Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Mort à Devil's Acre

Mort à Devil's Acre

Titel: Mort à Devil's Acre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Perry
Vom Netzwerk:
étaient closes ;
il était donc impossible d’apprécier l’énergie qui l’animait avant sa mort.
    Pitt baissa les yeux et entrouvrit le manteau que l’agent
Dabb, par pudeur, avait refermé pour cacher la plaie. Celle-là était nette, une
seule entaille, peu profonde. On ne voyait que quelques traces de sang. Il
souleva les épaules pour examiner le dos. Le tissu était lacéré et l’on
remarquait une longue traînée de sang à gauche de la colonne vertébrale. Cette
blessure avait provoqué le décès, comme pour les autres victimes. Il remit le
corps en place.
    — Avez-vous fait appeler le médecin légiste ?
    — Bien sûr, monsieur, fit l’agent, atteint dans son
orgueil de policier.
    Comment aurait-il pu oublier ce devoir primordial ?
    Pitt jeta un coup d’œil circulaire autour de lui. La rue
était étroite, bordée de maisons branlantes aux charpentes de bois vermoulu. Le
plâtre gonflé par l’humidité s’écaillait par plaques, les caniveaux débordaient.
Aurait-on remarqué un homme traînant un corps, ou deux personnes en train de se
battre ? Il en doutait. Un client entrant ou sortant d’un tel lieu serait
difficile à retrouver et, quand bien même, il refuserait de témoigner. L’homosexualité
était un crime passible de longues années d’emprisonnement ; la vie d’un
homme soupçonné de telles pratiques serait ruinée. Pourtant, ces mœurs étaient
relativement courantes, mais obliger les gens à admettre qu’ils ne les
ignoraient pas relevait de l’illusion.
    — Voyez ce que vous pouvez faire, ordonna-t-il aux deux
hommes. Quelqu’un a-t-il l’adresse de la famille ?
    — Oui, monsieur.
    Le sergent déchira la feuille de calepin sur laquelle il
avait noté l’adresse et la lui tendit.
    Pitt soupira.
    — Bon, il vaut mieux que j’aille les prévenir avant que
les journaux ne tirent une édition spéciale. On ne devrait jamais apprendre ce
genre de chose par la presse.
    — Malheureusement, des reporters sont passés par là il
y a environ une heure. J’ignore qui les a renseignés.
    Inutile de chercher. Ici, les murs avaient des yeux et des
oreilles ; des gens accoutumés à la mort n’hésitaient pas, pour grappiller
quelques sous, à appeler un échotier toujours à l’affût de nouvelles
croustillantes et prêt à se précipiter à Fleet Street avec du matériau tout
frais pour faire la une de son journal.
    Pitt remonta dans le cab et donna au cocher l’adresse de la
résidence londonienne des Astley.
    Le ciel commençait à s’éclaircir lorsqu’il descendit du cab.
Il préféra le laisser repartir, ne sachant trop combien de temps il allait
rester là.
    On ne voyait pas âme qui vive dans la rue, excepté une fille
de cuisine qui sortait des poubelles et un cireur de bottes entrant dans une
maison par la porte de service, qu’il referma à toute volée. Seuls les
quartiers des domestiques commençaient à s’animer. Il gravit les marches du
perron et frappa à la porte d’entrée. Elle s’ouvrit sur un valet tout ébaubi.
    — Bonjour, dit Pitt d’une voix assurée, sans lui
laisser le temps de réagir. Je suis de la police et j’apporte une très mauvaise
nouvelle. Auriez-vous l’obligeance de me laisser entrer et d’informer le chef
de famille de ma présence ? Surtout, n’oubliez pas d’apporter du brandy ou
un cordial susceptible de remédier à un état de choc.
    Un instant pétrifié, le valet s’effaça sans protester pour
le laisser passer et referma la porte.
    — Sir Bertram… commença-t-il.
    — … n’est pas chez lui. Je le sais, l’interrompit Pitt
avec douceur. Et pour cause. Il est décédé. Je suis désolé.
    Le valet tenta de reprendre ses esprits, mais visiblement la
situation le dépassait. Il avala sa salive.
    — Je vais… je vais tout de suite chercher Mr. Hodge, le
majordome, et Mr. Beau, le frère de Sir Bertram.
    Avant que Pitt ait dit un mot, il ouvrit la porte du petit
salon et lui fit signe d’entrer. L’âtre était nettoyé, mais la bonne n’avait
pas encore eu le temps d’allumer le feu.
    — Si vous voulez bien patienter ici… dit-il avant de
disparaître dans la pénombre du vestibule, vers la grande porte verte
matelassée derrière laquelle il se retrouverait en sécurité.
    Pitt examina la pièce, décorée d’un riche mobilier exotique :
tables japonaises laquées, marqueterie d’ébène, coffrets de bois gravé en creux ;
sur les murs, des aquarelles de peintres français. Les

Weitere Kostenlose Bücher