Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Napoléon

Napoléon

Titel: Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
Vom Netzwerk:
la nuit, il est sept heures du soir, l’Empereur – il a revêtu son costume légendaire – monte dans sa voiture qui, à travers la foule, descend au pas vers le tunnel que l’Empereur a fait aménager en contrebas des Mulini afin de gagner plus commodément la ville. L’équipage prend la via del Carminé, se dirige vers la porte de Terre, mais ne la franchit pas car les chevaux tournent brusquement à gauche pour descendre la pente en direction de la place du Grand Rempart et du port. La petite cour, ayant Bertrand et Drouot à sa tête, suit à pied. La ville est tout illuminée par des. lampions et des verres de couleur. Arrivé sur la place, devant la Porte de Mer, l’Empereur sort de sa voiture, calme d’un geste les cris de Evviva Napoleone, et lance d’une voix qui s’entend au loin :
    — Elbois, je rends hommage à votre conduite. Tandis qu’il était à l’ordre du jour de m’abreuver d’amertume, vous m’avez entouré de votre amour et de votre dévouement. Je vous en témoigne ma gratitude. Elbois ! je ne sais pas être ingrat : comptez sur ma reconnaissance. Votre souvenir me sera toujours cher. Adieu, Elbois !... Je vous aime, vous êtes les braves de la Toscane !...
    La foule entoure maintenant l’Empereur. Tous parlent en même temps :
    — Sire, c’est un tel qui vous dit adieu, je donnerais ma vie pour Votre Majesté.
    — Sire, je vous salue : je n’ai pas pu venir moi-même, je vous ai donné mon fils.
    — Sire, que Votre Majesté fasse un bon voyage,
    — Sire, soyez heureux, comptez sur les Elbois.
    — Sire, nos voeux vous accompagnent, donnez-nous bientôt de vos nouvelles.
    Non sans peine, il s’arrache aux bras qui l’agrippent de toute part, traverse la Porte, franchit les quelques mètres qui le séparent de l’embarcadère et prend place sur l’espéronade la Caroline qui, à force de rames, le conduit jusqu’à l’Inconstant.
    Le brick tire aussitôt un coup de canon. C’est le signal du départ. Lorsque la brise du sud-est se lèvera, l’Empereur donnera l’ordre aux différents bâtiments de mettre le cap – isolément – sur le golfe Jouan, en passant le plus loin possible des côtes et d’Italie et de Corse.
    Le 27 février, à la hauteur de l’île de Capraja, on aperçoit à l’est, très au loin, la Partridge qui, Campbell à son bord, regagne Porto-Ferrajo. Le colonel a écourté sa fugue amoureuse à la suite des dernières dépêches du marchand d’huile, envoyées à Livourne. Assurément, il se passe « quelque chose d’insolite » à isola Elba... Mais la frégate anglaise avait, elle aussi, été arrêtée dans sa marche par la même absence de vent et la brise du sud-est l’oblige maintenant à tirer des bordées. Le soleil, encore bas sur l’horizon, empêche les Anglais d’apercevoir la flottille qui porte Napoléon et son destin.
    Pour alléger le brick, on sacrifie les deux canots en remorque. Dans l’après-midi, nouvelle rencontre. On devine, à bâbord, les deux frégates de Louis XVIII – la Fleur de Lys et la Meipomène – qui, elles aussi, ont pour mission de surveiller l’île d’Elbe et son souverain. Cependant, la croisière française ne peut rien distinguer. Toujours le soleil, mais cette fois le soleil à son déclin...
    On approche de Gorgone – un îlot caillouteux – lorsqu’on voit arriver, droit sur l’Inconstant, un autre bâtiment français : le Zéphir. L’Empereur ordonne aussitôt aux grenadiers – près de cinq cents ont pris place à bord – de se coucher sur le pont et d’enlever leur célèbre bonnet d’ourson. À portée de voix, le lieutenant Taillade, qui connaît le capitaine Andrieux, commandant le Zéphir, crie, en répétant les paroles que lui souffle l’Empereur caché derrière la dunette :
    — Où allez-vous ?
    — À Livourne. Et vous ?
    — À Gênes. Avez-vous des commissions ?
    — Non. Et comment se porte le grand homme ?
    — À merveille !
    Au lever du jour, le 28 février, un vaisseau de soixante-quatorze canons passe à l’horizon, mais ne fait même pas attention au brick.
    — C’est une journée d’Austerlitz ! s’exclame Napoléon.
    À midi, il voit se profiler à l’horizon le cap d’Antibes...
    Exactement à la même heure, Campbell – après que la frégate anglaise, faute de vent, est demeurée plusieurs heures en panne devant l’île d’Elbe – gagne le port à la rame. Dès qu’il franchit la passe, le colonel est

Weitere Kostenlose Bücher