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Napoléon

Napoléon

Titel: Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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    Tout aurait pu être arrangé si les Anglais avaient accepté la proposition de leur prisonnier : prendre un autre nom, celui de colonel Duroc ou de comte de Lyon – bien que ce dernier titre ait été porté par des chanoines. Or, changer d’état-civil est un privilège appartenant aux souverains – et c’est pourquoi les gouverneurs refusèrent cette solution. Pour eux, l’empereur Napoléon n’existait pas !
    Cockburn fait pourtant ce qu’il peut – hors assouplir ses consignes – pour rendre supportable la vie de son prisonnier. Il envoie aux Briars ses trois chevaux venus d’Angleterre à bord du Northumberland – mais l’Empereur refuse de les monter puisqu’il doit être suivi dans ses sorties par un officier anglais.
    Il se contente de se promener à pied autour des Briars. Un jour qu’il se trouvait avec Mrs Balcombe et la jeune Mrs Stuart, de passage à Sainte-Hélène, l’Empereur croisa des esclaves chargés de lourdes caisses. Mrs Balcombe leur ordonna « fort rudement » de s’écarter.
    — Respect au fardeau, Madame, protesta alors le proscrit.
    « À ces mots, nous rapporte Las Cases, Mrs Stuart laissa échapper tout bas à sa voisine « Mon Dieu, que voilà une figure et un caractère bien différent de ce qu’on m’avait dit ! »
    Napoléon espère que sa chaîne sera allongée lorsqu’il se trouvera à Longwood. Cependant, Las Cases qui a été voir où en sont les travaux, déclare :
    — Sire, ici nous sommes en cage. Là-bas, nous serons parqués.
    En effet, les Briars paraîtront un jour à l’Empereur comme une manière d’Éden. Il est vrai aussi que, à Longwood, il lui sera plus facile de tisser avec un art consommé sa légende.
    Le dimanche 10 décembre, Cockburn vient chercher son prisonnier : Longwood est prêt à le recevoir. Avant de monter à cheval, l’Empereur donne à Betsy, sa « compagne de jeu », une bonbonnière. « Je fondis en larmes, dira-t-elle, et sortis précipitamment de la pièce. J’allai me poster à une fenêtre, mais je n’eus pas le courage de m’y tenir, au moment du départ de l’Empereur. Mon coeur était trop gros. Je me jetai sur mon lit, et longtemps, longtemps, je continuai de pleurer. »
    Il pleut tandis que le petit cortège monte vers le plateau balayé par le vent. Mais le soleil paraît entre deux nuages et accueille l’Empereur au seuil de sa prison – cette prison qu’il ne quittera qu’enfermé dans son cercueil.
    Grâce à l’amabilité de notre consul à Sainte-Hélène, Gilbert Martineau, j’ai pu passer la nuit dans la chambre occupée autrefois par Las Cases et apprécier le bain humide où se trouve fréquemment, le matin, plongé le plateau de Longwood. La soirée avait été froide, le vent soufflait en rafales. À l’aube, une brève averse avait précédé un affreux crachin sous lequel, durant deux heures, je suivis l’enceinte où l’Empereur pouvait librement circuler. Vers dix heures, le soleil se levait et, non sans mal, dissipait les nuages. Les sommets des montagnes réapparurent.
    Le climat de Longwood n’est pas celui de Jamestown ou de Plantation-House. Il pleut ici presque tous les jours. Le sol, surchauffé, transforme la pluie en un brouillard tiède, malsain, qui tombe sur les êtres et les choses comme une épaisse chape grise. On se traîne et on ruisselle. Même l’été – l’hiver en notre hémisphère – si le plateau est dégagé, le soleil est souvent caché par de lourds nuages plombés. Le vent extrêmement fort et fréquent – tantôt froid, tantôt brûlant – ne balaye point la brume : il brasse l’air chargé d’eau, et c’est là tout : l’humidité demeure. Sur le plateau de Longwood, les murs sont d’ailleurs recouverts d’un champignon blanchâtre : le mildew.
    C’est au sein de cette vapeur, dans ce bâtiment en forme de T, que Napoléon vécut quatre années et cinq mois. Un petit perron de cinq marches conduit à deux pièces construites en équerre au milieu dela façade : l’antichambre et le salon recouvert d’un papier jaune et éclairé de part et d’autre par des fenêtres à guillotine. Pour l’ameublement, « je suis parvenu, écrira Cockburn à Londres, à me procurer d’occasion et au plus bas prix tous les articles indispensables ». Napoléon aura raison lorsqu’il parlera de « six cents francs de meubles ». Deux mappemondes – elles y sont toujours – ornent la piece. Juste

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