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Napoléon

Napoléon

Titel: Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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eau, une chose le préoccupe : son cher Godoy est placé à une table de service. Il ne retrouve son calme que lorsque le prince de la Paix est installé non loin de lui. Le roi peut alors manger de bon appétit. On l’entend dire à sa femme :
    — Louise, reprends de ceci : c’est bien bon.
    Les descendants de Louis XIV sont désormais à la discrétion de Napoléon.
    Ce même 30 avril, l’Empereur écrit à Murat : « Il est nécessaire que, dans ces deux jours, je débrouille ces affaires. » Deux jours plus tard, en effet, Charles IV adresse à son fils une lettre lui signifiant que ses crimes l’empêchent de lui succéder au trône et que « l’Espagne ne pourrait plus être sauvée que par l’Empereur ». Aussi, ce 2 mai, Napoléon pose-t-il au grand-duc de Berg ce singulier problème : « Je destine le roi de Naples à régner à Madrid. Je veux vous donner le royaume de Naples ou celui de Portugal. Répondez-moi sur-le-champ ce que vous en pensez ; car il faut que cela soit fait dans un jour. »
    Murat répond :
    « Des torrents de larmes coulent de mes yeuxen vous répondant. « Vous avez bien connu mon coeur quand Votre Majesté a pensé que je lui aurais demandé à rester auprès d’Elle : oui, je le demande, oui, je l’implore... Habitué à vos bontés, accoutumé à vous voir chaque jour, à vous admirer, à vous adorer, à recevoir de vous toute chose, comment pourrais-je jamais seul, livré à moi-même, remplir des devoirs aussi étendus, aussi sacrés ? Je m’en crois incapable. Par grâce laissez-moi auprès de vous. La puissance ne fait pas toujours le bonheur ; le bonheur ne se trouve que dans l’affection. Je le trouve près de Votre Majesté ! »
    Murat va-t-il refuser ? Non, ce serait mal le connaître. Il ajoute – bien vite :
    « Sire, après avoir exprimé à Votre Majesté ma douleur et mes désirs, je dois me résigner, je me mets à vos ordres. Pourtant, usant de la permission que vous me donnez de choisir entre le Portugal et Naples, je ne saurais hésiter, je donne ma préférence à la contrée où j’ai déjà commandé ; où je pourrai plus utilement servir Votre Majesté ; je préfère Naples et je dois faire savoir à Votre Majesté qu’à aucun prix je n’accepterai la couronne du Portugal. »
    Voici donc le royaume de Naples casé ! Pour Lisbonne, on verra plus tard ! Mais, craignant que son frère ne fasse grise mine d’être obligé de troquer Naples contre Madrid, il vante à Joseph son cadeau espagnol : « Ce n’est pas ce qu’est le royaume de Naples : c’est onze millions d’habitants, plus de cent cinquante millions de revenus, sans compter les immenses revenus et la possession de toutes les Amériques. C’est une couronne d’ailleurs qui vous place à Madrid, à trois jours de la France et qui couvre entièrement une de ses frontières. »
    Joseph s’incline comme le grand-duc de Berg. Ainsi que le dira Chateaubriand : « L’Empereur enfonça d’un coup de main ces coiffures sur le front des deux nouveaux rois et ils s’en allèrent chacun de leur côté comme deux conscrits qui ont changé de shako. »
    Cependant Charles IV, le 2 mai, jour où Napoléon fait son chassé-croisé de rois, n’a pas encore abdiqué. Ce sera chose faite le 5 mai. Ce jour-là, le roi d’Espagne cède à Napoléon ses États, à la seule condition « de respecter l’intégrité territoriale du royaume et de n’y tolérer d’autre religion que la catholique ». En échange, Charles et Marie-Louise recevront Compiègne, Chambord et six millions de francs annuels. Seul Ferdinand continue de résister et, légalement, peut toujours se considérer comme roi de toutes les Espagnes.
    Soudain, ce même 5 mai, arrive à Bayonne la nouvelle de la sanglante insurrection madrilène du 2 mai – le célèbre dos de mayo – vigoureusement maîtrisée par les mamelouks de Murat qui ont chargé la foule à la Puerta del Sol – et, ce jour-là, les Espagnols se sont crus revenus à l’époque de la lutte contre les Maures ! L’événement va permettre à Napoléon de jouer avec adresse le dernier acte du dramatique guet-apens de Bayonne. En effet, Ferdinand n’est pour rien dans le déclenchement de l’insurrection – causée par le départ des Infants, par leur enlèvement plutôt – mais l’Empereur tient là un beau prétexte ! Il a reçu la nouvelle de l’émeute au cours d’une promenade à cheval et a galopé aussitôt

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