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Mort d'une duchesse

Mort d'une duchesse

Titel: Mort d'une duchesse Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elisabeth Eyre
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douteux à l’œil, Benno. Est-ce que vous dormez tous dans la même
pièce, là-bas ?
    — Je me suis dit que si on devait filer en toute discrétion,
le quartier des serviteurs était le dernier endroit où s’installer. Je dors
avec les chevaux.
    — Parfait, dit la veuve qui, remettant en place le papier
du mieux qu’elle le put, redescendit de son perchoir.
    Benno s’éloigna, Biondello courant en cercle autour de lui.
    La journée s’écoula. D’autres nonnes avaient rejoint celles
qui veillaient sœur Benedicta. Le sourd murmure des prières, récitées à présent
à haute voix, envahissait l’annexe. Lorsque la veuve, après s’être arrêtée
comme les autres fois devant l’autel, porta son souper à Cosima, elle la trouva
allongée dans la même position où elle l’avait vue le premier jour ; mais
à son entrée, les paupières battirent et Cosima s’assit sur son lit.
    — J’ai reconnu votre parfum, chuchota-t-elle. Oh, cousine
Caterina, j’ai bien écouté, bien réfléchi… et voyez !
    À nouveau elle rejeta les couvertures, posa les pieds à
terre et se leva.
    — J’arrive à marcher. Il n’y a pas beaucoup de place, et
au début c’était terrible, je n’arrêtais pas de tomber… j’aurais voulu que vous
veniez m’aider… Regardez.
    Elle gagna l’extrémité de la cellule puis revint, mais se
rallongea avec un tel soulagement qu’il ne pouvait s’agir que de fanfaronnades.
La veuve lui donna son souper et la regarda manger.
    — J’ai tellement faim ! On ne me nourrit pas beaucoup,
à cause de la fièvre, mais cela ne me faisait rien jusqu’à aujourd’hui. Et vous,
que mangez-vous donc, cousine ?
    — Oh, on me donne plus que je puis avaler, rétorqua la
cousine Caterina avec un doux sourire.
    Elle était habituée à jeûner. Cosima mangea. On lui avait
imposé un régime sévère, mais ce ragoût était garni d’herbes et d’épices
roboratives.
    La veuve récupéra cuillère et assiette, qu’elle dissimula
sur sa personne. Lorsque Cosima eut fini son vin, elle lui demanda :
    — Que ferais-tu, petite cousine, si la sœur entrait pendant
que tu t’entraînes à marcher ?
    Cosima prit un air égaré. Elle ressemblait à Benno dans ses
pires moments.
    — Voilà. Je ferais semblant de ne pas savoir où je suis.
    Elle tendit la coupe vide à la veuve et se rallongea.
    La veuve gloussa en silence.
    — Le cousin Jacopo n’aurait pas amassé toutes ces richesses
s’il était stupide, dit-elle. Tu es bien sa fille.
    Sous les cheveux ras, le visage menu de Cosima prit un air
de défi.
    — Je ne me laisserai pas faire par cette Bandini !
    Cousine Caterina se retourna pour partir. La porte s’ouvrit,
inutile de frapper pour entrer dans la chambre d’une jeune fille droguée, et
mère Luca apparut. La main posée sur le loquet, elle dévisagea les deux femmes.
Cosima gisait telle une mourante, les yeux clos, le visage dépourvu de toute
expression, et la veuve trébucha, se rattrapant au dernier moment au côté
intérieur du loquet, que mère Luca faillit lâcher.
    Ses yeux montraient leur blanc de manière hideuse.
    — Oh, ma mère, enfin. J’ai été jusqu’à l’autel… Je me
suis sentie si bizarre… Comment cette jeune fille est-elle entrée dans ma
cellule ? Est-elle morte ?
    Le visage de mère Luca exprimait sans ambiguïté qu’il lui
eût été parfaitement indifférent que la veuve elle-même en fût aux toutes
dernières extrémités. Elle força un sourire qui conférait une nouvelle
signification à l’expression « du bout des lèvres » et enfouit les mains
dans ses manches comme pour réprimer l’envie de flanquer un coup de poing sur l’oreille
de la veuve.
    — Regagnez votre chambre, ma fille. Celle-ci n’est pas
la vôtre. Retournez dans votre cellule et restez-y. Je vais vous préparer un
médicament qui vous calmera. Cette enfant est très malade, mais si on la laisse
en paix elle ne mourra pas.
    La veuve, chuchotant ses excuses et ses remerciements, sortit
de la pièce en s’appuyant au mur tandis que mère Luca s’effaçait pour la
laisser passer. La porte se referma. La veuve ne put que spéculer sur la façon
dont mère Luca estima l’état de Cosima. Le médicament qu’elle aurait dû prendre
était dans le pot de chambre, discrètement dilué.
    De retour dans sa cellule, la veuve dressa l’oreille, mais
le bourdonnement des prières dans la pièce adjacente noyait tout autre son. Il
ne serait pas

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