Napoléon
parmi vous reprendre mes droits qui sont les vôtres... » Puis :
« Soldats ! dans mon exil j’ai entendu votre voix ! Je suis arrivé à travers tous les obstacles et tous les périls ! Votre général appelé au trône par le choix du peuple, et élevé sur le pavois, vous est rendu, venez le joindre !...
« Soldats, venez vous ranger sous les drapeaux de votre chef ; son existence ne se compose que de la vôtre ; ses droits ne sont que ceux du peuple et les vôtres ; son intérêt, son honneur, sa gloire, ne sont autres que votre intérêt, votre honneur et votre gloire. La victoire marchera au pas de charge ; l’aigle avec les couleurs nationales, volera de clocher en clocher jusqu’aux tours de Notre-Dame ; alors vous pourrez montrer avec honneur vos cicatrices ; alors vous pourrez vous vanter de ce que vous aurez fait : vous serez les libérateurs de la patrie... »
Paroles qui vont créer la légende de l’Aigle et faire oublier à quel point l’équipée devait être néfaste pour la France.
Le brick s’est approché de la côte, l’Empereur donne l’ordre à Lamouret, le plus ancien capitaine de la Garde, de débarquer avec une vingtaine de grenadiers, et d’occuper la batterie de la Gabelle placée non loin de l’actuelle petite gare du golfe Jouan, près de la route qui va d’Antibes à Cannes, sur le territoire de Vallauris. La batterie est vite désarmée.
C’est alors que de sa propre initiative, ayant formé le projet de rallier la garnison d’Antibes, le capitaine arrive devant la Porte Royale et demande à entrer dans le fort. Déjà Bertrand, un capitaine à la suite, vêtu d’habits bourgeois, était venu porter les proclamations impériales et s’était fait arrêter par le commandant d’armes, le colonel Cunéo d’Ornano. Le détachement de Lamouret connaîtra bientôt le même sort... Les soldats du 87 e , sans enthousiasme d’ailleurs, obéissent à leurs chefs. Cependant la petite garnison ne se porte nullement vers le golfe Juan et va laisser l’Empereur mener paisiblement ses projets. Napoléon regrette presque cette passivité. — J’aurais préféré que l’on se battît un peu, dira-t-il plus tard, qu’il y eût cinquante hommes de la Garde tués et deux cents royalistes. Cela aurait permis des mesures énergiques.
Il est une heure de l’après-midi lorsque l’Inconstant, l’espéronade, la polacre et les deux chebecs jettent l’ancre, et, aussitôt, « l’armée » quitte les navires. Tout à fait au fond de la baie, où se trouve aujourd’hui le port de Golfe-Juan, une stèle, ornée d’une disgracieuse mosaïque, marque l’emplacement où Napoléon met le pied sur le sol de France. Il monte à cheval – l’animal a été embarqué à Porto-Ferrajo
— et par l’actuelle avenue de la Gare – « Ici commence la route Napoléon », précise une inscription – l’Empereur vient se placer non loin du carrefour du chemin de Yallauris et de la route d’Antibes – notre Nationale n° 7.
Au fur et à mesure qu’elles débarquent, les troupes passent devant lui {43} . À cinq heures tous ont quitté les navires. L’Empereur appelle Cambronne et l’envoie vers Cannes avec une quarantaine de grenadiers et de chasseurs. Ordre de réquisitionner des vivres et – en les payant – de se procurer des chevaux et des mulets.
— Cambronne, ajoute-t-il, je vous confie l’avant-garde de ma plus belle campagne. Vous ne tirerez pas un seul coup de fusil. Songez que je veux reprendre ma couronne sans verser une goutte de sang.
Le général trouve Cannes en effervescence. Les coups de canon de la flottille saluant le débarquement de l’Empereur ont été pris pour un bombardement de corsaires algériens – et les habitants se sont barricadés. Les bonnets à poil des grenadiers ont calmé l’agitation, mais la foule n’en a pas moins entouré les Elbois « avec plus d’anxiété que de sympathie ». Certains pensent déjà au spectre de la guerre qui ne manque pas de se profiler derrière l’Empereur...
Le premier contact de Cambronne avec le maire de Cannes est assez décevant. « Vieillard d’un aspect respectable », royaliste convaincu « qui aurait mieux aimé voir le bey d’Alger lui-même qu’un général de Bonaparte », il déclare au commandant de l’avant-garde que Vallauris où l’Empereur a débarqué, ne dépend pas de sa municipalité et qu’il ne se portera pas au-devant de Napoléon.
Pendant
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