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Mort à Devil's Acre

Mort à Devil's Acre

Titel: Mort à Devil's Acre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
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manque de respect, serait malvenue à ce stade de l’enquête. Mais
Mullen lui fournit spontanément la réponse. Il ne tenait sans doute pas à ce qu’on
le soupçonnât d’incompétence.
    — Chaque hiver, ils descendaient dans le Devon, dit-il
avec une pointe d’amertume. Le voyage ne me plaisait guère, et je ne souhaitais
pas rester inactif en ville durant plusieurs mois de l’année, à surveiller un
personnel réduit, dans une maison déserte.
    — Je comprends, acquiesça Pitt.
    La gestion d’un grand domaine était une tout autre affaire
avec les battues, les chasses à courre, suivies de bals, et les nombreux
invités venus fêter Noël à la campagne. Sans compter que pour un homme habitué
à la capitale, le silence du Devon devait représenter une forme d’exil.
    — Travailler au service d’un médecin doit être
passionnant ? poursuivit Pitt, pour entrer dans le vif du sujet.
    Mullen eut un sourire poli. C’était un homme bien trop
discret pour aller répéter tout ce qu’il avait appris au cours de ces longues
années passées au service du Dr Pinchin. Un majordome trahissant la confiance
de son maître était à ses yeux un être méprisable qui entachait l’honneur de
toute la profession.
    Il répondit à dessein à côté de la question ; tous deux
se comprenaient fort bien.
    — Oui, monsieur. Mais le Dr Pinchin ne recevait pas ses
patients à son domicile. Son cabinet était situé dans Highgate. Toutefois d’éminents
collègues venaient dîner ici, à l’occasion.
    Mullen cita les noms de plusieurs praticiens et chirurgiens
très connus. Pitt les nota mentalement, en se promettant d’aller leur rendre
visite afin de compléter l’image qu’il se faisait d’Hubert Pinchin, bien qu’il
sût d’expérience que les membres d’une même corporation ont tendance à faire
corps et à se défendre mutuellement, avec un acharnement frisant parfois le
ridicule. Néanmoins, il gardait l’espoir qu’une jalousie personnelle ou
professionnelle fasse se délier les langues.
    Mullen lui en apprit un peu plus sur les habitudes du
médecin, en particulier qu’il rentrait souvent très tard à son domicile ; il
lui arrivait même parfois de ne pas rentrer de la nuit, sans donner d’explication ;
on pouvait supposer que les gens ne tombent pas forcément malades pendant les
heures de bureau !
    Quelques instants plus tard, la camériste frappa à la porte
pour demander au policier de la suivre dans la salle à manger ; sa
maîtresse était prête à s’entretenir avec lui.
    Valeria Pinchin était une sorte de Walkyrie aux yeux bleus, à
la poitrine opulente, au grand front balayé par une mèche de cheveux blonds
grisonnants. Elle était entièrement vêtue de noir, comme toute veuve en grand
deuil, non seulement à cause du décès brutal de son époux, mais aussi des
circonstances particulièrement tragiques de sa mort.
    Son visage exprimait une sévère détermination. Pâle et sur
la défensive, elle observait Pitt avec circonspection.
    — Madame, commença-t-il d’un ton où perçaient la
déférence et une réelle compassion, permettez-moi de vous offrir mes
condoléances, dans la terrible épreuve que vous traversez.
    — Merci, répondit-elle en relevant son menton puissant
avec un léger reniflement. Vous pouvez vous asseoir, Mr… euh… Pitt.
    Il prit place en face d’elle, de l’autre côté de la table du
petit déjeuner. Elle but une gorgée de thé, sans même lui en proposer une tasse.
La venue de ce policier était inhérente au désastre qui la submergeait. Il
faisait partie de ces gens dont, par nécessité, on était parfois obligé de
supporter la pénible présence, comme les dératiseurs ou les cureurs de
caniveaux. Il était inutile de le traiter en égal.
    — Je suis désolé, madame, reprit Pitt, mais je me vois
dans l’obligation de vous poser un certain nombre de questions.
    Elle fixa sur lui un regard outré.
    — Je ne peux vous être d’aucune aide ! Vous n’imaginez
pas que je suis au courant de ce… de cet…
    Elle n’acheva pas sa phrase, incapable de trouver un mot
suffisamment suggestif.
    — Bien sûr que non, madame.
    Pitt n’arrivait pas à la trouver sympathique. Il s’obligea à
se souvenir de gens, encore sous le choc d’un épouvantable drame, qu’il avait
rencontrés par le passé. Chacun avait eu sa manière propre de cacher son
chagrin et de protéger ses blessures.
    Mrs. Pinchin se calma, mais ses yeux bleus

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