pire, un juif peut-être !
    — Mais non, mais non…, modéra Coloman, le Maître des Milices de Constantinople. Il est rusé comme un goupil, c’est tout. Si formidablement, d’ailleurs, que je ne serais pas surpris s’il était un jour élu pape !
    Des regards chargés d’éclairs se tournèrent vers lui, et la tension monta d’un cran. Chrétiens de Rome et de Constantinople étaient régulièrement à couteaux tirés quand il s’agissait de savoir lesquels d’entre eux étaient les dignes héritiers de Jésus-Christ. Alors, ce fut le sage Raymond de Tripoli, le comte du petit État du même nom, qui coupa court à leur dispute :
    — Voyons les choses en face, dit-il simplement. Cet homme, Morgennes, ne nous a nui aucunement… Est-ce à lui que nous devons la déroute de l’armée de Nur al-Din ?
    — Non, à nous ! beugla Galet le Chauve.
    — … ou à l’intervention de nos amis du Temple et de Constantinople ? poursuivit imperturbablement

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